Thomas Dutronc : Frenchy
Le coup des reprises jazzy, en français ou en anglais, on nous l’a déjà beaucoup fait. Ce n’est pas forcément signe de bonne santé créative et généralement, on regrette plutôt les originaux. Le nouvel album de Thomas Dutronc est l’exception qui confirme la règle. Cela tient au talent personnel de l’artiste, à sa manière , à la fois pro et détachée, d’envisager l’exercice, au choix des chansons (mélange de classiques anglais et français) et à celui des musiciens et des guests . Le casting des duos est assez fabuleux : Iggy Pop et Diana Krall sur « C’est si bon » , le ZZ Top Billy Gibbons sur « La Vie en rose », Youn Sun Nah sur « Playground Love », Stacey Kent sur « Un homme et une femme », Jeff Goldblum sur « La Belle vie », Haley Reinhart sur une sublime relecture en duo anglophone de « Ne me quitte pas »… Classe ! Les orchestrations restent dans l’esprit des originaux avec une touche manouche pour les guitares et un côté easy listening pas désagréable du tout. Le timing de sortie, bien que bousculé par le Covid, n’est pas mal non plus: Frenchy a tout pour devenir un must des longues soirées d’été. En attendant la tournée dont le fils Dutronc a donné un avant goût lors d’un superbe live stream depuis l’Observatoire de Nice.
Neil Young: Homegrown
En 1975, profondément déprimé par une rupture amoureuse Neil Young enregistre un album intitulé Homegrown qui ne verra pas le jour. Trop intime, trop douloureux… Le Loner préfère livrer à sa maison de disques Tonight’s the Night, un enregistrement effectué dans les conditions du live… Encore plus triste ! 45 ans plus tard, remettant ses archives à jour, Young décide de publier Homegrown tel qu’il l’avait abandonné. Une aubaine pour les fans qui retrouvent l’inspiration et le son folk de la trilogie impériale After The Gold Rush/Harvest/On The Beach. Guitares acoustique, slide, piano, harmonica et cette voix juvénile et haut perchée… Que du bonheur ! Sauf que Homegrown est un disque inachevé. La plupart des chansons sont plus des démos que des titres définitifs. Beaucoup n’atteignent pas 3 minutes et se terminent en fade out, genre « on finira plus tard ». « We Don’t Smoke It No More » est une jam blues instrumentale, dans « Florida » Young parle sur fond de larsen, sur « White Line » le guitariste semble chercher les meilleures notes pour un solo… Seules « Separate Ways » et « Homegrown » sont suffisamment abouties pour se mesurer à ses classiques de l’époque. Cela donne un album inabouti, peu homogène, sans véritable ligne de force. Un chouette cadeau pour les fans mais, hélas pas le chef d’oeuvre oublié qu’on espérait sans trop y croire.
Bob Dylan : Rough and Rowdy Ways
Par Philippe DUPUY
A presque 80 ans, Bob Dylan s’est offert son premier numéro 1 au Billboard avec « Murder Most Foul« , immense ballade historico-sociologique sur l’assassinat du président Kennedy (mais pas que), sortie pendant le confinement. Le titre constitue la pièce maitresse de son nouvel album, le premier composé de chansons originales depuis l’excellent Tempest, il y a huit ans. Moins puissant que ce dernier, moins essentiel que Modern Times, son dernier chef d’oeuvre daté de 2006, Rough and Rowdy Ways n’en est pas moins un trés bel album. Celui d’un vieux chanteur qui connaît son American Songbook sur le bout de ses doigts et peut se permettre de chanter le blues comme Howling Wolf (« False Prophet », « Goodbye Jimmy Reed« ) , de flirter avec le jazz et la comédie musicale (« My Own Version of You », « Black Rider », « Crossing the Rubicon ») , de se moquer de son statut d’icône de la contre culture (« False Prophet« ) et de confesser ses contradictions (« I Contain Multitudes« ) sans se trahir, ni céder à la facilité. Il n’a pas volé son Prix Nobel de littérature. Est-ce que ça intéressera les fans de Beyoncé et Jay-Z ? Non, bien sûr. Est-ce qu’on courra l’acheter le jour de sa sortie, comme on le faisait jusqu’à Slow Train Coming (1983) ? Probablement pas (le streaming n’est pas fait pour les chiens, non plus). N’empêche : à 79 ans, Bob Dylan reste inspiré, pertinent et productif : le Pablo Picasso du rock. Et Rough and Rowdy Ways est un chouette disque à écouter la nuit.
