Antibes : Don Juan
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(Photos Sebastien Botella)
Par Franck Leclerc
À l’orée du Vieil-Antibes, « gastro » et bistrot se font face. Bienvenue au Don Juan. Chez Florent ou chez Julien, tout est question de budget et d’envie. Mais pas d’appétit. Car les plats, généreux, sortent de la même cuisine, celle de Florent Corsini. Cet ancien du Charlot 1er à Cagnes-sur-Mer, y a appris à cuisiner le poisson avec attention et respect. C’est-à-dire sans gâchis, avec un nombre de gestes réduit et une cuisson parfaitement maîtrisée. L’intervention du chef est aussi ténue que possible : ici, la parole est vraiment au produit. L’affluence en dit long sur la pertinence de l’esprit. Renouvelé chaque jour par Jean-Jacques Manzo, le décor est littéralement à croquer : caisses et cagettes de légumes d’exception se bousculent où, pendant le service, la brigade vient piocher. Zéro passage en frigo, presque tout a mûri à point chez le cousin Patrick Massi, à Cagnes-sur-Mer, dans la plaine du Var et sur les collines niçoises. Le reste est sélectionné avec soin sur les bancs du Marché d’intérêt national de Nice, aux premières heures de la journée…
Saint Paul : La Table de Pierre
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Par Ph.D
Fermé pour travaux juste avant le premier confinement, Le Mas de Pierre à Saint Paul de Vence a réouvert en juin, juste après le dernier. Bien joué ! Entre temps, le resort est passé de 5 à 8 hectares, avec deux bastides d’architecte et 22 chambres supplémentaires, un spa pharaonique de 2000 M2 , un lagon de sable blanc digne des Seychelles , un terrain de sport, un kid park équipé de roulottes de cirque et d’un terrain d’aventures, un théatre de verdure, une serre à orchidées et un jardin potager, où viennent se servir les chefs. La rénovation, qui a renforcé l’esprit luxueux et intimiste de l’hôtel Relais et Châteaux, a également transformé la réception, la conciergerie et les deux restaurants de l’hôtel : le bistrot Lis Orto et La Table de Pierre, où le chef exécutif Emmanuel Lehrer dispose désormais d’une spectaculaire cuisine centrale ouverte de 25 mètres carrés. Le restaurant gastronomique de l’hôtel a été doté d’une verrière largement ouverte sur la terrasse, à la décoration acidulée et pop, où l’on pourra profiter des dernières belles soirées d’été pour découvrir les créations de Maxime Leconte, jeune chef passé par le Royal Riviera à Saint-Jean–Cap-Ferrat, dont les voyages en Amérique du Sud et notamment au Pérou ont inspiré les plats des deux menus que nous avons découvert cet été.
Délicate Raviole de pomme Granny, concombre mariné, condiment miel & huile d’olives, pollen de fleurs, succulent Céviche de poisson fumé en feuille de maïs, jus fermenté de jora, fabuleuse Langoustine mousse de riz acquerello, poupeton de fleurs de courgettes, bouillon de têtes aux feuilles d’agrumes, Magret de canard maturé aux baies de timut, chutney de betterave et framboise, ultra fondante Selle d’agneau marinée, condiment Chimichurri (attention ça pique !) , panisse et moutarde maison à la graine de roucou. En bouche, c’était le Pérou ! Côté desserts, le chef-pâtissier Dorian Lutzelschwab nous avait concocté une délicieuse glace pistache hibiscus framboise du jardin et un divin mascarpone meringue coulis de framboise. Le tout accompagné de bourgogne blanc et rouge, sancerre et bordeaux Cheval noir conseillés par le sommelier. Un pur régal des yeux et des papilles (sans parler du service : parfait) et sans aucun doute l’un des meilleurs rapports qualité-originalité-cadre-prix de la Côte d’Azur pour un restaurant de cette catégorie. Qu’attendent les guides pour l’étoiler ? Mystère. A tester cet hiver (nouvelle carte en octobre) puisque le resort restera ouvert pour la toute première fois depuis sa reprise en 2005 par le groupe Elancia d’Henri Chambon. Emmanuel Lehrer nous a parlé de « jeudis découverte » qu’on à hâte de… découvrir!
