Interview: Charlotte Gainsbourg

//Interview: Charlotte Gainsbourg

Interview: Charlotte Gainsbourg

 

C’est une Charlotte Gainsbourg transfigurée que l’on découvre dans La Promesse de l’aube, d’Eric Barbier.Elle y joue Mina Kacew, la mère de Romain Gary, de ses 30 ans à sa mort. Un premier rôle de vieille dame qui a nécessité un grimage conséquent, mais qui a beaucoup amusé la fille de Serge Gainsbourg et Jane Birkin. Amusé et ému, car l’actrice a retrouvé en cette mère «extra-ordinaire» beaucoup de traits communs avec sa grand-mère paternelle, émigrée Russe. Sans maquillage, ni postiches, les cheveux noirs et coupés court, la voix bien assurée et le sourire aux lèvres, c’est une Charlotte visiblement bien dans ses baskets qui a répondu à nos questions sur le film et sur son magnifique nouvel album Rest, dans lequel elle chante pour la première fois en français. Des textes qu’elle a écrit elle même et qui parlent de son père, de sa sœur décédée et d’elle même, comme elle ne l’avait jamais fait…

Vous vous imaginiez jouer un jour le rôle de la mère de Romain Gary?
Ah, ça non! (rires).D’autant qu’étrangement je n’ai pas lu le livre pendant ma scolarité alors que mes enfants oui. Comme Yvan (Attal son mari N.D.L.R) avait reçu l’intégrale Gary pour son anniversaire je m’apprêtais justement à le faire quand Eric Barbier m’a proposé le rôle. Du coup, j’ai découvert l’histoire avec le scénario.

Le contexte résonnait sans doute avec votre propre histoire familiale…
Absolument. Mes grands parents ont émigré de Russie à peu près à la même époque et Mina m’a immédiatement évoqué ma grand mère, son accent à couper au couteau et sa dévotion pour son fils, mon père. Le cliché de la mère juive, archi-possessive, je connais bien.Je pouvais m’appuyer dessus pour composer le rôle

Avez-vous également reconnu quelque chose de vous en elle?
J’espère ne pas être aussi monstrueuse avec mes enfants (rires).Mais évidemment que le côté excessif de cet amour absolu me parle. Comme il parle à toutes les mères j’imagine. J’ai beaucoup de mal à la juger. Eric me poussait à la rendre monstrueuse mais pour moi elle est aimable et charmante. J’aime ses excès.  C’était une époque difficile, elle n’avait pas beaucoup de choix. C’est une femme qui lutte et qui fait des choix de survie.

Cet amour de la culture française qu’elle manifeste, ça vous parle aussi ? 
Oui c’était très fort aussi dans ma famille.  Mon père m’a transmis ça. J’essaie de le faire avec mes enfants aussi mêle si ce n’est pas pareil aujourd’hui

Pas évident en vivant à New York…
Je suis parti après la mort de ma soeur, j’en avais besoin. Je ne  sais pas combien de temps j’y resterai. Je m’y sens bien, mais c’est pas ma ville, ni mon pays. Je ne me sens pas chez moi. Je ne vis d’ailleurs pas différemment d’ici. Je me sens juste plus concentrée sur mon travail.

Vous avez été une enfant star. Vous êtes vous sentie poussée par votre famille comme Gary  l’a été par sa mère? 
Quand je voyais le petit garçon qui joue Gary enfant, je me revoyais à son âge sur les plateaux où j’accompagnais ma mère et mon père, puis un peu plus tard pour mes propres films. Je me souvenais du plaisir extrême que je ressentais alors de faire partie d’une équipe et de la tristesse au moment de la quitter quand c’était fini. La différence avec Gary, c’est qu’on ne m’a rien imposé. Mes parents ne vivaient pas le succès par procuration, puisqu’ils étaient déjà célèbres tous les deux. J’ai eu envie d’être comme eux en les voyant faire, mais j’ai toujours été décisionnaire. Ils ne m’ont jamais poussée.

Et vous,  comment faites vous avec vos enfants ?  
J’ai fait pareil que mes parents. Je les ai emmenés partout avec moi. Ils  ont pu voir le bonheur que c’est et combien c’est intense aussi. J’ai aimé les faire tourner dans mon dernier clip.  Je ne sais pas ce que je leur ai transmis. Un peu plus de souffrance que mes parents avec moi, je suppose ? Je ne leur montre pas les films de Lars (Von Trier NDLR),  mais celui -là oui. Mon fils Ben a pleuré en le voyant. J’étais touchée.

Quel effet ça fait de se voir dans le corps d’une vieille femme?
Malgré les 3 heures de maquillage et la prothèse de corps, je crois que je n’ai jamais éprouvé autant de plaisir à jouer un personnage. D’habitude, j’ai l’impression de jouer une version de moi, plus ou moins proche. Là, j’ai joué le déguisement, l’accent polonais, la voix forte, le faux corps, le vieillissement… Ca m’a beaucoup amusée. Sauf, que je ressemble plus à mon père qu’à ma mère! En vieillissant, je prends ses traits. Heureusement, quand j’enlevais le masque, je rajeunissais d’un coup de 30 ans et ça, c’est magique!

Comment avez vous travaillé votre voix ? Elle est  beaucoup plus puissante qu’on ne croyait…
Le polonais a aidé. On a commencé le tournage par la scène où je gueule en polonais dans la cour. C’était celle que je redoutais le plus ! A partir de là il n’y avait  plus de filtre. Pas de timidité,  ni de douceur à avoir. Le volume et le débit m’ont paru naturels. C’est la magie du cinéma…

Vous avez réouvert la maison de votre père pour le clip de « Lying With You ». Où en êtes vous de vos projets de musée Gainsbourg ? 
Ça m’a redonné envie d’y travailler alors que j’avais abandonné l’idée depuis des années.  Mais je n’ai toujours pas trouvé la bonne solution. C’est compliqué. Je cherche…

La prochaine fois qu’on vous voit, c’est sur scène pour défendre le nouvel album ? 
Oui, on va commencer par quelques concerts en février-mars puis sans doute les festivals d’été. Je vais sortir un livre de dessins et de photos sur le makin of de l’album  et on va sans doute organiser quelques expos-concerts pour le présenter dans les grandes capitales. Il me tarde car je suis très fière de ce disque.

By |avril 25th, 2018|Categories: ça vient de sortir|0 Comments

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