Le Mal n’existe pas
Par J.V
Le pitch
Takumi (Hitoshi Omika) et sa fille Hana (Ryo Nishikawa) vivent dans le village de Mizubiki, près de Tokyo. Comme leurs aînés avant eux, ils mènent une vie modeste en harmonie avec leur environnement. Le projet de construction d’un « camping glamour » dans le parc naturel voisin, offrant aux citadins une échappatoire tout confort vers la nature, va mettre en danger l’équilibre écologique du site et affecter profondément la vie de Takumi et des villageois…
Ce qu’on en pense
Primé à Cannes et Oscar du meilleur film étranger en 2021 pour Drive my car, Ryusuke Hamaguchi avait choisi la Mostra de Venise pour présenter son nouveau film. Il y a reçu le Lion d’argent et un prix du jury. Le Mal n’existe pas est une fable écologique aux personnages tourmentés, qui tissent des relations basées sur le mensonge ou le non-dit. A l’image d’une société tiraillée entre le désir de préserver la nature et la recherche constante du profit. Fascinant et déroutant à la fois, le film s’incruste dans l’esprit du spectateur et continue son ouvrage après la projection.
Quelques jours pas plus
Par Ph.D
Le pitch
Arthur Berthier (Benjamin Biolay), critique rock relégué aux informations générales après avoir saccagé une chambre d’hôtel, découvre que le journalisme est un sport de combat. Envoyé à l’hôpital par un CRS en couvrant l’évacuation d’un camp de migrants, il tombe sous le charme de Mathilde (Camille Cottin), la responsable de l’association Solidarité Exilés et accepte, pour quelques jours, croit-il, d’héberger Daoud (Amrullah Safi), un jeune Afghan…
Ce qu’on en pense
Directrice de casting réputée, Julie Navarro affirme avoir eu beaucoup de mal à trouver « son » Arthur Berthier. Benjamin Biolay pouvait pourtant sembler un choix évident pour incarner ce rock-critique à la coule, contraint à faire du journalisme social. Pour son premier vrai premier rôle, le chanteur de La Superbe est parfait face à l’expérimentée Camille Cottin en passionaria de l’humanitaire. Leur duo est l’atout principal de ce premier film prometteur, qui navigue avec aisance entre social, sentiments et humour. Sur à peu près le même canevas, on l’a préféré à Une année difficile de Nakache et Toledano.
Vivants
Par J.V
Le pitch
Gabrielle (Alice Isaaz), 30 ans, intègre une prestigieuse émission de reportages. Elle doit très vite trouver sa place au sein d’une équipe de grands reporters. Malgré l’engagement de Vincent (Roschdy Zem), leur rédacteur en chef, ils sont confrontés au quotidien d’un métier qui change, avec des moyens toujours plus réduits, face aux nouveaux canaux de l’information. Habités par leur passion pour la recherche de la vérité, leur sens de l’humour et de la solidarité, ils vont tout tenter pour retrouver la foi de leurs débuts et se réinventer…
Ce qu’on en pense
Venue du documentaire, Alix Delaporte (Angèle et Tony) livre un film assez réaliste sur le journalisme d’investigation confronté au bouleversement de l’univers des média et à la crise du journalisme traditionnel confronté aux chaines du web et aux réseaux sociaux. Le charme du film tient en grande partie à son casting dans lequel se retrouvent Roschdy Zem, Alice Isaaz, Vincent Elbaz, Pascale Arbillot, Pierre Lottin, Jean-Charles Clichet et Grégoire Leprince-Ringuet. La partie romance n’est pas terrible, mais on en sort vivants.
Le Tableau volé
Par J.V
Le pitch
André Masson (Alex Lutz), commissaire-priseur dans la célèbre maison de ventes Scottie’s, reçoit un jour un courrier selon lequel une toile d’Egon Schiele aurait été découverte à Mulhouse chez un jeune ouvrier. Très sceptique, il se rend sur place et doit se rendre à l’évidence : le tableau est authentique, un chef-d’œuvre disparu depuis 1939, spolié par les nazis. André voit dans cet événement le sommet de sa carrière, mais c’est aussi le début d’un combat qui pourrait la mettre en péril. Heureusement, il va être aidé par son ex-épouse et collègue Bertina (Léa Drucker), et par sa fantasque stagiaire Aurore (Louise Chevillotte)…
Ce qu’on en pense
Comme certaines toiles de maître, le nouveau film de Pascal Bonitzer (Rien sur Robert, Cherchez Hortense, Les Envoutés…) est fait de plusieurs couches, mais le vernis a du mal à prendre. Profiter de l’enquête artistique autour d’un tableau volé par la nazis pour évoquer la Shoah et le trauma qui continue de hanter les nouvelles générations était, à priori, une bonne idée de « dramédie ». Sauf que, comme son personnage principal, joué par Alex Lutz, le film se montre hésitant, essaie d’être transgressif, puis se ravise et vire à la comédie romantique. D’où une impression mitigée à l’arrivée, malgré un bon casting et des dialogues savoureux.
