Une Nuit
Par J.V
Le Pitch
Paris, métro bondé, un soir comme les autres. Une femme (Karin Viard) bouscule un homme (Alex Lutz), ils se disputent. Très vite le courant électrique se transforme… en désir brûlant. Les deux inconnus sortent de la rame et font l’amour dans la cabine d’un photomaton. La nuit, désormais, leur appartient. Dans ce Paris aux rues désertées, aux heures étirées, faudra-t-il se dire au revoir ?
Ce qu’on en pense
César du meilleur acteur en 2019 pour sa performance dans Guy, vrai-faux biopic d’un chanteur vieillissant qu’il avait lui-même réalisé, Alex Lutz revient derrière la caméra pour cette virée nocturne et amoureuse dans Paris qui a fait la cloture de Cannes 2023. Fraichement accueilli par la critique festivalière, épuisée par dix jours de projections intensives, le film tient en grande partie sur le couple formé par Lutz et Karin Viard, qui a aussi participé au scénario (une première). Leur complicité fait plaisir à voir mais le scénario et la réalisation laissent le spectateur en plan (à trois lors d’un passage express en club libertin) .
Barbie
Par Ph.D
Le pitch
A Barbie Land, vous êtes un être parfait dans un monde parfait. Sauf si vous êtes en crise existentielle, ou si vous êtes Ken…
Ce qu’on en pense
Fallait pas l’inviter ! En confiant les rênes du premier film consacré à la célèbre poupée Mattel à une icône du cinéma indépendant US comme Greta Gerwig (Lady Bird, Les Filles du Dr March) associée à son comparse Noah Baumbach (Frances Ha, Margot va au mariage) , Hollywood ne pouvait pas s’attendre à un traitement sage et classique du mythe Barbie. Certes, l’univers visuel kitsch et coloré de Barbie est respecté jusqu’à faire saigner les yeux, mais pour le reste quel délire ! L’arrivée inopinée de Barbie et Ken dans le monde réèl est aussi drôle que la partie consacrée à celui de la poupée. Margot Robbie et Ryan Gosling y vont à fond et sont parfaits dans leur incarnation déjantée. Sur le fond, le film est impeccablement féministe et post #MeToo, mais surtout il est fun. On le recommande… Sauf aux allergiques à la couleur rose !
Les Filles d’Olfa
Par Ph.D
Le pitch
La vie d’Olfa (Olfa Hamrouni / Hend Sabri), Tunisienne et mère de 4 filles, oscille entre ombre et lumière depuis que ses deux filles aînées sont parties rejoindre Daech…
Ce qu’on en pense
Présenté en compétition à Cannes 2023, ce documentaire sur le combat d’une femme qui avait rendu publique en 2016 la radicalisation de deux de ses filles pour tenter de les sauver des griffes de Daech, a surtout séduit pour son dispositif original: entre deux séquences d’interviews, des actrices viennent reconstituer certaines scènes à la place des vraies protagonistes et, régulièrement, celles-ci s’adressent à la réalisatrice pour dire ce qu’elles en pensent ou donner des indications. De sorte qu’on a l’impression de regarder en même temps le documentaire terminé et son makin of. Le résultat est assez bavard, mais le procédé est assez efficient au bout du compte pour qu’on ait l’impression d’entrer vraiment dans l’intimité de la famille et dans l’esprit de chacune de ses membres. Un étonnant objet filmique, signé Kaouther Ben Hania (La Belle et la meute, L’Homme qui a vendu sa peau).
Un Hiver en été
Par J.V
Le pitch
Dix personnages surpris par un froid glacial en plein été. Des rencontres, de la solitude, de l’espoir, de la peur, de l’amour, une chanson, la lutte des classes, et des rêves. Dix fragments d’humanité qui forment un tableau impressionniste de la France, aujourd’hui…
Ce qu’on en pense
En pleine canicule, cette dystopie glaciaire signée Laetitia Masson (Love Me, La Repentie, GHB) s’avère pour le moins rafraîchissante. Le casting maousse (Nicolas Duvauchelle, Elodie Bouchez, Benjamin Biolay, Judith Chemla, Cédric Kahn, Nora Hamzawi, Laurent Stocker, Clémence Poésy…) tranche avec une réalisation étonnamment minimaliste, qui s’attache surtout à montrer comment les relations entre les personnages et les décisions qu’ils prennent sont impactées par les conditions climatiques extrêmes auxquelles ils sont soudainement confrontés. Difficile de rester de glace face à ce qui leur arrive.
