Cannes 2025: Part 1
Par Ph.D
Il nous avait semblé, en découvrant le programme de Cannes 2025, qu’Hollywood se ferait plus discret cette année sur la Croisette. Ça ne s’est pas du tout vérifié à l’ouverture, où se pressait le gratin du cinéma américain. Même Tom Cruise est arrivé avec un jour d’avance ! Quentin Tarantino a déclaré la 78e édition ouverte en hurlant de tous ses poumons et Leonardo DiCaprio a rendu un bel hommage à Robert de Niro qui recevait une Palme d’Honneur, oh combien méritée. La cérémonie d’ouverture, animée avec classe par Laurent Laffite, a été l’occasion pour Juliette Binoche et Robert de Niro de tenir des discours engagés sur l’état du monde et de la démocratie, avant que Mylene Farmer n’entonne une chanson hommage à David Lynch, qu’elle a semble-t-il bien connu. Et c’est en chansons que s’est poursuivie la soirée avec la projection de Partir un jour, la mignonne romance musicale d’Amélie Bonnin présentée hors compétition (lire la critique ici)
Partir un jour
Par Ph.D
Le pitch
Alors que Cécile (Juliette Armanet) s’apprête à réaliser son rêve, ouvrir son propre restaurant gastronomique, elle doit rentrer dans le village de son enfance à la suite de l’infarctus de son père (François Rollin). Loin de l’agitation parisienne, elle recroise son amour de jeunesse (Bastien Bouillon). Ses souvenirs ressurgissent et ses certitudes vacillent…
Ce qu’on en pense
Présenté en ouverture du 78e Festival de Cannes (honneur inédit pour un premier film), Partir un jour est la version longue du court métrage éponyme et Césarisé d’Amélie Bonnin (à voir ici). Les premiers rôles (très bien) tenus par Juliette Armanet et Bastien Bouillon ont été inversés : c’est elle qui revient dans le village de son adolescence auréolée de gloire (elle a gagné Top Chef et s’apprête à ouvrir son propre restaurant gastronomique) et lui qui y est resté (il est garagiste et fait du moto cross). Elle est enceinte, mais a décidé d’avorter. Lui est marié et père d’un garçon d’une dizaine d’années. Ils se sont aimés, se sont loupés et se retrouvent avec beaucoup de nostalgie et de tendresse. Sauf qu’ils ne sont pas libres… Voilà pour la partie romance. Le côté familial est exploré avec Cécile et ses parents : mère aimante (Dominique Blanc formidable), père bougon et râleur (François Rollin très bien aussi)… Le retour de l’enfant prodigue, transfuge de classe , est célébré sur le mode de l’amour vache. Originalité de mise en scène : des passages chantés et/ou chorégraphies interviennent comme des virgules en fin de scènes avec une BO de tubes 80’s bien craignos (un vrai karaoké de Stars 80 !) qui disent combien la variété a envahi nos vies. Le court métrage était parfait : sensible, intelligent, bien dialogué, bien joué et joliment mis en scène. Dans le long, on voit les défauts et les coutures : image moche pour faire « auteur », chorégraphies mal filmées, scénario sans réel enjeu dramatique, direction d’acteurs fluctuante, introduction aléatoire des chansons (avec un son décalé du jeu des acteurs qui sont pourtant censés les chanter en live). Cela donne une petite romance musicale amusante mais dispensable, qu’on regarde d’un oeil amusé sans trop y croire, ni être spécialement touché.
Destination Finale 6
Par J.V
Le pitch
Hantée par un cauchemar terrifiant qui revient sans cesse, Stefanie (Kaitlyn Santa Juana), étudiante à l’université, rentre chez elle pour retrouver la trace de la seule personne susceptible d’enrayer ce cycle infernal et de sauver ses proches du sort funeste qui les attend…
Ce qu’on en pense
Lancée en 2000, la saga Destination Finale a connu des hauts (le 2e film ) et pas mal de bas, avant de s’interrompre sans explication en 2011. Quatorze ans plus tard, on retrouve le concept avec curiosité. Ca commence plutôt très bien, avec une longue séquence d’introduction articulée autour de l’inauguration d’une tour au plancher de verre, dont on se doute bien qu’il va finir par lâcher… La suite est, hélas, plus convenue et accumule sans originalité les exécutions sanglantes, sans tenter d’introduire la moindre réflexion sur leur origine. C’était bien la peine d’attendre aussi longtemps pour remettre le couvert !