Théoule : L’Or Bleu
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(Photo Franz Chavaroche)
Recommandé par Jacques Gantié (Table Libre)
À Théoule-sur-Mer, l’hôtel Tiara Yaktsa, villa de collectionneur, architecture Art Déco et silhouette méditerranéenne, concilie les saisons. Le choix d’une table est souvent une affaire de lieu et avant de poursuivre la route en corniche et de gagner le territoire varois, cet hôtel de charme aux notes orientalistes dominant jardins en espaliers et baie de Théoule, joue parfaitement son rôle. L’enseigne vaut son pesant d’exotisme, la boussole indique un sud résidentiel et insolite… La gastronomie n’a qu’a bien se tenir ! Guillaume Anor, son auteur a compris le message. Ce Raphaëlois au tracé éloquent – Eden Roc, Oasis, Moulin de Mougins, La Passagère à Juan-les-Pins, le Crillon, le Meurice, Taillevent… – n’est pas en terre inconnue. Ce soir d’été, le vent imposait un repli de la terrasse à la salle en rotonde baignée de lumière. L‘entrée aux légumes en cocotte lutée à l’argile, huile d’olive du Moulin Baussy (Spéracèdes) ? Une note terrienne et légère, bienvenue aux côtés de l’émietté de tourteau au citron vert en cannelloni de calamar, chutney de pomelos acidulé. On n’a pas supplié « Marseille, sors de cette bouillabaisse ! », en goûtant une recette « perso » au délicat iodé, pommes de terre fourrées d’une brandade de cébettes. La selle d’agneau en croustillant kadaïf et mousseline de betteraves jouait classique et on lui préférait la côte de bœuf rôtie au foin, pommes grenaille en persillade, pour la cuisson et le suave, suivi, à l’heure du soleil couchant, par l’île flottante, saveurs d’agrumes épicés et coco torréfiée. Il faut goûter cette cuisine sensible et lisible servie dans l’atmosphère d’une demeure d’hôtes. Enfin, à Moya, au Miramar Beach voisin, Guillaume Anor soigne une seconde table épatante à la déco ludique, cuisine à comptoir ouvert, salle adossée au rocher, grandes baies, terrasse plein sud et crique exclusive. Parfait pour goûter calamars farcis et riz poêlé au Comté, brochette de canard au miel ou côte de bœuf cuite au four à la braise et farcis niçois.
Saint-Jean Cap Ferrat : Paloma Beach
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Même amputée d’une grande partie de sa plage, de son ponton d’accostage et de ses matelas, La Paloma à Saint Jean Cap Ferrat reste un havre de paix, où l’eau est claire et le poisson frais. Une adresse précieuse où il est aussi de dîner au clair de lune, jusqu’au début du mois de septembre. Côté carte, pas de fioritures ( pêche du jour, pâtes, viandes…), mais pas de mauvaises surprises non plus sur les tarifs (autour de 20 euros le plat). Un lieu familial où l’on sert encore sur nappe blanche des produits de qualité, et qui reste fidèle à lui-même, années après années contre vents et marées. Il n’y en a pas tant sur la Côte d’Azur..
Golfe Juan: Le Bistrot du Port
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Recommandé par Jacques Gantié (Table Libre)
Ancien de chez Tétou, temple de la bouillabaisse, Mathieu Allinei « travaille la mer » depuis 2005 au Bistrot du Port de Golfe Juan qu’il a remis au goût du jour (comptoir, salle vitrée, terrasse dominant les bateaux…). Si vous cherchiez où manger du bon poisson de pêche locale, vous êtes à bon port. Le poulpe cuit à l’étouffée, en raviolis et bouillon de boeuf, est une gourmandise. Le dos de maigre en vapeur d’algues, courgettes-fleurs et jus corsé à l’anémone de mer est de même régal. Chapons, pagres, sars, daurades, saint-pierre ramenés par les artisans pêcheurs de Golfe-Juan, Cannes, Mandelieu et Fréjus frétillent à la carte. A midi, en semaine, ils vous seront facturés moins de 30 € dans l’assiette. Rapport qualité-prix imbattable. Mathieu affine aussi ses jambons, fume le saumon, réalise lui-même sauce soja, nuoc-mâm d’anchois, de sardines, poutine et rouget.Le sucre d’algue de ses brioches accompagne un «foie gras» de baudroie et ses bouillons donnent un pain iodé délicieux… Amateurs de poisson, jetez l’ancre au Bistrot du port !