Limbo
Par Ph.D
Le pitch
A Hong-Kong, un flic vétéran (Ka Tung Lam) et son jeune supérieur (Mason Lee) doivent faire équipe pour arrêter un tueur qui s’attaque aux femmes, laissant leur main coupée pour seule signature. Quand toutes leurs pistes s’essoufflent, ils décident d’utiliser une jeune délinquante (Yase Liu) comme appât…
Ce qu’on en pense
Grand Prix du festival Reims Polar, Limbo renoue avec la vista des grands thrillers Hong-Kongais. Filmant la fange avec virtuosité dans un noir et blanc hyper lêché, Soi Cheang (Dog Bite Dog, Le Roi singe) immerge le spectateur dans les bas-fonds humides d’un Hong-Kong transformé en décharge à ciel ouvert, pour une enquête policière balourde, émaillée de scènes de violences difficiles à soutenir. On a mal pour la malheureuse actrice (Yase Liu) qui joue la victime expiatoire de cette fable cruelle sur la culpabilité et le pardon. Un carton au générique devrait mentionner qu »aucune actrice n’a été réellement maltraitée sur le tournage » !
Peter Gabriel: i/o
Par Ph.D
On a failli attendre ! Plus de 20 ans se sont écoulés depuis la sortie du dernier recueil de chansons originales de Peter Gabriel (Up en 2002). Mais cela valait la peine de patienter. Les 12 titres de i/o comptent parmi les meilleurs jamais écrits par l’ex-chanteur de Genesis. L’album a quasiment la même fraîcheur et la même profondeur que son tout premier effort en… 1977 ! La voix, palpitante, est toujours là, à peine plus grave. Les compositions évoquent le passage du temps, le deuil, l’injustice, les racines du terrorisme dans un mélange de sons electro , de world music et d’auto-citations discrètes (« Here comes the flood « , » Sledgehammer « …). Les 12 chansons sont disponibles dans deux versions différentes : le Bright-Side Mix réalisé par Mark Stent et le Dark-Side Mix réalisé par Tchad Blake, deux mixeurs de renommée internationale. Le premier plus pop, le second plus sombre. Les deux s’écoutent à la suite et en boucle avec le même bonheur. L’album de l’hiver 2023/2024, sans le moindre doute.
Cat Power: Sings Dylan
Par Ph.D
Fervente adepte des albums de reprises, Cat Power s’est lancée cette fois dans un exercice particulièrement périlleux : reproduire en live l’intégralité d’un album de son idole Bob Dylan. Et pas n’importe lequel : le fameux Live 1966, pierre angulaire de la discographie live du maître, qui illustre pour l’Histoire son passage (à l’époque contesté) au rock électrique. La chanteuse avait donc réservé le Royal Albert Hall de Londres, où était censé avoir été enregistré le fameux bootleg du concert de Dylan (en fait, une captation du show de Manchester) pour y chanter, dans l’ordre du concert original, les 15 titres de l’album Live 1966 sorti en version officielle et intégrale il y a quelques années. Le résultat est superbe. Musicalement, la restitution est d’une fidélité absolue, harmonica et guitares carillonnnantes comprises. A la morgue dylanienne, Cat Power substitue seulement la douce chaleur de sa voix pour un hommage qui dépasse de loin le simple « tribute ».
Amore mio
Par Ph.D
Le pitch
Lola (Alysson Paradis) refuse d’assister à l’enterrement de l’homme qu’elle aime. Elle convainc Margaux (Elodie Bouchez), sa sœur, de les emmener, elle et son fils, loin de la cérémonie. Sur la route qui les mènera jusqu’en Sardaigne, elles découvrent les adultes qu’elles sont devenues et tentent de retrouver la complicité des enfants qu’elles étaient…
Ce qu’on en pense
Pour son premier film derrière la caméra, Guillaume Gouix a conçu un road movie au féminin qui se désintéresse des paysages pour n’ausculter que le coeur et l’âme de deux soeurs que le temps et la vie ont éloignés lune de l’autre. Filmé en format carré, au plus prés des visages et des corps, Amore Mio nous entraîne sur les pas de Lola (Alysson Paradis dans un premier premier rôle) , la plus jeune des deux soeurs qui vient de perdre l’amour de sa vie et le père de son enfant et qui, sur un coup de tête, décide de ne pas assister à son enterrement. Elle convainc sa soeur, qu’elle n’avait plus vue depuis des années et qui est quand même venue pour l’enterrement, de l’emmener dans le sud faire son deuil et oublier sa peine. Aussi sage et rangée que sa soeur est borderline, Margaux (Elodie Bouchez, attendrissante) accepte, pour se rapprocher de sa petite soeur perdue de vue. Leur voyage sera l’occasion de renouer des liens défaits et de retrouver leur complicité d’enfants. Juste et touchant, un premier film prometteur qui en appelle d’autres.