Rock’n’Roll Show
En 1990, Dick Rivers, Francis Cabrel et un groupe de musiciens baptisé Les Parses donnent au Bataclan une série de concerts, suivie d’une discrète tournée dans de petites salles. Le répertoire est composé à 100% de classiques du rock que Cabrel et Dick Rivers interprètent à tour de rôle. Ca va de « Roll Over Beethoven » à « Mystery Train » en passant par « Summertime Blues« , « Good Golly Miss Molly » ou « Memphis Tennessee« . Tout est joué dans l’esprit des originaux, l’énergie et le plaisir de jouer ensemble sont palpables. Les spectacteurs n’en reviennent pas de voir Francis Cabrel jouer les rockers et savourent le plaisir d’écouter Dick Rivers chanter ses chansons favorites avec un backing band idéal. Et puis les deux hommes reprennent le cours de leurs carrières respectives et, à part ceux qui y ont assisté, tout le monde oublie ces concerts joyeux. Il a fallu la mort de Dick pour que Denys Lable, le guitariste des Parses (et de Cabrel), se souvienne qu’il avait gardé les bandes enregistrées des concerts du Bataclan et une VHS du show. Rencontré à l’enterrement du rocker Niçois, Cabrel a donné son accord pour les sortir, en hommage à son camarade disparu. Et voilà le coffret dans les bacs : on y découvre un Cabrel chanteur de rock à la voix presque méconnaissable et au jeu de guitare affuté. Dick Rivers chante divinement, le groupe assure, les titres défilent comme à la parade du 4 juillet. C’est bon de retrouver Dick en si bonne forme et en si belle compagnie. Seul bémol, le son n’est pas terrible. Le disque aurait mérité une production plus fastueuse, mais on est déjà contents qu’il existe.
Sébastien Tellier: Domesticated
Depuis « Biarritz en été » (2012), le nouvel album estival de Sébastien Tellier est attendu comme l’ouverture des plages statiques. Avec son nouvel effort, le Didier Raoult de la french touch ne déçoit pas : Domesticated sera bien un des disque de l’été 2020. Les nappes de synthés et la voix vocodée appellent irrésistiblement au farniente, aux apéros piscine et à sortir le bateau. Si on voulait aller un peu plus loin dans l’analyse (mais il fait déjà trop chaud pour ça), on pourrait trouver l’ensemble (8 titres) un peu répétitif et paresseux. Légèrement indigent aussi niveau textes qui, comme le titre de l’album l’indique, vantent les joies de la vie domestique. Possible héritier de Christophe, Tellier est dans le Beau, mais il lui manque le Bizarre pour être au niveau du créateur d’Aline et des Mots Bleus.