Back to Black
Par J.V
Le pitch
Début des années 2000, passionnée de jazz, la jeune Amy Winehouse (Marisa Abela) fait ses débuts sur scène dans le nord de Londres. Rapidement et alors qu’elle vit une histoire passionnée et tourmentée avec Blake Fielder-Civil (Jack O’Connell), le succès la rattrape. Une relation qui lui servira d’inspiration pour son second album, Back to black …
Ce qu’on en pense
Amy Winehouse par le réalisateur de Cinquante nuances de Grey : il fallait y penser ! Certes, il y avait sans doute quelques chose de masochiste dans le processus d’autodestruction qui a conduit la chanteuse du sommet des hit parades à l’enfer de la drogue et à la mort. Mais tel n’est pas le sujet de ce biopic ultra lisse, qui fait bien pale figure comparé au formidable documentaire d’Asif Kapadia (Amy). Reste la prestation sans faute de Marisa Abela dans le rôle de la diva destroy. Une découverte qui mérite, à elle seule, de voir le film.
Sidonie au Japon
Par J.V
Le pitch
Sidonie Perceval (Isabelle Huppert) se rend au Japon à l’occasion de la ressortie de son best-seller. Malgré le dévouement de Kenzo Mizoguchi (Tsuyoshi Ihara) son éditeur japonais avec qui elle découvre les traditions du pays, elle perd peu à peu ses repères… Surtout lorsqu’elle se retrouve nez à nez avec Antoine (August Diehl), son mari, disparu depuis plusieurs années !
Ce qu’on en pense
Coécrit par la regrettée Sophie Fillières, le nouveau film d’ Elise Girard (Belleville-Tokyo , Drôles d’oiseaux ) met en scène Isabelle Huppert dans un rôle qu’on lui a déjà vu jouer chez Hong Sang-Soo: celui de l’occidentale en goguette en Asie. L’actrice s’empare néanmoins avec gourmandise du rôle de cette femme qui reprend peu à peu goût à la vie et à l’amour. De son côté, la réalisatrice confirme un talent sûr pour implanter des univers décalés. Le film joue avec finesse sur les différences de codes et de cultures entre la France et le Japon, s’attache à la psychologie de ses trois personnages principaux et magnifie le pays par des plans de toute beauté. On a beaucoup de plaisir à accompagner Sidonie dans son voyage au Japon.
LaRoy
Par J.V
Le pitch
Quand Ray (John Magaro) découvre que sa femme (Megan Stevenson) le trompe, il décide de mettre fin à ses jours. Il se gare sur le parking d’un motel. Mais au moment de passer à l’acte, un inconnu fait irruption dans sa voiture, pensant avoir affaire au tueur qu’il a engagé…
Grand Prix du Jury, prix du public, prix de la critique… LaRoy a tout raflé au dernier festival du film Américain de Deauville. Une unanimité plutôt rare, pour un film qui en rappelle un autre : Blood Simple avec lequel les frères Coen avaient fait des débuts fracassants. Le réalisateur Sean Atkinson s’en est, semble-t-il, largement inspiré pour ce polar matiné de comédie noire, servi par un excellent casting et aux dialogues percutants. On lui souhaite la même carrière qu’à ses ainés.
Civil War
Par J.V
Le pitch
Dans une Amérique livrée à la guerre civile, un petit groupe de journalistes tente de rejoindre Washington…
Ce qu’on en pense
Bienvenue dans l’Amérique du deuxième mandat de Donald Trump… Ou d’un de ses successeurs. Ancien scénariste de Danny Boyle, Alex Garland ( Ex Machina , Annihilation , Men) filme un pays en guerre… contre lui même. Avec un réalisme cru qui fait peur. Les scènes d’affrontements armés sont spectaculaires et glaçantes. Témoins du carnage Kristen Dunst et Cailee Spaeny (Priscilla) tracent la route sous les tirs des ennemis de la liberté d’expression. Anticipation ou dystopie ? On prie pour que ce ne soit qu’un simple cauchemar.
