Par MAB
« Pour faire ce que tu fais, il te faut marcher… Écrire commence dans le corps… Tu t’assieds à ton bureau pour noter les mots, mais dans ta tête tu es encore en train de marcher » Désormais, celui qui se parlait souvent à lui-même, ne marchera plus. Pire, il n’écrira plus. Lui dont « La trilogie New-Yorkaise » est imprimée dans l’identité de toute une génération. Lui que certains auraient bien vu prix Nobel: Paul Auster, le plus francophile des écrivains américains s’est éteint mardi 30 avril à Brooklyn. Après deux dernières années ponctuées de drames (décès de sa petite fille, puis de son fils Daniel), un cancer l’a emporté à 77 ans. « Sans moi l’avenir se débrouillera très bien » fait-il dire à Baumgartner, son double dans le dernier ouvrage traduit chez Actes Sud. L’avenir se débrouillera d’autant plus qu’Auster laisse une œuvre considérable: plus de trente romans, des scénarios, deux films. Et, en guise d’achèvement ce « Baumgartner ». Paru en 2023, ce roman n’est peut être pas son meilleur. Mais Auster, malade, savait que ce serait « le dernier ». Cela donne à cette bio-fiction, le ton crépusculaire d’un bilan de vie. D’autant que cet écrivain de la mémoire s’y montre plus que jamais hanté par la solitude, la douleur et le deuil. Lire ce long monologue d’un narrateur, cloitré dans sa maison de la banlieue de New-York et hanté par la disparition par noyade de la femme aimée, n’est donc pas toujours facile. L’écriture introspective et labyrinthique est celle d’une élégie qui tente de chasser les blessures de l’existence en convoquant les souvenirs heureux. Mais l’adieu plein de tendresse à la vie, la confiance en l’amour et en l’humanité en font, aujourd hui, un testament particulièrement émouvant. RIP.
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