(Photos J.G)
Cannes : Miramar Plage
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Recommandé par Jacques Gantié (Table Libre)
Question de saison : Miramar est-il le meilleur restaurant de plage de la Croisette ? Réponse un peu fourbe : à quoi bon classer les tables-parasols et se mettre à dos le gratin du sable cannois ! Tout de même, la tenue d’assiette, l’accueil pro et le service affûté, l’étoffé plutôt rare de la carte des vins… tout mérite attention. Mers lointaines, plages choisies ou chics stations d’hiver, Julien Hocquaux, le directeur, a bourlingué de Saint-Martin à Juan-les-Pins, Courchevel ou Le Bourget-du-Lac (Le Bateau ivre, 2 étoiles) et tient la gastronomie pour un atout. Un résistant ! Encore fallait-il trouver un chef pour défier la pression de l’été. Ce bon génie sorti de sa lampe s’appelle Florian Cano. Ni pro sur le retour, ni baroudeur à bandana, formé cinq ans à l’Oustau de Baumanière au temps de Sylvestre Wahid, il a réussi son passage de la grande maison des Baux-de-Provence aux transats de Cannes. Les cartes « plagistes » sont souvent longues comme un désert sans oasis. Celle du Miramar l’est aussi. Mais à chaque étape c’est léger, bien tissé, grillé juste, finement accompagné. Au risque d’une revue de détails, on salue la déclinaison de tomates, burrata crémeuse, les gamberoni marinés au citron, les filets de rougets et coquillages, fenouil croquant-fondant, la côte de veau et macaroni, tomates-parmesan, les linguine au homard, risotto de quinoa, les desserts « tradi » ou ciselés de Jean-Claude Linxe… On craignait du désinvolte pour tables farniente, cette fièvre estivale qui peut toujours contrarier l’adresse la mieux disposée, mais rien de tel ce jour-là, à cette adresse blanche et sobre.
La carte des vins recrute élégant, fruité, généreux, sans facilités sudistes. Dans son tour des domaines, on puise Château Barbanau cuvée « Kalahari » (Cassis), Bellet Clos Saint-Vincent, domaine Trévallon, cuvées de Fiumicicoli (Corse-Sartène), Sancerre « Génération Dix-Neuf », Riesling de Trimbach, Pouilly-Fumé « Silex » de Dagueneau, fines bulles d’Henri Giraud « Code Noir », Blanc de blancs Deutz 2007, premiers de cépages bourguignons, bordelais classés à l’or fin… Du beau monde. Enfin, comme chez ses voisines, l’addition, plus cannoise que fleur bleue, flirte sans surprise avec les 100 e. Mais cette cuisine-plaisir a un prix, qui ne nous semble pas usurpé. Celui du soleil et du marchand de sable.

(Photo Franz Chavaroche)
Bandol: Les Oliviers
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(Photo Franz Chavaroche)
En posant son CV aux Oliviers, le restaurant gastronomique de l’hôtel de L’île rousse à Bandol, Jérémy Czaplicki, venu du Château de Berne à Lorgues (auparavant second de Jean-François Rouquette au Park Hyatt-Vendôme à Paris), a apporté une autre inspiration à ce restaurant lumineux, qui a obtenu sa première étoile Michelin en 2019. La gastronomie, méticuleuse et lisible, est à l’image de ce chef à la calme attitude. Le risotto de petit épeautre, bouillon de coquillages, beurre de coques et poutargue est une délicieuse entrée terre-mer. Les gambero rosso en version actualisée d’un « petits pois carottes » au rosé de Bandol et lard croustillant sont de plein sud. Le saint-pierre, ce délicat qui écume toutes les cartes, souvent traité avec mièvrerie, est proposé en vessie de calamar, pistou d’algues, artichauts épineux et miso (de riz « rouge »). Rien de tel que ce condiment pour mettre de l’animation sur une mer calme. Jérémy Czaplicki le réussit, comme le ris de veau de lait et brocolis, aïoli et moelle de brocolis, plat de douceur et palette de couleurs. Enfin, une variation sudiste invite l’olive noire, fuseaux croustillants, confit d’olive aux gousses de vanille, crème au citron et sorbet à l’aneth. La bonne idée : le menu « Au fil de l’eau » avec l’ami saint-pierre en trois services dont un « pot-au-feu » de fenouil et bouillon de tomates vertes au basilic… Servie par un personnel qui en partage l’esprit, cette cuisine méditerranéenne fait les beaux jours de L’Île Rousse en toute saison. Elle a aussi son revers quand le dressage frôle l’art pour l’art et une certaine évanescence.