Hoshi : Soleil Levant
Paru en sortie de confinement, le deuxième album d’Hoshi cartonne dans les bacs et en streaming. C’est justice, car il est excellent. Meilleur que son prédécesseur, Il suffit d’y croire , paru en 2017, parce que plus mature, plus personnel, plus engagé aussi. Et quasi visionnaire si on s’en tient aux paroles d' »Enfants du danger » (« Il nous faudra des masques/Mais pas pour s’déguiser/Ca restera sur notre face/Pour pouvoir respirer« ). Pas la meilleure chanson du disque, mais de circonstance. Dans le reste de l’album, Mathilde Gerner chronique sa vie, ses amours, ses emmerdes et ses engagements de jeune femme des années 2020. Le moindre n’étant pas celui contre l’homophobie. « Amour censure« , avec lequel elle a réveillé les Victoires de la musique, est probablement sa meilleure chanson : un véritable hymne à l’amour qui transcende les genres. Musicalement comme au niveau des textes, Hoshi confirme avec cet album qu’elle est le pendant féminin d’Eddy de Pretto. Ces deux-là sont ce que la chanson française a produit de meilleur ces dernières années.
Gloria Mundi
Le Pitch
Daniel (Gérard Meylan) sort de prison où il était incarcéré depuis de longues années et retourne à Marseille. Sylvie (Ariane Ascaride), son ex-femme, l’a prévenu qu’il était grand-père : leur fille Mathilda (Anaïs Demoustiers) vient de donner naissance à une petite Gloria. Le temps a passé, chacun a fait ou refait sa vie… En venant à la rencontre du bébé, Daniel découvre une famille recomposée qui lutte par tous les moyens pour rester debout…
Ce qu’on en pense
Le compagnonnage politique et cinématographique qu’entretiennent depuis des lustres l’anglais Ken Loach et le marseillais Robert Guédiguian n’a peut-être jamais été aussi évident que dans leurs derniers films.Sorry We Missed You et Gloria Mundi dénoncent tous les deux l’uberisation de la société, cette nouvelle incarnation du capitalisme, qui conduit les ouvriers à troquer leurs droits sociaux si chèrement acquis contre l’illusion d’un auto-entreprenariat triomphant. Mais là où Ken Loach fait de ses héros de pures victimes du système, Guédiguian, dans ce qui est sans doute son film le plus noir depuis La ville est tranquille, montre qu’ils en sont aussi les complices : « On sait que le système a gagné quand les opprimés adoptent le discours des opprimeurs » nous dit en substance Gloria Mundi. Et c’est effectivement ce que font presque tous les personnages du film. A commencer par Mathilda (Anaïs Demoustier), jeune maman qui n’arrive pas à garder un boulot et qui comprend parfaitement que sa patronne la licencie (« C’est ce que je ferais si j’avais une employée comme moi »). Aurore (Lola Naymark), sa demi-sœur, qui croit avoir réussi parce qu’elle tient une boutique de dépôt-vente avec son mari Bruno (Louis Leprince-Ringuet), n’en veut d’ailleurs pas comme vendeuse. Bruno, lui, monnaye sans vergogne une vague promesse d’embauche contre du sexe, pendant que Nicolas (Robinson Stevenin), le mari de Mathilda chauffeur de VTC, se fait casser la gueule par des taxis… Bonjour l’image de la jeunesse ! Mais leurs parents ne valent pas beaucoup mieux. Le père d’Aurore (Jean-Pierre Darroussin) laisse faire sans rien dire et sa femme Sylvie (Ariane Ascaride, primée à Venise pour ce rôle) refuse désormais de faire grève avec ses collègues pour améliorer son sort de technicienne de surface. Tous ont de bonnes raisons et on ne leur en veut pas (à part pour Bruno, le méchant de l’histoire). Mais, alors que le film s’ouvre sur une promesse d’avenir (la naissance de Gloria), le constat d’échec est terrible pour le vieux militant qu’est Robert Guédiguian. Heureusement, il y a Daniel (Gérard Meylan, plus christique que jamais) qui, après de longues années d’emprisonnement, découvre ce nouveau monde avec effarement. Son sacrifice rachètera peut-être leurs fautes, à défaut de changer le cours des choses. Ainsi passe la gloire du monde ouvrier… Et demeure celle de Robert Guédiguian, qui signe ici un de ses plus beaux films.