Marco, l’énigme d’une vie
Par J.V
Le pitch
Enric Marco (Eduard Fernandez) est le président de l’association des victimes espagnoles de l’Holocauste. À l’approche d’une commémoration, un historien conteste son passé d’ancien déporté. Marco se bat alors pour maintenir sa version alors que les preuves contre lui s’accumulent…
Ce qu’on en pense
Notre avis
Sur un concept proche de celui d’Une amie dévouée, dans lequel Laure Calamy incarnait la mythomane du Bataclan, ce film espagnol dresse le portrait d’ un homme qui s’est inventé un passé de déporté. Plutôt que d’explorer la folie liée à ce mensonge, les réalisateurs préfèrent le mettre en balance avec son engagement associatif. Un choix qui peine à trouver sa justification, obligeant l’acteur principal, Eduard Fernandez, a en faire des tonnes pour soutenir l’attention. L’énigme de Marco reste entière.
Le Domaine
Par J.V
Le pitch
Damien (Félix Lefebvre), étudiant à la dérive, accepte un emploi dans un relais de chasse tenu par deux malfrats locaux. Ces derniers utilisent leur domaine pour couvrir des activités illégales où jeux d’argent et prostitution se mêlent. Suite à la disparition d’une escort, Damien s’engouffre dans une spirale de règlements de comptes.
Ce qu’on en pense
Après La Troisième Guerre sur le mission Sentinelle, Giovanni Aloi s’essaie au polar chabrolien avec ce Domaine, dans lequel Félix Lefebvre ( Été 85 ) trouve un bon rôle d’innocent au grand coeur, confronté au grand banditisme. La voix off lourdement explicative et un rythme trop lent pour un thriller empêchent de s’immerger pleinement dans ce fait divers inspiré de faits réèls.
Milli Vanilli
Par J.V
Le pitch
Rob Pilatus (Tijan Njie) et Fab Morvan (Elan Ben Ali) ont conquis les hit-parades mondiaux sous le nom de « Milli Vanilli » à la fin des années 80. Leur célébrité a tourné au scandale lorsqu’on a découvert qu’ils faisaient semblant de chanter sur la voix d’autres artistes…
Ce qu’on en pense
On connaît l’histoire du duo Milli Vanilli, qui a vendu près de 30 millions de disques et donné des concerts dans le monde entier, avant que l’on découvre que les deux « chanteurs », le Français Fab Morvan et de l’Allemand Rob Pilatus, étaient seulement là pour leur plastique et se produisaient en playback sur la voix d’autres artistes. Le film adopte le point de vue des deux protagonistes, interprétés par Tijan Njie et Elan Ben Ali , pour dénoncer les travers d’une industrie qui, avant l’avènement d’internet, du téléchargement et du streaming, pouvait magouiller à son aise et encaisser les bénéfices, sans trop se soucier des dégâts occasionnés aux jeunes gens ainsi jetés en pature au public. Instructif.
Cannes 2025: ciné plage
Par la rédaction
«Gratuit et ouvert à tous, sans invitation ni accréditation, le cinéma de la plage est le lien idéal entre ce qui se passe dans le Palais, les Cannois et les visiteurs », a coutume de dire Thierry Frémaux. Et il a bien raison : le Cinéma de la plage c’est «the place to be», le soir à Cannes quand on n’est pas accrédité… et parfois même quand on l’est ! Au programme de cette édition :
Mardi 13 mai : Une Vie cachée de Terrence Malick
Mercredi 14 mai : À toute épreuve de John Woo
Jeudi 15 mai : Les Mauvais coups de François Leterrier
Vendredi 16 mai : Duel au soleil de King Vidor
Samedi 17 mai : La Légende de la place d’or continue d’Alexis Veller/ Boulevard du crépuscule de Billy Wilder
Dimanche 18 mai : Palombella Rossa de Nanni Moretti
Lundi 19 mai : Bardot d’Alain Berliner
Mardi 20 mai : Angel’s Eggs de Mamoru Oshii
Mercredi 21 mai : Darling de John Schlesinger
Jeudi 22 mai : Ange de Tony Gatlif
Vendredi 23 mai : Film surprise
Samedi 24 mai : Mélodie en sous sol d’Henri Verneuil
G20
Le pitch
Lorsque le sommet du G20 est pris d’assaut, la présidente des États-Unis Danielle Sutton (Viola Davis) devient la cible numéro un. Après avoir échappé à la capture du groupe d’assaillants, elle devra se montrer plus rusée que l’ennemi si elle veut sauver sa famille, défendre son pays et protéger les chefs d’État du monde entier…
Ce qu’on en pense
Viola Davis est l’héroïne de cette série B d’action Prime Video qui, dans un autre temps, aurait pu voir Bruce Willis triompher de méchants terroristes ayant pris le G20 en otage, dans un énième Die Hard. Tous les ingrédients sont réunis pour une version féminisée avec un méchant bien caricatural (Antony Starr) et une héroïne en talons hauts décidément increvable. La réalisation punchy (Patricia Rigen), la qualité de l’interprétation et de bons dialogues rendent la chose tout à fait regardable si on n’a rien d’autre à voir ou à faire.
