Par MAB
À l époque, bien que reguliérement controvérsé, Yann Moix n’était pas mélé à l’affaire Depardieu. Comme tous les écrivains qui se reconnaissent comme tels, il tenait un journal. Méthodique et acharné, il s’y est attelé de juin 2017 à juin de l’année suivante. Ce n’est donc qu’ensuite – en septembre 2018 -qu’il accompagna et filma l’ogre déchu en Corée-du-Nord, avec les suites que chacun sait, visionne et commente. Moix dit aujourd’hui qu’il ne voulait pas de la diffusion de ces images. Soit… De toutes façons, là n’est pas le sujet. Il est question ici de son énorme ouvrage de 1200 pages paru récemment chez Bouquins. Face à l’actualité, on l’a retiré d’une pile non lue. On l’a feuilleté. On s’est laissé prendre par une journée, puis une autre puis une autre encore. Toutes commençant par des choix musicaux très pointus et toutes riches de rencontres, d’observations, de portraits d’écrivains morts ou vivants et de personnalités politiques ou médiatiques. On a alors redécouvert la curiosité polymorphe, la vaste culture, la rage de vivre et de se définir, les paradoxes et contradictions de l’auteur de « Naissance » « Orléans » « Reims » ou « Verdun ». On entend d’ici ceux qui, légitimement rejettent, ce « Hors de moi » . Pour eux, Moix est un provocateur narcissique. Un hypocondriaque masochiste qui adore haïr et écrire qu’il est haï . Un mégalomane, adepte de l’entre soi snobant les médiocres. Pourtant cette plume talentueuse qui part dans tous les sens est parfois (pas toujours ) tellement lucide, tellement loin de là bienpensance ambiante que de nombreuses lignes sont criantes de vérité sans filtre et de sensibilité brute. Quel que soit l’homme Yann parfois grotesque, l’écrivain Moix a du talent et du courage pour assumer ce qu’il est et écrire ce qu’il pense. Même s’il est bien conscient que tenir son journal c’est être, immodestement, son propre biographe du matin au soir…
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