Interview : Robert Guédiguian
Après une parenthèse nostalgique (La Villa), Robert Guédiguian revient au combat avec Gloria Mundi, son film le plus noir depuis La Ville est tranquille (2000). Comme son vieux compagnon de route anglais Ken Loach avec Sorry, We Missed You, le cinéaste marseillais traite de l’ubérisation de la société, mais sur un mode encore plus désespéré: « On sait que le système a gagné quand les dominés adoptent le discours des dominants» constate-t-il amer. C’est exactement ce que font les protagonistes du film, à commencer par les plus jeunes qui, pourtant, devraient représenter l’espoir en l’avenir…
Vous deviez réaliser une comédie et vous livrez votre film le plus désespéré. Qu’est-ce qui vous a fait changer votre fusil d’épaule?
Une série de revers électoraux, de déceptions politiques, de grèves qui échouent… J’ai commencé à écrire après les européennes et j’ai rapidement eu le sentiment que le moment était mal choisi pour faire une comédie. Il fallait plutôt essayer de voir pourquoi ça ne marche plus. Expliquer pourquoi, il n’y a plus d’unité possible. Parce que le discours dominant, l’individualisme, a submergé les dominés, ceux qui en sont le plus victimes. Dès lors, le registre du film noir s’imposait.
Le mouvement des gilets jaunes ne contredit-il pas le pessimisme du film?
Si j’étais vraiment pessimiste, je ne ferai plus de films. Intervenir comme je le fais, est bien la preuve que je pense encore que les choses peuvent changer . Il faut juste continuer à dénoncer, en espérant réveiller les consciences. Le mouvement des gilets jaunes était porteur d’espoir et il l’est encore, malgré les casseurs et les extrémistes. Mais je ne crois pas qu’on puisse aboutir à quelque chose de concret sans leaders, ni organisation. Sinon, c’est juste une révolte ponctuelle, une jacquerie. Pour qu’une action soit cohérente et permanente il faut une structure, c’est ce qui manque au mouvement. Mais je garde espoir : ce qui se passe à l’hôpital, où les mandarins descendent dans la rue avec les aides soignantes, c’est une grande première. Et le peuple est avec eux. On va voir ce qui se passe le 5 décembre…
Les jeunes n’ont pas le beau rôle dans le film…
Non, c’est sûr. Ils ont totalement absorbé le discours libéral. Ils ne croient plus en rien, ne sont ni politisés, ni idéologisés, ni conscientisés et se bouffent le foie entre eux. Mais j’ai pris garde de montrer que leurs parents ne sont pas reluisants non plus. Elle a baissé les bras et ne croit plus dans la lutte et lui conduit son bus sans rien dire. Je ne voulais pas opposer les générations, mais montrer au contraire qu’ils sont tous victimes du système.
Pour filmer cela, il fallait quitter l’Estaque ?
Oui. On a filmé dans les nouveaux quartiers de Marseille qu’on n’a pas encore beaucoup vu au cinéma : la Joliette Euroméditerranée… Ils représentent le monde nouveau. L’ancien est resté au bout de la ligne du bus que conduit Jean-Pierre (Daroussin N.D.L.R), vers l’Estaque…
Le personnage de Gérard Meylan a une dimension christique. Le religieux est de plus en plus présent dans vos films, on dirait…
J’avais besoin du regard de quelqu’un qui vient du monde ancien et qui n’a pas vécu ces changements. Il sort de prison, pour moi c’est plutôt Jean Valjean que le Christ. Mais c’est vrai qu’artistiquement la figure du Christ est omniprésente. Depuis toujours, je suis influencé par la religion, mais qui ne l’est pas ? Cela fait partie de notre culture. On peut interpréter les évangiles sans croire en Dieu : c’est mon cas. Mais on peut croire et penser en même temps, ce n’est pas antinomique. Il faut bien croire en quelque chose : qu’un autre monde est possible sur Terre, en ce qui me concerne. La religion, c’est juste une manière que l’humanité a de se raconter à elle-même.