Antibes: L’Arazur
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Recommandé par Jacques Gantié (Table libre)
Avant d’ouvrir leur restaurant du Vieil Antibes, Lucas Marini et Jeanne Martin ont vu du pays. Le Meurice avec Yannick Alleno, Le Grand Véfour de Guy Martin, Ledoyen avec Christian Le Squer, Le Mirazur de Mauro Colagreco pour Lucas. L’Institut Paul Bocuse, Le Bristol avec Eric Fréchon, L’Astrance de Pascal Barbot, Jean Georges Vongerichten à New York et Mauro Colagreco à Menton pour Jeanne. Deux ans après son ouverture, L’Arazur est l’une des meilleures tables d’Antibes. De sa cuisine ouverte sortent des plats limpides: carpaccio de loup, pickles de légumes et vinaigrette au kiwi. Asperges vertes rôties, sauce parmesan, condiment ail noir et jaune d’oeuf. Homard-chanterelles. Ris de veau, petits pois à la sarriette, sauce soja et ciboulette. Fruits exotiques, crémeux mascarpone, crumble café et sorbet fruit de la passion… L’influence de Christian Le Squer pour les fondamentaux et de Mauro Colagreco pour la créativité se fait sentir. Salle claire, décor de bistrot-gastro, cave éclectique, cette jeune adresse à la trentaine de couverts avec terrasse sur la rue, a compris qu’il ne suffisait pas d’être doué pour rafler la mise : accueil en douceur et addition en harmonie sont les gages d’un succès durable.
(Photos JG)
Nice : Les Garçons
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Les Garçons, on y va pour la réputation (élogieuse), pour la déco « industrielle chic » et l’ ambiance » lounge » (attention c’est toujours bondé : réservation obligatoire) . On y revient forcément, pour la cuisine, l’accueil et le rapport qualité . Ça se passe dans le vieux Nice , rue Centrale, pas loin de chez Fenocchio. La carte promet une cuisine française « revisitée, gourmande et saine ». Elle est courte, mais tout fait envie. Dès l’entrée, des choix cornéliens se posent : Brick au Munster et figues fraîches rôties ? Taboulé de quinoa à la féta, vinaigrette de framboise ? Salade d’endives, pommes et noix à la fourme d’Ambert et miel ? Velouté de potimarron et poire ? Tout est à 11 euros, ce qui ne facilite pas la décision pour les radins. A suivre : Médaillon de veau au caviar d’aubergine, jus de thym, pommes de terre au four, Magret de canard à la figue, polenta crèmeuse et jus corsé au Porto, Lasagnes courgette et chèvre au basilic, Burger façon « cheese » ou « cheese bacon », pommes de terre au four, Pavé de saumon, vierge de mangue et graine de chia, risotto au curry, Dos de cabillaud au chorizo, fondue de poireaux (tout à 18 euros) . L’assiette est copieuse, mais les gourmands s’achèveront à l’ Ananas rôti au rhum, émulsion de noix de coco, au Clafoutis aux mirabelles, à la Panna cotta à la carotte et gingembre, tuile au sésame ou à la très redoutable Tarte au chocolat et caramel au beurre salé et pistaches (tout à 8 euros). Une des (rares) adresses sûres du Vieux Nice.