L’Ile rouge
Par J.V
Le Pitch
Début des années 70, sur une base de l’armée française à Madagascar, les militaires et leurs familles vivent les dernières illusions du colonialisme…
Ce qu’on en pense
On s’étonne que le nouveau film de Robin Campillo, qui avait bouleversé la Croisette avec 120 battements par minute, sorte au lendemain du Festival de Cannes sans avoir eu l’honneur d’une sélection. L’Ile rouge aurait pourtant largement mérité d’y figurer, y compris en compétition. Sur le fond comme sur la forme, le film était taillé pour Cannes, avec un regard original sur une époque controversée, celle de la fin du colonialisme. En partie autobiographique (Robin Campillo a passé son enfance sur une base militaire à Madagascar), le récit embarque le spectateur sur des terrains inattendus mais toujours pertinents, servi par une interprétation sans faille (Nadia Tereszkiewicz, Quim Gutierrez, Charlie Vauzelle…).
Sénanque : Croix de cendre
Par MAB
Nous sommes en 1367: alors que depuis deux décennies, la peste noire s’abat sur le monde, deux jeunes frères dominicains se rendent à Toulouse en quête du précieux parchemin que leur prieur attend pour y graver ses confessions. Voilà en trois lignes annoncées l’époque et le genre de Croix de cendre la vaste fresque historique d’Antoine Sénanque. Les temps sont obscurs. Le fanatisme religieux impose sa loi. Franciscains et Dominicains se haïssent. L’inquisition brûle tout ce qui de près ou de loin ressemble à de l’hérésie. Or le secret, que les deux moines innocents vont exhumer, est celui de maître Eckhart, prêcheur aux sermons si foudroyants et clairvoyants qu’ils pourraient mettre en péril, les fondements de l’Église. Bref, alors que la Réforme se profile, nos deux héros en habit de bure se dirigent tout droit dans un piège…Des bancs de la Sorbonne où l’on étudiait la théologie assis sur des bottes de paille, aux plaines d’Asie centrale ou la grande faucheuse semait famine et peste, Sénanque mêle les destins de figures historiques à des personnages de fiction et enroule ainsi brillamment petite et grande histoire. Il faut un peu de patience pour entrer dans son épopée dramatique et spirituelle, mais cela en vaut la peine. Sénanque est érudit. Il apprend beaucoup au lecteur sur tout ce qui concerne les études et conflits théologiques du Moyen Âge. Il a sérieusement travaillé la question. Il sait aussi construire une intrigue. Son roman est un véritable polar médiéval dans lequel quelques pages sont d’ailleurs insoutenables de détails macabres. Mais Sénanque est aussi un humaniste. Les paroles œcuméniques d’Eckhart et la fraternité que se manifestent les deux héros sont là pour le prouver. Elles peuvent réconforter un lecteur, inquiet de notre époque, elle aussi bien tourmentée.
Vers un avenir radieux
Par Ph.D
Le pitch
Giovanni (Nanni Moretti), cinéaste italien renommé, s’apprête à tourner son nouveau film. Mais entre son couple en crise, son producteur français (Mathieu Amalric) au bord de la faillite et sa fille qui le délaisse, tout semble jouer contre lui ! Toujours sur la corde raide, Giovanni va devoir repenser sa manière de faire s’il veut mener tout son petit monde vers un avenir radieux….
Ce qu’on en pense
Bien que reparti bredouille, Nanni Moretti a offert à Cannes 2023 un de ses meilleurs moments avec cette hilarante comédie WoodyAllenienne dans laquelle il se moque de lui-même et de l’industrie cinématographique, sur un ton beaucoup moins austère que dans ses dernières réalisations. Trés réussi, le film réserve de grands moments destinés à devenir cultes, comme le meeting « What the Fuck » avec Netflix, la discussion sur le communisme avec un jeune assistant, où la longue scène de tournage d’un film ultra violent au cours de laquelle, pour « aider » le jeune réalisateur, Giovanni/Moretti appelle Martin Scorsese à la rescousse. Drôle, intelligent, piquant… Du grand Nanni Moretti !
