Nice : étoiles à emporter

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Nice : étoiles à emporter

Par Philippe DUPUY

Le confinement et les mesures de fermeture sanitaire ont contraint les restaurateurs à s’adapter pour survivre . Plutôt que de laisser leur cuisine en friche pendant de longs mois, beaucoup ont opté pour le click & collect et/ou la livraison à domicile. Même les chefs étoilés s’y sont mis ! Mais peut-on vraiment retrouver l’expérience d’un restaurant gastronomique dans sa propre salle à manger ? C’est ce que nous avons voulu savoir en allant toquer à la porte  de l’unique deux étoiles de Nice, Flaveur, rue Gubernatis. Les frères Gaël et Mickaël Tourteaux ont, en effet, décidé  de se lancer dans la livraison à domicile après le premier confinement : « On y est allé sur la pointe des pieds sans trop savoir ce que ça allait donner, raconte Mickaël. Mais on a été agréablement surpris : la clientèle a répondu présent tout de suite. Pour les fêtes, on a même dû refuser des dizaines de commandes« . « C’est presque un nouveau métier, poursuit son frère Gaël. Il a fallu tout inventer : à commencer par le packaging qu’on a fait fabriquer sur mesure par un fournisseur du quartier« . Les Tourteaux ont  fait le choix de livrer eux mêmes les commandes et de présenter les menus déjà dressés, en assiette. « Il a fallu adapter notre cuisine, reconnaît Gaël, car certains plats ne pouvaient pas être transportés tels quels. Mais l’idée est quand même d’offrir une prestation digne du restaurant« .

Flaveur propose  3 menus à emporter ou à livrer : Inspiration (3 services 75 €), Exploration (4 services 100 €)  et Toutes latitudes (5 services 125€). On s’est laissé inspirer par le premier  : Truite du Cian confite de Remi Callonico/ suc de crustacés/ paprika fumé/rougail d’aubergines. Mérou et crevette de Méditerranée de la pĉhe de Steve Molinari/ Cassolette d’Automne de Roveja/ Jus de pétoncles. Grosse prune d’hiver semi-confite/Montecato aux noix fraiches et huile d’argan/café. Le tout livré dans un superbe sac de papier kraft,  avec le pain, des croutilles de polenta pour l’apéro et un bel assortiment de mignardises (chocolat Dulcey, pâte de fruits mangue papaye, crème citron pépites de chocolat au thé mattcha, caramels mous…). Pour le vin,  Flaveur renvoie sur le caviste du quartier : « Pas question de faire de la concurrence ou de charger l’addition. La période est difficile pour tout le monde » estime Gaël. Lui et son frère cuisinent le matin et livrent l’après midi pour le repas du soir : « On a des habitués chez qui on va plusieurs fois dans le mois, d’autres qui nous commandent pour une occasion particulière et certains qui en profitent  pour s’offrir un gastro à moindre coût. Beaucoup n’étaient jamais venus au restaurant. On espère que cela leur donnera envie d’y venir quand on réouvrira… « . Au passage, les Tourteaux donnent de vive voix les conseils de cuisson  et de présentation qui figurent sur le mode d’emploi personnalisé,  imprimé et mis sous enveloppe dans le sac de livraison :  « Plus encore que le pourcentage de chiffre d’affaires que cela représente, c’est de garder le lien avec la clientèle qui importe, constate Gaël.  Et ça fait du bien au moral dans ces temps difficiles » .

C’est pas tout ça,  mais il va falloir passer à table !  On déballe le menu avec précaution et on étale tout sur le plan de travail. Mine de rien, pour deux personnes,  cela fait une quarantaine de petits bocaux plastiques, d’assiettes et de sachets. C’est déjà un régal des yeux. La truite du Cian,  en entrée,  se déguste froide, avec son suc de crustacés. Le rougail d’aubergine, qui l’accompagne, est une merveille. Il adoucit les saveurs du poisson et des crustacés. On passe ensuite au  mérou et crevette qui doit être réchauffé au four, 20 minutes pendant que la cassolette et le jus de pétoncle mijotent à la casserole. Cela suffit pour se prendre pour un chef étoilé devant sa plaque de cuisson.  Après ça , on dispose les Roveja et le jus de pétoncle sur le poisson avec le geste assuré d’un Bocuse et on sert sans traîner. Au dessert,  la prune semi confite glisse sans souciVerdict : on s’est régalé ! La cuisine des Tourteaux est toujours aussi inventive et puissante en goût. Et plus copieuse qu’il n’y paraît : on aurait presque pu manger à deux sur un seul menu.  Même si rien ne remplace le service en salle, la formule offre effectivement une expérience culinaire digne d’un restaurant gastronomique. Pendant la fermeture sanitaire,  faites-vous une f(l)aveur : mettez des étoiles dans votre vie ! 

By |janvier 30th, 2020|Categories: Restos/Bars|0 Comments

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