Nice : Chez Julie
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Julie Geille tient bar à vins et grignotages, rue Grimaldi. Ou « rue Geille » ? En quatre ans, ses parents ont métamorphosé l’aimable artère en point de référence gastronomique, ouvrant Séjour Café, tenu par leur fille Marina, puis Mon Petit Café avec leur fils Robin. Il ne restait plus à Julie qu’à compléter la collection familiale. Assiettes gourmandes et tapas : burrata et tomates cerise, saumon fumé bio, chèvre frais, gâteaux maison… Sans oublier la sélection, jamais figée, de deux vins par couleur. Rendez-vous Chez Julie !
Toulon : Le Local
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Recommandé par Jacques Gantié (Table Libre)
Murs bleu canard, panneaux de bois brut, ardoise du jour accrochée en tryptique… Le Local de Thibaud et Caroline Durix, au Mourillon, a l’allure d’un bistrot de copains. Encore un ? Plutôt un amour de bonne table ! Un parcours en lieu sûrs (Hôtel du Castellet, Hostellerie Bérard à La Cadière-d’Azur, La Réserve de Beaulieu, Carthier Traiteur à Toulon) explique la maîtrise soucieuse du produit qu’installe Thibaud Durix dans ses assiettes de grès. Avec deux entrées, deux plats et deux desserts, au choix, le menu (29 €) est l’un des meilleurs rapports qualité-prix de l’aire toulonnaise. taboulé de chou-fleur et fromage de chèvre frais, siphon betterave et tuile dentelle au curry, quasi de veau à la tendreté parfaite avec palets de polenta à la marjolaine, purée de butternut et cèleri rave confit, poire pochée à l’hibiscus, crémeux vanille et gelée de rose, au délicat sucré… Cette cuisine en solo sonne juste. Un vrai coup de coeur !
(Photos J.G)
Monaco: Bagatelle
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Recommandé par Jacques Gantié
Après New York, où l’enseigne a été créée en 2007, Saint-Tropez, Dubaï, Miami et Rio, Bagatelle s’est installé au printemps 2017 dans le carré d’or de la place du Casino à Monaco, Galerie Charles III. Et c’est Rocco Seminara, talentueux chef d’origine calabraise, qui a pris la direction de la cuisine. Sur une carte d’inspiration méditerranéenne , le poulpe rôti et «millefeuille» de champignons-pommes de terre est devenu signature. On aime aussi le gourmand-paysan de la casareccia aux cèpes, le carpaccio de Saint-Jacques et radicchio confit, les petites ravioles «Al Pin» aux herbes, la selle d’agneau des Alpes rôtie à la sarriette, le millefeuille vanille au fin croustillant. Rocco Seminara a un style bien à lui, graphique, multicolore, raccord avec le décor qui va de la galerie-terrasse à la salle théâtrale et baroque ponctuée d’art contemporain, à la cave « secrète » mais bien pourvue. Bagatelle prouve qu’on peut bien déjeuner ou dîner à Monaco sans se ruiner , avec une table qui varie les plaisirs de midi jusqu’après minuit. Sans oublier le brunch du dimanche matin qui n’est pas… une bagatelle.
Cannes : Noisette
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(Photo Franz Chavaroche)
Par Jacques Gantié
Connaissez-vous le bleu Noisette ? Couleur tendre, pas vraiment de trattoria, plutôt boutique gourmande. Chaises bleues, banquettes roses, baies grandes ouvertes et terrasse sur la rue, c’est le nouvel « italien » de Cannes, créé par Alice et Silvio Nocella, venus de Ligurie. Alice travaillait dans le tourisme, Silvio dans la finance. Ils ont l’envie, la fraîcheur et parlent de leur passion pas de leur cursus étoilé. À Camporosso, dans le Val Nervia, arrière-pays de Vintimille, ils tenaient table et chambres d’hôtes dans une ancienne maison de facteur, avant de choisir Cannes, entre Croisette et rue d’Antibes.
