Interview : Naomi Kawase

//Interview : Naomi Kawase

Interview : Naomi Kawase

Habituée du Festival de Cannes, où on l’a découverte en 1997, avec Suzaku son premier long métrage qui lui a valu la Caméra d’or , Naomi Kawase y a présenté depuis tous ses films. Sauf le dernier, Voyage à Yoshino, dont elle a, en quelque sorte, réservé la primeur au public de la Cinémathèque de Nice, où elle était invitée à donner  une «Leçon de cinéma»,  avant de faire de même à Beaubourg (voir vidéo). Un événement qui avait attiré la foule des grands soirs. C’est à guichets fermés que l’on a pu découvrir cette fable écologique dans laquelle Geneviève Binoche joue une française à la recherche d’une plante médicinale aux vertus quasi magiques… La réalisatrice japonaise a accepté de nous parler du film qui vient de sortir en dvd

La forêt de Yoshino, que vous filmez magnifiquement, existe-t-elle vraiment ? 
Oui bien sûr et depuis mille ans.C’est un lieu sacré qui fait partie de la culture japonaise.

Votre cinéma a toujours été tourné vers la nature. Mais cette fois, on sent une urgence particulière…
Pour nous Japonais, les préoccupations écologiques se doublent d’un aspect religieux.La mort de la nature, c’est aussi la mort des divinités qui l’habitent. Cela génère beaucoup d’angoisse.C’est de cela que je voulais parler dans ce film, à travers le regard d’une étrangère dont les préoccupations rejoignent celles des habitants de la forêt…

Comment concevez-vous vos films ? 
Tout est important : l’image, l’histoire, le texte. Dans ce dernier film en particulier le langage était paradoxalement important,  avec un personnage qui ne parle pas japonais et  qui n’est pas toujours comprise. Cela m’intéressait de voir comment on peut dépasser la non communication linguistique dans les contacts humains. Mais tout part de ma frustration devant le désastre écologique qui se profile avec le changement climatique. La seule chose que je puisse faire c’est des films qui alertent sur les atteintes à la nature. Cette question était centrale pour le Voyage à Yoshino.

Le ton du film est plus fantastique ou mystique que dans les précédents, pourquoi ? 
Pour les japonais, la nature et les dieux sont intimement liés. Porter atteinte à la nature, c’est risquer de tuer le divin. Cela génère une angoisse supplémentaire que j’ai cherché à illustrer de cette manière.

Comment faites vous pour filmer la nature de cette manière? 

Le secret c’est de ne pas chercher le contrôle absolu des choses. Il faut se faire accepter par l’environnement,  se laisser aller et attendre, avec une grande patience,  le moment idéal pour filmer.

C’est la première fois que vous travaillez avec un actrice occidentale. Pourquoi Juliette Binoche?
Je l’ai rencontrée l’année dernière à Cannes et nous nous sommes entendues immédiatement. Nous autres Japonais croyons en la valeur des rencontres fortuites. Juliette connaissait mes films et avait envie de travailler au Japon.J’ai saisi l’occasion qui se présentait et trois mois après nous démarrions le tournage.

Comment se fait-il que vous soyez aussi francophile? 
J’ai découvert le cinéma français avec la Nouvelle Vague, Godard et Truffaut, à l’école et cela m’a marquée. Ensuite, il y a eu Cannes, à qui je dois ma notoriété et ma carrière internationale. La France, c’est un peu ma deuxième famille. Je travaille avec beaucoup de français sur mes films: pour la production, le montage, le son…

Bientôt un film en France, alors ? 
Qui sait de quoi l’avenir sera fait ? Mon ami Hirokazu Kore-eda, qui a eu la Palme d’or l’an dernier à Cannes avec Une Affaire de famille, a tourné son nouveau film en France . Je vais attendre de voir ce qu’il en dit ! (rires)

By |juin 20th, 2019|Categories: ça vient de sortir|0 Comments

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