Stars at Noon
Par Ph.D
Le pitch
Trish (Margaret Qualley), une jeune journaliste américaine en détresse bloquée sans passeport dans le Nicaragua d’aujourd’hui en pleine période électorale, rencontre dans un bar d’hôtel Daniel (Joe Alwyn) un voyageur anglais. Il lui semble être l’homme rêvé pour l’aider à fuir le pays. Elle réalise trop tard qu’au contraire, elle entre à ses côtés dans un monde encore plus trouble, plus dangereux…
Ce qu’on en pense
Grand Prix du Jury à Cannes 2022, le nouveau film de Claire Denis aura mis du temps à arriver en salles. Peut-être pour faire oublier les critiques peu amènes qui ont acccueilli sa projection cannoise ? Nous avions été parmi les rares (avec le jury de Vincent Lindon) à aimer et à défendre cette libre adaptation d’un roman de Denis Johnson qui offre à Margaret Qualley (fille d’Andie MacDowell aperçue en hippie auto-stoppeuse dans le dernier Tarantino), un premier grand rôle dramatique, dans ce qu’on pourrait présenter comme une sorte de Profession Reporter au féminin. Claire Denis, qui avait déjà magnifiquement filmé l’Afrique dans White Material, récidive avec l’Amérique du sud dans ce film qui est de la même veine caniculaire et sensuelle.
Asteroid City
Par Ph.D
Le pitch
Asteroid City est une ville minuscule, en plein désert, dans le sud-ouest des États-Unis. Nous sommes en 1955. Le site est surtout célèbre pour son gigantesque cratère de météorite et son observatoire astronomique à proximité. Ce week-end, les militaires et les astronomes accueillent cinq enfants surdoués, distingués pour leurs créations scientifiques, afin qu’ils présentent leurs inventions. À quelques kilomètres de là, par-delà les collines, on aperçoit des champignons atomiques provoqués par des essais nucléaires…
Ce qu’on en pense
A Cannes, où le film était présenté en compétition, il a fallu un bus pour transporter le casting de l’hôtel jusqu’au Palais des Festivals ! Jason Schwartzman, Scarlett Johansson, Tom Hanks, Adrien Brody, Bryan Cranston, Tilda Swinton, Steve Carell et Willem Dafoe (entre autres) sont à l’affiche du nouveau film de Wes Anderson, petit chef d’oeuvre de miniaturisme et d’inventivité qui, sous la forme d’une vraie-fausse pièce de théâtre, raconte une rencontre du troisième type dans un décor des sixties en Arizona. On retrouve tout ce qu’on aime (ou pas) dans le cinéma d’Anderson, sous une forme plus légère et digeste que ses dernières réalisations (The French Dispatch, The Grand Budapest Hotel) qui pêchaient pas trop-plein. Asteroid City est sans doute son film le plus accessible depuis La Famille Tennenbaum. Idéal pour découvrir le cinéma de Wes Anderson ou renouer avec lui si on a décroché.
Sisu
Par Ph.D
Le pitch
Finlande, 1944. Dans la nature sauvage et hostile de la Laponie, alors occupée par les nazis, un ancien soldat (Jorma Tommila) découvre un gisement d’or. Prêt à tout pour sauver son précieux butin, il ne reculera devant rien, quitte à devoir assassiner jusqu’au dernier SS qui se trouverait sur son chemin…
Ce qu’on en pense
Emule Finlandais de Quentin Tarantino, Jamalri Helander (Big Game, Père Noël Origines, Zéro deux) signe avec Sisu (adéquatement sous-titré « de l’or et du sang » ) une série B grindhouse totalement jubilatoire, dans laquelle le héros increvable (Jorma Tommila en Rambo nordique) zigouille du nazi à la chaîne… et à la pioche ! Les amateurs de films de guerre (de gore?) sont à la fête avec ce mélange délirant de western spaghetti, de Rambo et de John Wick. Même convertis en euros-Macron, Sisu c’est pas cher payé pour un fun-trip pareil !
Wahou !
Par J.V
Le pitch
Catherine (Karin Viard) et Oracio (Bruno Podalydès) sont conseillers immobiliers et enchaînent les visites de deux biens: une grande maison bourgeoise « piscinable, vue RER », et un petit appartement moderne situé en plein triangle d’or de Bougival. Malgré des visites agitées, ils ne perdent pas de vue leur objectif : provoquer le coup de cœur chez les potentiels acheteurs, le vrai, l’unique qui leur fera oublier tous les défauts. Celui qui leur fera dire « Wahou !»…
Ce qu’on en pense
La petite musique comique de Bruno Podalydès (Versailles Rive-Gauche, Les 2 Alfred, Comme un avion) fait encore merveille dans cette comédie burlesque qui s’attaque au monde de l’immobilier. Pas de véritable intrigue, mais une série de sketches autour de multiples visites de biens immobiliers qui ne trouvent pas preneur. Tout tient sur les dialogues (toujours excellents) et le casting, avec Manu Payet en promoteur, Roschdy Zem en père de famille méfiant, l’inévitable Denis Podalydès en client attentiste, Agnès Jaoui en plein drame conjugal, Bruno Podalydès lui-même et Karin Viard en agents immobiliers pas trés successful et le couple Sabine Azéma / Eddy Mitchell en propriétaires encombrants. Un régal !