Accueil à l’italienne – Alice et Leila -, recettes qui vous changent de tant d’adresses de pasta et, côté suggestions (19€), du cousu main. Buongiorno aux raviolis à la ricotta, zeste d’orange, sauce de tomates cerises… Aux tagliatelles aux olives, pistou de tomates séchées et amandes… C’est clair, bon, parfumé, copain avec l’huile d’olive Taggiasca du domaine familial, au goût d’amande. Noisette est ouvert du cappuccino matinal à l’heure du thé, au déjeuner et au dîner. Au-delà des antipasti et plats classiques – assiettes de jambon de Parme, spaghettis bolognaise… – Silvio cuisine authentique et local. Il conte avec ferveur les raviolis pincés – co u pesigu du Val Nervia – farcis de blettes, viande et aromates selon la recette de Buggio, ou de pommes de terre et fromage comme à Castelvittorio, gardien de la cucina bianca des bergers et de la transhumance. Et les chitarronis romains aux trente jaunes d’œuf, comme d’étroites tagliatelles découpées à la mandoline – mieux, la chitarra – servies avec pecorino et poivre noir de Madagascar… Émotion, terroir, vérité.
Côté dessert, celui de Silvio, à l’orange, le fruit juteux recouvert de zestes confits, cage dorée de caramel filé, est tout en délicatesse. Envie d’emporter quelques prodotti ? Alors prenez sur l’étagère bleue les artichauts violets de Perinaldo, conservés dans l’huile d’olive, ou le thon rouge de Carloforte (Sardaigne)… Noisette, jolie Noisette, raconte-nous encore ton Italie !
Nice : étoiles à emporter
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Par Philippe DUPUY
Le confinement et les mesures de fermeture sanitaire ont contraint les restaurateurs à s’adapter pour survivre . Plutôt que de laisser leur cuisine en friche pendant de longs mois, beaucoup ont opté pour le click & collect et/ou la livraison à domicile. Même les chefs étoilés s’y sont mis ! Mais peut-on vraiment retrouver l’expérience d’un restaurant gastronomique dans sa propre salle à manger ? C’est ce que nous avons voulu savoir en allant toquer à la porte de l’unique deux étoiles de Nice, Flaveur, rue Gubernatis. Les frères Gaël et Mickaël Tourteaux ont, en effet, décidé de se lancer dans la livraison à domicile après le premier confinement : « On y est allé sur la pointe des pieds sans trop savoir ce que ça allait donner, raconte Mickaël. Mais on a été agréablement surpris : la clientèle a répondu présent tout de suite. Pour les fêtes, on a même dû refuser des dizaines de commandes« . « C’est presque un nouveau métier, poursuit son frère Gaël. Il a fallu tout inventer : à commencer par le packaging qu’on a fait fabriquer sur mesure par un fournisseur du quartier« . Les Tourteaux ont fait le choix de livrer eux mêmes les commandes et de présenter les menus déjà dressés, en assiette. « Il a fallu adapter notre cuisine, reconnaît Gaël, car certains plats ne pouvaient pas être transportés tels quels. Mais l’idée est quand même d’offrir une prestation digne du restaurant« .
Flaveur propose 3 menus à emporter ou à livrer : Inspiration (3 services 75 €), Exploration (4 services 100 €) et Toutes latitudes (5 services 125€). On s’est laissé inspirer par le premier : Truite du Cian confite de Remi Callonico/ suc de crustacés/ paprika fumé/rougail d’aubergines. Mérou et crevette de Méditerranée de la pĉhe de Steve Molinari/ Cassolette d’Automne de Roveja/ Jus de pétoncles. Grosse prune d’hiver semi-confite/Montecato aux noix fraiches et huile d’argan/café. Le tout livré dans un superbe sac de papier kraft, avec le pain, des croutilles de polenta pour l’apéro et un bel assortiment de mignardises (chocolat Dulcey, pâte de fruits mangue papaye, crème citron pépites de chocolat au thé mattcha, caramels mous…). Pour le vin, Flaveur renvoie sur le caviste du quartier : « Pas question de faire de la concurrence ou de charger l’addition. La période est difficile pour tout le monde » estime Gaël. Lui et son frère cuisinent le matin et livrent l’après midi pour le repas du soir : « On a des habitués chez qui on va plusieurs fois dans le mois, d’autres qui nous commandent pour une occasion particulière et certains qui en profitent pour s’offrir un gastro à moindre coût. Beaucoup n’étaient jamais venus au restaurant. On espère que cela leur donnera envie d’y venir quand on réouvrira… « . Au passage, les Tourteaux donnent de vive voix les conseils de cuisson et de présentation qui figurent sur le mode d’emploi personnalisé, imprimé et mis sous enveloppe dans le sac de livraison : « Plus encore que le pourcentage de chiffre d’affaires que cela représente, c’est de garder le lien avec la clientèle qui importe, constate Gaël. Et ça fait du bien au moral dans ces temps difficiles » .