Borgo
Par J.V
Le pitch
Melissa (Hafsia Herzi), 32 ans, surveillante pénitentiaire expérimentée, s’installe en Corse avec ses deux jeunes enfants et son mari (Moussa Mansaly). L’occasion d’un nouveau départ. Elle intègre les équipes d’un centre pénitentiaire pas tout à fait comme les autres. Ici, on dit que ce sont les prisonniers qui surveillent les gardiens. L’intégration de Melissa est facilitée par Saveriu (Louis Memmi), un jeune détenu qui semble influent et la place sous sa protection. Mais une fois libéré, Saveriu reprend contact avec Melissa. Il a un service à lui demander. Une mécanique pernicieuse se met en marche…
Ce qu’on en pense
Comme dans La Fille au bracelet, Stéphane Demoustier joue sur l’ambivalence de son personnage et sur la complexité des situations pour pousser le spectateur à la réflexion. Hafsia Herzi, dans un de ses meilleurs rôles, incarne à merveille cette jeune surveillante de prison, manipulée mais consciente de l’être, prise malgré elle dans une mécanique dangereuse. Le film tient en haleine en évitant les clichés sur la Corse et les poncifs du genre. Une réussite.
Drive Away Dolls
Par J.V
Le pitch
Jamie (Margaret Qualley), une jeune femme libre d’esprit essuyant une énième rupture amoureuse, et Marian (Géraldine Viswanathan), son amie pudique et réservée qui souffre de frustration généralisée, sont en quête d’une bouffée d’air frais. Elles se lancent dans un road trip en direction de Tallahassee, mais leur périple va vite se compliquer quand elles croisent la route d’une bande de truands…
Ce qu’on en pense
Associé, non plus a son frère Joël, mais à sa compagne Tricia Cooke, Ethan Coen livre un road movie déjanté dans lequel on reconnait, évidemment, la manière des « frères Coen« . Tourné dans le style des films de sexploitation à la Russ Meyer, Drive-Away Dolls assume son côté série Z, mais n’oublie pas de faire un portrait au vitriol de l’Amérique profonde, avec une Margaret Quailey (Il était une fois… à Hollywood, Stars at Noon) au top et une malette mystérieuse dont les cinéphiles vont adorer deviner le contenu.
Wonka
Par J.V
Le Pitch
Le jeune Willy Wonka (Timothée Chalamet) débarque dans une grande ville pour vendre ses chocolats magiques et donner du bonheur autour de lui. Il lui faudra faire face à un cartel de vendeurs prêts à tout pour conserver leur monopole…
Ce qu’on en pense
18 ans après Tim Burton avec Charlie et la chocolaterie, Paul King réalisateur des Paddington adapte à son tour Roald Dahl avec ce prequel dans lequel Timothée Chalamet reprend le rôle créé par Johnny Depp. Une réussite, tant sur le plan de la réalisation – qui s’inscrit dans la grande tradition des comédies fantatisques anglo saxonnes-, que sur celui de l’interprétation, avec un Thimothée Chalamet très à son aise (et à son avantage) ppur danser et pousser la chansonnette. Certes, l’intrigue est moins marquante que celle de Charlie et l’esthétique est plus classique, mais Wonka constitue un parfait « film de noël » dont on aurait tort de se priver.
Priscilla
Par J.V
Le pitch
Quand Priscilla (Cailee Spaeny) rencontre Elvis (Jacob Elordi), elle est collégienne. Lui, à 24 ans, est déjà une star mondiale. De leur idylle secrète à leur mariage iconique, la jeune femme effacée se réveille lentement de son conte de fées pour prendre sa vie en main…
Ce qu’on en pense
Sofia Coppola adapte l’autobiographie de Priscilla Presley, jeune épouse du King et mère de sa fille Lisa-Marie, dans ce biopic sensible et féministe, qui lui permet d’aborder les questions très actuelles du consentement et de l’emprise. Elle le fait sous sa forme pop habituelle, sans trop s’embarrasser de détails « historiques », ni craindre d’écorner l’image de l’icône du rock. Dans le rôle-titre, Cailee Spaeny est impressionnante de bout en bout.