Le film a été présenté à Venise et c’est Ariane qui a eu le prix : pas trop jaloux ?
C’est profondément injuste, c’est sûr (rires). Mais c’est elle qui représente le mieux l’oeuvre collective. Elle est notre porte drapeau. Le cinéma ce sont d’abord les acteurs. C’est pour cela que le prix d’interprétation est toujours le plus beau.
Anaïs Demoustier, Grégoire Leprince-Ringuet et Robinson Stevenin portent désormais votre cinéma aux cotés des anciens. Preuve qu’on peut quand même avoir foi en la jeunesse ?
Mais oui bien sûr ! Il y a des jeunes qui réfléchissent et qui se battent. C’est juste que ce n’était pas l’objet du film. Quand je les regarde mes enfants de troupe, comme je les appelle, je n’en reviens pas. Ils ont adopté la charte, les codes, la déontologie, tout. Ils sont super !
Prochain projet ?
Je pars au Sénégal tourner un film qui est censé se dérouler au Mali dans les années 60. Je me suis inspiré des photos de Malick Sidibé pour essayer d’imaginer la vie d’un couple de jeunes danseurs qu’on voit sur l’une d’elles. Ça se passe dans une période d’effervescence politique, où on essayait d’inventer un socialisme pan africain le jour et où on faisait la fête la nuit. Je sors un peu du chemin, mais pas complètement, vous voyez (rires)
Star Wars: L’Ascension de Skywalker
Le pitch
L’empereur Palpatine menace à nouveau la galaxie. Il va convaincre Kylo Ren de le rejoindre. Rey et ses amis vont tenter de faire barrage à leurs plans machiavéliques…
Ce qu’on en pense
La deuxième trilogie (dite prélogie), nous avait laissé entre indifférence et accablement. Le début de la troisième (Le Réveil de la Force et Le Dernier Jedi) réussissait tout juste à remuer quelques vieux souvenirs. On n’attendait donc pas de miracle du final annoncé à l’épisode N°9 (L’Ascension de Skywalker). Au début, un effort est nécessaire pour se souvenir de l’intrigue et des différents personnages de la nouvelle trilogie. Pour Rey (Daisy Ridley, enfin héroïque) et Kilo Ren (Adam Driver, idem), c’est facile : ce sont les nouveaux Luke et Dark Vador. Mais Poe Dameron (Oscar Isaac) et Finn (John Boyega) n’impriment toujours pas la mémoire. La Princesse Leia, on la croyait morte en 2016 avec son interprète, la regrettée Carrie Fischer. Apparemment, elle vit encore. Miracles du numérique ! Tout comme l’Empereur Palpatine (Ian McDiarmid), qui, lui aussi, a ressuscité. Normal : c’est le méchant de l’histoire depuis le début. C’aurait été dommage de s’en priver. Les vétérans Luke (Mark Hamill) et Han Solo (Harrison Ford) sont de la fête aussi, mais sous forme ectoplasmique. C3-PO et R2-D2 ne vieillissent pas (c’est normal, ce sont des robots) , Chewbacca a un nouvel interprète (mais ça ne se voit pas) et le Faucon Millenium vole toujours dans l’hyper espace. Tout est donc en place pour le grand final. On voit venir à des années lumières la bataille galactique géante et la révélation de nouveaux liens entre Rey, Kylo Ren et l’Empereur. Ça ne loupe pas, évidemment. L’ image et le son sont grandioses : en salle Dolby 3D l’effet « Grand Huit » est maximal. Rien à redire : J. J. Abrams a fait du bon boulot côté réalisation. Plus étonnant, le scénario est excellent. Il retisse avec habileté tous les liens tendus par les 8 films précédents, suscite l’émotion et parvient à synthétiser le message philosophique de la saga. Car il y en a un, et même plusieurs. On résume : un Homme vaut tous les autres. Quel que soit son talent ou son pouvoir , il n’est rien s’il est seul. La famille -même recomposée- est à la base de tout et la femme est l’avenir de l’Homme... A la fin, avouons-le, on a versé une petite larme. Pas parce que c’était le dernier épisode (d’autres Star Wars sont en préparation. Disney ne va pas tuer la poule aux œufs d’or), mais parce que le film est si bon qu’il revalorise, a posteriori, toute la saga et nous donne raison de l’avoir adorée.