Rumours
Par Ph.D
Le Pitch
Réunis dans un château en Allemagne pour leur sommet annuel, les dirigeants des pays du G7 s’installent en bordure d’une forêt pour préparer leur déclaration. À la nuit tombée, le groupe constate que le personnel qui les entourait a disparu. En voulant tenter de le retrouver, les sept politiciens s’enfoncent plus avant dans une forêt qui s’avère pleine de périls et de mystères.
Ce qu’on en pense
Satire politique canadienne signée Guy Maddin, Evan Johnson et Galen Johnson, Rumours, nuit blanche au sommet vaut surtout pour son casting quatre étoiles (Cate Blanchett, Alicia Vikander, Denis Ménochet…). On s’amuse, au début, à reconnaître les dirigeants politiques dont les personnages sont inspirés et à les voir empêtrés dans des situations burlesques. Hélas, le scénario se délite rapidement pour finir dans un grand n’importe quoi survivaliste qui génère plus d’ennui que d’amusement.
Un Monde merveilleux
Par J.V
Le pitch
Dans un futur proche où les humains dépendent des robots, Max (Blanche Gardin), une ancienne prof réfractaire à la technologie, vivote avec sa fille Léa (Laly Mercier) grâce à des petites combines. Elle a un plan : kidnapper un robot dernier cri pour le revendre en pièces détachées. Mais tout dérape. Flanquée de ce robot qui l’exaspère, elle s’embarque dans une course-poursuite pour retrouver sa fille et prouver qu’il reste un peu d’humanité dans ce monde …
Ce qu’on en pense
Blanche Gardin retrouve dans cette comédie futuriste de Giulio Callegari un rôle proche de celui qu’elle tenait déjà dans Effacer l’historique de Kervern et Delépine. Le film est dans la veine grolandaise, mais manque trop de personnalité (et peut-être de moyens) pour convaincre. Dommage.
Les Musiciens
Par J.V
Le pitch
Astrid Thompson (Valérie Donzelli) parvient enfin à réaliser le rêve de son père : réunir quatre Stradivarius pour un concert unique attendu par les mélomanes du monde entier. Mais Lise (Marie Vialle), George (Mathieu Spinosi), Peter (Daniel Garlitsky) et Apolline (Emma Ravier), les quatre virtuoses recrutés pour l’occasion, sont incapables de jouer ensemble. Les crises d’ego se succèdent au rythme des répétitions. Sans solution, Astrid se résout à aller chercher le seul qui, à ses yeux, peut encore sauver l’événement : Charlie Beaumont (Frédéric Pierrot), le compositeur de la partition.
Ce qu’on en pense
Le monde de la musique classique inspire les réalisateurs français comme Grégory Magne qui signe avec Les Musiciens une comédie chorale joliment immersive. Valérie Donzelli et Frédéric Pierrot, jouent la partition à merveille entourés de véritables musiciens virtuoses. C’est, hélas, l’exécution qui fait défaut : la réalisation manque de substance et les bons moments musicaux sont trop rares our soutenir l’attention.