C’est pas tout ça, mais il va falloir passer à table ! On déballe le menu avec précaution et on étale tout sur le plan de travail. Mine de rien, pour deux personnes, cela fait une quarantaine de petits bocaux plastiques, d’assiettes et de sachets. C’est déjà un régal des yeux. La truite du Cian, en entrée, se déguste froide, avec son suc de crustacés. Le rougail d’aubergine, qui l’accompagne, est une merveille. Il adoucit les saveurs du poisson et des crustacés. On passe ensuite au mérou et crevette qui doit être réchauffé au four, 20 minutes pendant que la cassolette et le jus de pétoncle mijotent à la casserole. Cela suffit pour se prendre pour un chef étoilé devant sa plaque de cuisson. Après ça , on dispose les Roveja et le jus de pétoncle sur le poisson avec le geste assuré d’un Bocuse et on sert sans traîner. Au dessert, la prune semi confite glisse sans souci. Verdict : on s’est régalé ! La cuisine des Tourteaux est toujours aussi inventive et puissante en goût. Et plus copieuse qu’il n’y paraît : on aurait presque pu manger à deux sur un seul menu. Même si rien ne remplace le service en salle, la formule offre effectivement une expérience culinaire digne d’un restaurant gastronomique. Pendant la fermeture sanitaire, faites-vous une f(l)aveur : mettez des étoiles dans votre vie !
Hyères : Chez Lulu
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(Photo Franz Chavaroche)
Par Jacques Gantié
Provence ou Toscane ? A l’orée de la vieille ville de Hyères, porte du Fenouillet, Chez Lulu invite simplement l’Italie. Saveurs, produits, malice, atmosphère… on connaît les ingrédients d’une trattoria réussie, qu’on soit près de Florence, dans les Pouilles, au Piémont, en Ombrie ou Ligurie. Il y a tout cela, la foi autodidacte en plus, dans le restaurant ouvert il y a six ans par Lucienne Ferrer et Jean-Etienne Parrocel. Un amour de bouchon – quinze places, per piacere, réservez ! – épatant pour goûter, rire, trinquer ou lier connaissance. Dans ce théâtre au décor d’ancienne triperie avec vitrine, banquettes, lustre et tentures, étagères de pâtes artisanales et vins italiens, Jean-Etienne Parrocel cuisine en artisan de la pasta, Lulu sert, anime et commente l’inspiration du jour écrite sur papier quadrillé, comme à l’école. On a faim et soif d’apprendre ! Pour réviser l’art de la cuisine povere, voici les jambons de Parme de Gianferrari à Canossa, la porchetta toscane de Dario Cecchini, sur les terres du Chianti, les pâtes aux courgettes à la napolitaine, la cima genovese (viande de veau farcie de légumes et pignons), les raviolis citron-ricotta et speck du Piémont, les délicieuses mafaldine, comme des petites lasagnes, aux cèpes et gorgonzola, les saucisses perrugine à la polenta, les orechiette des Pouilles, anchois et brocolis, la caponata sicilienne, compotée d’aubergines. Et le tiramisu-fraise, et le flan à l’orange ! Cette collection à géométrie saisonnière puise à la source des régions d’Italie, les vins ont corps et âme – l’Amarone della Valpolicella ! -, les pâtes changent au fil des jours et, comme il se doit, l’important est autant le produit et la cuisson que la sauce. Et Lulu ? Dans la salle piccola ou sur la terrasse-soleil, son timbre et son tonus vous changent des humeurs en berne. Tout à côté, le Frigo de Lulu, boutique-épicerie aux produits et vins bio de la botte, ouvre son étal quotidien aux formules midi et plateaux de charcuteries (10 à 12 euros) ou à l’aperitivo de fin de semaine. Même esprit, même légèreté, même produits… la fête !