Lady Gaga : Chromatica
Entre ses exploits au cinéma (A Star is Born) et ses expériences jazzy avec Tony Benett, on avait un peu perdu Lady Gaga. Surprise : la scream queen est de retour avec Chromatica, qui pourrait être l’album du déconfinement si les boites de nuit réouvrent. Un pur disque de dance, que la Lady a concocté avec Ariana Grande et qui renvoie à ses premiers tubes. Les Little Monsters orphelins de leur maman peuvent se réjouir : Gaga is back ! Côté look, elle n’a pas ressorti la robe en viande, mais le body en plastique rose lui va aussi bien au corps. Côté musique, les seize (16 !) titres s’enchaînement sans temps mort… Mais sans gros tube non plus, à part peut-être « Rain on Me » avec Ariana Grande ? Chromatica est un album plutôt fait pour la scène. Espérons que Lady Gaga pourra tourner avec rapidement, sinon ces chansons auront du mal à passer l’été…
Iggy Pop : The Bowie Years
En 1976, alors que sa carrière fait eau de toutes parts après l’échec commercial de Raw Power, la séparation des Stooges et son addiction à l’héroïne, Iggy Pop est pris sous son aile par David Bowie qui l’amène à Paris et Berlin enregistrer un nouvel album. Pendant que les punks pillent son répertoire et plagient ses performances scéniques, Iggy invente le post-punk sous l’influence de Bowie. A sa sortie en 1977, The Idiot prend les fans des Stooges à rebousse-poil : c’est quoi ce son robotique ? Ces chansons qui s’étirent salement ? Ce look de Noureev rhabillé par Kraftwerk ? L’année suivante Lust For Life enfonce le clou : Iggy a viré növö, selon l’expression inventée par Yves Adrien. Heureusement, les concerts continuent d’être le sabbat punk originel. Même quand Bowie se cache derrière les claviers, Iggy déchire. L’album live TV Eye, au son brut de décoffrage, réconcilie tout le monde. On a remisé les boites à rythmes et les chansons des Stooges sont mises en avant. La querelle des anciens et des növös est noyée sous un déluge de décibels. Sacré « parrain du punk », Iggy a réussi la relance de sa carrière. Aujourd’hui, The Idiot et Lust for Life sont considérés comme ses deux chefs d’oeuvre solo. Et Universal en profite pour sortir un copieux coffret de 7 CDs intitulé The Bowie Years. On y trouve les 3 albums précités, honnêtement remastérisés, 1 Cd de versions alternatives plus ou moins intéressantes des chansons de The Idiot et Lust for Life et 3 CDs des concerts de la tournée (Londres, Cleveland, Chicago) qui constituent, évidemment, la cerise sur le gâteau pour les fans. Hélas, le son n’est pas meilleur que celui de TV Eye (même plutôt pire) et les setlists se répètent à l’identique d’un CD à l’autre (« Raw Power » en intro, « China Girl » en clôture), sans que les versions diffèrent vraiment. Mais le package est joli. A vous de voir si cela justifie d’y investir 72 euros.