Coka Chicas
Par J.V
Le pitch
Sarah (Zoé Marchal), Jessica (Amel Charif) et Chanel (Cindy Braga), trois amies inséparables issues de la banlieue parisienne, sont venues faire les mules dans une île des Caraïbes pour ramener de la drogue en France et enfin ouvrir leur business de Nails Bar. Mais le voyage est bouleversé lorsque, après s’être fait arrêter à l’aéroport, Jessica disparaît totalement des radars. Incapables d’abandonner leur amie, Sarah et Chanel se lancent à sa recherche dans les bas-fonds de l’île, sans savoir que ce qu’elles vont découvrir dépasse de loin tout ce qu’elles auraient pu imaginer.
Ce qu’on en pense
Une série B d’action dont les rôles principaux sont tous tenus par des femmes (dont la fille d’Olivier Marchal, Zoé, qui dégage une réelle présence). C’est, hélas, à peu près la seule originalité et le seul intérêt du film de Roxane Helberg, qui déroule un programme de poursuites et de bastons sur fond de tropiques et de trafic de drogue, qui sent le déjà (beaucoup) vu.
Les Enfants rouges
Par J.V
Le pitch
Alors qu’ils font paître leur troupeau dans la montagne, deux adolescents sont attaqués. Nizar (Yassine Samouni), 16 ans, est abattu sous les yeux de son ami Achraf (Ali Helali), 14 ans, qui est chargé de rapporter un message à sa famille…
Ce qu’on en pense
Un film tunisien âpre et déroutant, qui passe du naturalisme à l’onirisme et de la tragédie au voyage initiatique, où se confondent réalité et cauchemar. Le réalisateur tunisien Lotfi Achour y dépeint une jeunesse meurtrie, forcée de vivre dans un environnement violent et liberticide. Une ode à la résilience.
Les Arènes
Par J.V
Le pitch
À tout juste 18 ans, Brahim (Iliès Kadri), jeune footballeur prometteur, est représenté par son agent et cousin Mehdi (Sofian Khammes). Il s’apprête à réaliser son rêve : signer son premier contrat professionnel à Lyon. Mais l’arrivée d’un puissant agent étranger (Edgar Ramírez) rebat les cartes. Dans cet univers où tous les coups sont permis, même la loyauté a un prix.
Ce qu’on en pense
Après Mercato, Les Arènes entraine à son tour le spectateur dans les coulisses du football. La réalisatrice Camille Perton adopte une approche sobre et réaliste pour filmer l’antichambre du monde professionnel. Le scénario évite poncifs du genre pour se concentrer sur les relations entre les personnages principaux joués par Iliès Kadri, parfait en jeune joueur prometteur, Sofian Khammes révélé dans Chouf de Karim Dridi et Edgar Ramírez ( Carlos) dont la présence éclate une fois de plus dans un personnage puissant et trouble.
Cannes 2025: Le programme
Par Ph.D
Retour des frères Dardenne (Jeunes mères en compétition) , un film du chanteur Bono (Story of Surrender en séance spéciale) , un autre de Scarlett Johansson (Eleanor the Great au Certain Regard), le nouveau Wes Anderson (The Phoenician Sheme en compétition), une grosse présence française, une palme d’honneur pour Robert de Niro, Juliette Binoche présidente, Laurent Laffitte en maitre de cérémonie … Le casting de Cannes 2025 (13-24 mai) a été dévoilé le 10 avril par Thierry Frémaux, délégué général du Festival. Une sélection qui fait une large place au cinéma français ( Cédric Klapish sera même là pour la première fois! ) et aux femmes avec, en ouverture, le premier film d’une inconnue (une première historique !) : Amélie Bonnin présentera Partir un jour, un film musical avec Juliette Armanet et Bastien Bouillon. Très présent l’an dernier, Hollywood sera plus discret cette année. Du moins sur le papier, car Wes Anderson va encore débarquer sur le tapis rouge avec un casting monstrueux (mené par Benicio Del Toro), Tom Cruise viendra présenter le dernier volet de Mission Impossible, Scarlett Johansson son premier film de réalisatrice, Spike Lee son dernier opus et Richard Linklater le film le plus attendu de la compétition (Nouvelle Vague sur le tournage d’A Bout de Souffle). Last but not least, Robert de Niro recevra une Palme d’or d’honneur largement méritée, un demi siècle après avoir bouleversé la Croisette en Taxi Driver.