Johnny Marr à Cannes

//Johnny Marr à Cannes

Johnny Marr à Cannes

A 20 ans, il a écrit «This Charming Man», la chanson qui a fait décoller les Smiths. A 54, Johnny Marr est devenu cet «Homme charmant» que chantait Morrissey. A Cannes Lions 2018, où il était invité à parler de son dernier album (Call the Comet), on aurait pu l’écouter pendant des heures…

Qu’est ce qui a déclenché l’écriture de ce nouvel album?
J’ai écrit ma biographie en 2016, ce que je n’avais pas prévu de faire, et ça a ouvert les vannes. Quand tu commences à réfléchir sur ta vie, tout prend de l’importance soudain. Il y avait le Brexit, Donald Trump, le harcèlement sur les réseaux sociaux… J’étais en colère contre cette époque, mais je n’avais pas de solutions à proposer.Je me suis retrouvé comme quand j’avais 14 ans et que je commençais à écrire des chansons dans ma chambre.J’avais envie de fuir tout ça, exactement comme à l’époque j’avais cherché à m’évader de l’ennui de la vie de banlieue à Manchester.J’ai réalisé que mon talent de musicien et ma créativité m’avaient toujours servi à ça: créer un monde alternatif où je puisse me réfugier.C’est ce que j’ai fait avec ce disque.

Les chansons sont plus personnelles, plus intimes que sur les précédents. D’où ça vient?
J’ai toujours évité de parler de moi dans mes chansons, parce que je trouvais que les autres ne faisaient que ça. Avec les shows de télé réalité et les télés crochets, ça n’a fait qu’empirer.On dirait une compétition de sentiments: c’est à qui les exposera le plus. Je trouve qu’on manque cruellement d’abstraction et de mystère dans la pop.Pour cet album, je voulais vraiment aller dans cette direction… Mais les chansons refusaient de s’y plier! (rires) Elles demandaient des choses plus émotionnelles et personnelles, sinon ça sonnait faux. Des trucs comme «Hi Hello» ou «Walk Into The Sea», avant, j’aurais pensé que c’était trop personnel, trop intime.Mais là je me suis dit: «Fuck it! On s’en fout, du moment que la chanson est bonne». À un moment, on ferait n’importe quoi pour une bonne chanson! (rires)

C’est quoi «une bonne chanson»?
Quelque chose qui connecte. «Crazy in Love» de Beyoncé, ça tient juste sur le «ho ho ho/ho ho ho» du refrain et ça suffit pour en faire une grande chanson. Pas besoin de poésie profonde. Des fois, plus c’est stupide, meilleur c’est (rires). À côté de ça, tu as «Visions of Johanna» de Bob Dylan et c’est du Shakespeare… Le truc bien, avec la pop culture, c’est que tout ça cohabite à différents niveaux. Pas besoin de choisir son camp: on peut aimer les deux.

Quelles sont celles de vos chansons que vous préférez?
Celles qui m’ont donné le moins de mal à composer! (rires) «This Charming Man», par exemple, je peux me souvenir que j’étais au lit, il faisait beau, le soleil entrait par la fenêtre, le vent faisait bouger les rideaux… Je savais que je devais écrire parce qu’on avait un enregistrement de prévu, mais j’étais cool.Et tout est venu en 15 minutes, Un flash de pur bonheur! Parce que le plus souvent, quand même, tu galères, tu te relèves 50 fois pour faire du thé, et rien ne vient (rires). Picasso disait «L’inspiration existe, mais elle doit vous trouver en train de travailler». Je crois à ça: la muse ne visite pas les fainéants (rires).Ca me convient, parce que j’ai toujours eu une grande discipline de travail.En tournée, quand les autres sont partis s’éclater en ville, tu me trouves dans le tour bus à écrire ou à composer…

Ca a été compliqué de devenir le leader après avoir passé des années dans l’ombre d’un chanteur?
Pas facile, mais moins difficile que je ne pensais. Je suis dans des groupes depuis l’âge de 14-15 ans, c’est comme dans les mariages: tu espères que les mecs avec toi vont assurer en leur faisant croire que c’est toi qui fais tout le boulot! (rires). J’ai appris ça de Morrissey et Chrissie Hynde. J’applique la recette avec mon groupe.

Pourquoi avoir attendu si longtemps?
Quand j’ai quitté les Smiths, j’étais très demandé. Il suffisait que je me pointe quelque part pour qu’on veuille que je fasse les guitares.C’aurait été très impoli de dire non à des mecs comme Beck ou les Pet Shop Boys et de les planter là…C’est comme ça que je me suis retrouvé à bosser tout le temps pour les autres, au lieu de commencer un album solo. En fait, j’ai eu trop de chance! (rires)

Comment vous êtes vous retrouvé à travailler avec Hans Zimmer?
L’histoire est amusante.Je vais voir Kick Ass avec ma femme au cinéma et, avant le film, ils passent la bande-annonce d’Inception.Je me dis que ça a l’air bien cool…En rentrant à la maison, le téléphone sonne, c’est Hans Zimmer! Il me dit qu’il voudrait que je joue sur la B.O d’un film.Je lui réponds «Ok, c’est quoi? -Inception!» Je lui dis: «Va falloir se dépêcher alors, je viens de voir la bande-annonce au ciné!» (rires).Bref, le mardi suivant j’étais à L.A pour bosser là-dessus et c’était une des meilleures expériences de ma vie de musicien…

By |juin 20th, 2018|Categories: Événement|0 Comments

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