Par KIM Tuong
« Cafés Indien » : cela semble presque une bizarrerie, deux boutiques à la même enseigne, à quelques mètres l’une de l’autre, quand on sait que les torréfacteurs indépendants ont peu à peu disparu face à la concurrence de la grande distribution et des grandes enseignes. Mais la famille Torre a su conserver l’amour et le savoir-faire de la torréfaction pour survivre aux changements de consommation et fidéliser sa clientèle, composée à 70% d’habitués. « Crée en 1925 rue Sainte Réparate, Torréfaction de la Méditerranée et du Sud-Est café l’Indien, a changé deux fois de main avant que mon grand-père rachète le commerce en 1975. Mes parents ont repris l’affaire en 1990 et moi-même en 2010. » Dans les années 70 ouvre une deuxième boutique, rue Pairolière, à quelques mètres de la première : « Il n’y avait pas de stratégie à l’époque. On essayait juste d’acheter une deuxième affaire quand on pouvait », explique Jean-François, entre deux salutations de clients habitués. Mais « on est loin de l’époque où chaque quartier avait son torréfacteur ». Même si c’est avant tout une affaire de transmission familiale, Jean-François continue à se former à sa passion. Il est membre de la SCAE (Speciality Coffee Association of Europe) et diplômé barista, l’art de servir le café. « Chaque consommation est faite avec soin. Chaque tasse raconte une histoire », aime t-il rappeler. Avant de reprendre l’affaire, Jean-François voyage beaucoup en Afrique et se destine plutôt à travailler en Tanzanie, dans l’import-export de café vert. Pour les Cafés Indien, il achète du café du monde entier, notamment de zone équatoriale. Dans les deux boutiques, se côtoient plus d’une vingtaine de saveurs aux provenances exotiques : Brésil, Ethiopie, Colombie et Papouasie… « Je sélectionne des cafés qualitatifs. La provenance n’est pas le seul gage de qualité. Il ne faut pas oublier qu’il s’agit d’un produit frais dont les valeurs aromatiques disparaissent avec le temps. Alors que quand les industriels se fournissent sur le marché du café, de cafés de 2010-2011, j’achète du café de 2014. Cela explique la différence de prix de négociation. » En revanche, le consommateur final n’y verra que peu de différence de prix. « J’ai une philosophie de café abordable, accessible à tous. Toutes les semaines, le café change pour garder une stabilité des prix malgré les fluctuations du cours du marché du café. En effet, le café étant côté en bourse, mon travail consiste à acheter au meilleur moment en fonction des fluctuations. Et ça permet aux clients réguliers de se faire le palais. » Dans l’échoppe, l’expresso coûte 1,3 euro et 2,5 euros s’il est accompagné d’un macaron. De plus, « les industriels utilisent la torréfaction flash qui dure environ 2 minutes contre 20 à 25 minutes pour la torréfaction traditionnelle, à cuisson douce ». C’est rue Saint-Réparate qu’est torréfié le café. Jean-François aime aussi tester un échantillon de café sur la petite machine artisanale que lui a légué son grand-père en 1976. « Les clients recherchent de plus en plus un café de qualité. Il m’arrive de former d’autres cafetiers du Vieux-Nice au métier de barista et aussi d’aider dans l’entretien des machines. » Les cafés Indien ont su s’adapter à l’air du temps en proposant des produits organiques ou encore des capsules compatibles aux machines Nespresso...
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