Et plus si affinités
Par J.V
Le Pitch
Usé par vingt-cinq ans de vie commune, Xavier (Bernard Campan) et Sophie (Isabelle Carré) semblent à bout de souffle. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que l’idée de Sophie d’inviter à dîner leurs voisins, Adèle (Julia Faure) et Alban (Pablo Pauly), n’enchante pas Xavier. Il reproche à ce couple, visiblement très amoureux, son manque de discrétion, surtout la nuit ! Au contact de ces voisins aux mœurs débridées, Xavier et Sophie vont devoir se confronter à leur réalité, avant d’être poussés dans leur retranchement par une proposition quelque peu… indécente !
Ce qu’on en pense
Avec Se Souvenir des belles choses et La Dégustation, le couple de cinéma formé par Isabelle Carré et Bernard Campan a fait ses preuves. Il confirme son capital de sympathie dans cette adaptation du film espagnol Sentimental par Wilfried Méance et Olivier Ducray. Une comédie pétillante, qui interroge la notion de couple, la sexualité et la fidélité au cours d’un repas avec des voisins libertins (excellents Pablo Pauly et Julia Faure). Les dialogues fusent et on rit beaucoup, comme dans une bonne pièce de boulevard. Le film n’échappe d’ailleurs pas au syndrome « théâtre filmé ».
Zone of Interest
Par Ph.D
Le pitch
Le commandant d’Auschwitz, Rudolf Höss (Christian Friedel), et sa femme Hedwig (Sandra Hüller) s’efforcent de construire une vie de rêve pour leur famille dans une maison avec jardin, à côté du camp….
Ce qu’on en pense
Choc esthétique et conceptuel de Cannes 2023 ( où il a obtenu le Grand Prix, à défaut d’une Palme d’Or qui aurait été tout aussi méritée), le nouveau film de Jonathan Glazer (Sexy Beast, Birth, Under the Skin) est la parfaite adaptation du roman de feu Martin Amis. Comme le roman, le film se passe presqu’entièrement dans la maison du commandant d’Auschwitz (Christian Friedel). Il décrit, au quotidien ,une vie de famille presque normale, n’était un fond sonore constitué du ronflement continu des fours, de cris, d’ordres hurlés, d’aboiement de chiens et de coups de feu (le travail sur le son est formidable). Derrière les hauts murs du jardin, on aperçoit la fumée monter d’une énorme cheminée… Un environnement que la grand-mère des enfants, en visite dans la famille, aura du mal à supporter ! Mais pas leur mère, jouée par l’épatante Sandra Huller qui aurait deux fois mérité le prix d’interprétation Cannois puisqu’elle était aussi en compétition pour Anatomie d’un chute. Toute fière de sa jolie maison et des avantages liés à la position de son mari, on la voit houspiller les jardiniers en tenue de prisonniers, ou se réjouir de trouver un manteau de vision dans les lots de vêtements qui arrivent régulièrement du camp… Moins ébouriffante que celle d’Under the Skin, la mise en scène de Zone of Interest est aussi glaçante que son sujet (la banalité du mal). Une oeuvre majeure, sur le fond comme dans la forme.
Perfect Days
Par Ph.D
Le pitch
Hirayama (Koji Yakusho) travaille à l’entretien des toilettes publiques de Tokyo. Il s’épanouit dans une vie simple, et un quotidien très structuré. Il entretient une passion pour la musique, les livres, et les arbres qu’il aime photographier. Son passé va ressurgir au gré de rencontres inattendues…
Ce qu’on en pense
Coup de coeur absolu de Cannes 2023 (lire ici), le nouveau film de Wim Wenders confirme le retour d’inspiration du réalisateur allemand qui y présentait aussi son documentaire en 3D sur le plasticien Anselm Kiefer (Anselm). Une ode à la vie simple , à la décroissance ( et aux toilettes publiques high tech de Tokyo !) qui a permis à Koji Yakusho de repartir avec un prix d’interprétation, somme toute mérité : avec trés peu de dialogues, l’acteur japonais parvient à faire passer énormément de sentiments et d’émotion. La mise en scène, extrêmement fluide, et la BO vintage (Lou Reed, Van Morrison, Patti Smith, Nina Simone…) font le reste dans cette épure géniale, qui rappelle un peu le Paterson de Jim Jarmush.