C’est un pavé pour l’été. 707 pages, pas une de moins. Rien d’un roman solaire pour autant. Le récit est même crépusculaire. Parfois d’une grande violence, malgré son indéniable poésie et les petits dessins et planches qui accompagnent le texte. S’il est l’objet de notre recommandation, c’est parce que, dans la lignée de « Betty« , le précédent ouvrage de l’américaine Tiffany McDaniel, Du Côté Sauvage est lui aussi un choc littéraire. Il est parmi ceux qui nous restent en tête de cette année écoulée, avant l’avalanche de sorties des prochains mois. L’histoire est celle de rousses et inséparables jumelles. Nourries des récits de leur grand-mère, elles ont l’imagination si fertile qu’elles fuient leur quotidien sordide, leur mère droguée et prostituée et « l’araignée » qui vient pour leur mère avant de les rejoindre dans leur lit, en s’inventant un univers lumineux. Pourtant , elles ne peuvent échapper aux fantômes de leur passé familial. Devenue adulte, Arc, l’une des deux, lutte toujours avec ses souvenirs et ses addictions lorsque l’on découvre le corps d’une femme noyée dans la rivière. Un cadavre qui sera suivi de beaucoup d’autres. Alors que ses amies disparaissent autour d’elle, Arc doit bien admettre qu’elle ne peut, malgré la promesse faite, protéger sa sœur « du côté sauvage » de leur existence… Tiffany McDaniel, également poète et plasticienne, nourrit son écriture envoûtante des collines et forêts de l’Ohio qui l’ont vu naître. Elle y installe des personnages d’une grande force, toujours puisés dans la réalité. Alors que Betty était un hommage à sa mère. Du Côté Sauvage est, lui, inspiré d’un « true crime« : la disparition entre 2014 et 2015 de six femmes à Chilicothe, dont deux manquent toujours à l’appel. Des meurtres non élucidés. La mort de ces femmes, droguées et prostituées ayant laissé la communauté dans la plus totale indifférence. Pour autant, que ces lignes ne vous découragent pas de découvrir cette pépite. Roman social et conte cruel d’une grande noirceur certes, mais surtout d’une grande beauté.
Le récit à la première personne d’un fils au chevet d’un père qu’il veut connaître avant que ce dandy déchu ne quitte le monde. Or, le patriarche, devenu aveugle et impotent après une vie flamboyante, suggère, à son écrivain de rejeton, le sujet de son prochain roman : l’histoire de Louis de Montaigu, l’arrière grand-père, mort un soir d’août 14, à la tête de son escadron. Un acte de bravoure insensé, un désir sublime et ridicule d’en découdre, qui cachaient bien des secrets. En les découvrant peu à peu, à travers archives et roman familial, l’auteur réalisera enfin qui était son père, qui il est lui-même et combien « les fils sont là pour continuer les pères ». Les allers retours passé- présent et la vivacité des dialogues donnent à cette narcissique et élitiste introspection un étonnant intérêt. Prix Interallié 2024.
Bruxelles, 2012. Quand le commissaire à la santé est limogé du jour au lendemain, dans la plus grande opacité, le député européen José Bové (Bouli Lanners) et ses assistants parlementaires décident de mener l’enquête. Ils vont alors découvrir un véritable complot menaçant de déstabiliser les instances européennes, jusqu’à leur sommet…
Ce qu’on en pense
Après Une intime conviction (2019) Antoine Raimbault creuse la veine judiciaire et politique avec ce film-dossier sur une affaire qui n’a pas fait grand bruit en dehors du landernau bruxellois, mais qui méritait pourtant plus de publicité. D’autant qu’elle impliquait le médiatique José Bové et le lobby du tabac. Du coup, le film s’attache à faire comprendre les tenants et les aboutissants du dossier, avec un luxe de précision qui nuit un peu à la dramaturgie. Heureusement, le réalisateur a eu la bonne idée d’adjoindre au député moustachu, incarné avec conviction par Bouli Lanners, un assistant et une jeune stagiaire (Thomas VDB et Céleste Brunnquell) qui, en plus d’être attachants, permettent de varier les points de vue.
A l’époque de la Guerre de Sécession, la colonisation de l’Ouest américain est semée d’embûches. Qu’il s’agisse des éléments naturels, des interactions avec les peuples indigènes qui vivaient sur ces terres et de la détermination impitoyable de ceux qui cherchaient à les coloniser, tout se conjugue pour rendre l’avancée des colons périlleuse…
Ce qu’on en pense
Trente trois ans après le succès de Danse avec les loups, encore auréolé de celui de la série Yellostone, Kevin Costner partage sa passion pour le western avec cette ambitieuse saga de trois (ou quatre?) films sur la conquête de l’ouest. Devant et derrière la caméra, l’acteur-réalisateur est omniprésent, multipliant les fils narratifs dans un premier volet de trois heures qui n’a, hélas, pas convaincu lors de sa présentation à Cannes 2024. Reconstitution factice, image proprette, intrigue filandreuse, cette épopée manque de souffle et ressemble plus à une série pour plateforme de streaming qu’au grand oeuvre cinématographique espéré. Témoin de sa construction feuilletonnesque, le final de cette première partie laisse le spectateur en plan jusqu’au 11 septembre, date de sortie prévue du chapitre2. Avec le risque d’avoir tout oublié d’ici là.
Lou (Kristen Stewart), gérante solitaire d’une salle de sport, tombe éperdument amoureuse de Jackie (Katy O’Brian), une culturiste ambitieuse. Leur relation passionnée et explosive va les entraîner malgré elles dans une spirale de violence…
Ce qu’on en pense
Révélée avec le thriller fantastique Saint-Maud , Rose Glass brasse à nouveau les genres avec cette love story lesbienne à l’atmosphère pesante, qui brosse un portrait sans fard de l’Amérique profonde. Le film oscille avec grâce entre Oliver Stone et les frères Coen et offre à Kristen Stewart et Katy O’Brian une partition à la Thelma et Louise dont elles s’emparent avec conviction. En méchant de service, Ed Harris méconnaissable est à son meilleur. Ce Love Lies Bleeding surpasse largement le Drive-Away Dollsd’Ethan Coen, sorti récemment et auquel il fait immanquablement penser.
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