Par MAB
« Il n’y a jamais de happy-end pour quelqu’un qui a été abusé dans son enfance » affirme Neige Sinno. « Bien sûr » ajoute t-elle « dès qu’on peut parler du traumatisme c’est que l’on est déjà un peu sauvé … car tant qu’on est en enfer on n’écrit pas. On est juste occupé à être dans l’enfer ». C’est donc, bien tard, à 44 ans, emportée par la déferlante #Metoo et les textes des pionnières (elle en cite quelques-unes ) qu’elle se met à écrire à son tour. Non seulement pour relater sans ménager le lecteur, ce qu’elle a vécu de 7 à 14 ans. Mais aussi pour plonger dans la tête de son bourreau de beau-père et tenter d’expliquer son acte. Son témoignage est terrible. D’une puissance rarement lue. A la fois confession intime nourrie de références littéraires, conversation avec le lecteur qu’elle interroge régulièrement sur ce qu’il pense, analyse de tous les points de vue y compris celui de sa mère et des jurés. Et, au final, enquête sur un acte isolé qui touche à l’universel. Lisez-le. Il est bien plus dense et intelligent que ce que l’on peut en ecrire ici. Une claque dont vous entendrez parler au moment des prix littéraires! Tout commence comme un sombre « Petit chaperon rouge ». Dans les années 90, une famille recomposée vit en marge au cœur des Alpes. La fille aînée s’appelle Neige. Un prénom de blancheur et d’innocence que l’état civil aura du mal à accepter. Or cette fillette sera régulièrement violée par un « triste tigre ». Le récit est froid. Clinique. Sans Pathos. D’une sincérité glaçante. Il dit tout dans les moindres détails fussent- ils les plus « sordides, désolée » : Le contexte familial déstructuré, les lieux isolés, la vie de bohème,la façon de faire… Puis, en 2000, la plainte déposée par la mère et la fille condamnant l’homme à neuf ans de réclusion. Mais Neige ne s’arrête pas là. Elle dit aussi comment son instinct, sa cérébralité et la littérature l’ont plus ou moins sauvée. Précisant tout de même qu’ aucun oubli, ni pardon n’est possible. « Parce que ce n’est pas fini. Tant qu’un enfant sur terre vivra cela, ce ne sera jamais fini, pour aucun d’entre nous »
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