Brooklyn Affairs
Le Pitch
New York dans les années 1950. Lionel Essrog (Edward Norton), détective privé souffrant du syndrome de Gilles de la Tourette, enquête sur le meurtre de son mentor et unique ami Frank Minna (Bruce Willis). Grâce aux rares indices en sa possession et à son esprit obsessionnel, il découvre des secrets dont la révélation pourrait avoir des conséquences sur la ville de New York… Des clubs de jazz de Harlem aux taudis de Brooklyn, jusqu’aux quartiers chics de Manhattan, Lionel devra affronter l’homme le plus redoutable de la ville pour sauver l’honneur de son ami disparu. Et peut-être aussi la femme qui lui assurera son salut…
Ce qu’on en pense
Déjà, un détective privé souffrant du syndrome de Gilles de la Tourette, ça intrigue ! Si, en plus, c’est Edward Norton qui l’incarne… Seul capable de voler la vedette à Brad Pitt (Fight Club), Norton a mis sa carrière d’acteur en stand-by pour réaliser ce film qui lui tenait vraiment à coeur. Sur un scénario inspiré du roman de Jonathan Lethem (Motherless Brooklyn), au son d’une BO qui mixe Miles Davis et Radiohead, dans une reconstitution du New York des années 50 aux petits oignons et avec un casting en or (Edward Norton, Willem Dafoe, Bruce Willis , Alec Baldwin), Brooklyn Affairs résonne comme un Chinatown New-Yorkais. Les amateurs de polars à l’ancienne ne doivent surtout pas le manquer.
David Bowie : LiveAndWell
Même mort depuis 4 ans, David Bowie n’en finit pas de nous enchanter. Après la sortie d’un album de reprises acoustiques de quelques unes de ses chansons pendant le confinement (ChangesNowBowie) et en attendant la sortie imminente d’un trio d’albums en public, le Thin White Duke lâche sur les plateformes de streaming un live inédit de 12 titres enregistrés lors du Earthling Tour 1997. Auparavant réservé aux abonnés de BowieNet, l’album intitulé LiveAndWell s’enrichit dans sa version streamée de deux titres bonus: “Pallas Athena”, et “V-2 Schneider”, provenant d’un concert au Paradiso d’Amsterdam, donné le 10 juin 1997. Le groupe est celui de la tournée Earthling ( Zachary Alford à la batterie, Gail Ann Dorsey à la basse, au chant et aux claviers, Reeves Gabrels aux guitares, aux synthétiseurs et au chant, et Mike Garson au piano, aux claviers et aux synthétiseurs) et le répertoire mélange les titres de 1-Outside et d’Earthling. Les concerts de cette période ont laissé un souvenir marquant à ceux qui, comme nous, ont eu la chance d’y assister. Bowie y laissait éclater sa passion pour l’art contemporain, le theâtre No, la musique industrielle et la drum and bass qui accompagneront jusqu’à la fin ses créations. Aucun live officiel n’ayant été publié à l’époque, ce LiveAndWell est un vrai cadeau pour les fans.
Parcels: Live Vol 1
Par Ph.D
Imaginez cinq australiens qui n’auraient écouté que l’album de Daft Punk Random Access Memories durant leur enfance. Au moment d’enregistrer leur premier album éponyme en 2017, après quelques singles totalement inspirés par leur groupe fétiche (« Myenemy », « Older », « Gamesofluck » et surtout « Overnight » produit par les Daft), le groupe de Jules Crommelin tenta de prendre un peu de distance, en lorgnant plus du côté de Metronomy ou de Phoenix. Bon disque mais succès mitigé. D’où, sans doute, l’idée d’un retour aux bases disco funk de RAM, avec ce live in studio dans lequel les Parcels revisitent leur répertoire sans renier cette fois leur influence majeure. Divine surprise : ce Live Vol 1 copieux (18 titres) est la meilleure chose qui soit arrivée au printemps 2020 : léger et dansant comme une bulle de savon s’envolant sur la promenade des Anglais, c’est déjà notre disque de l’été. Vivement le volume 2 !
Other Lives: For Their Love
Originaires de Stillwater (la patrie de Garth Brooks) dans l’Oklahoma, les Other Lives se sont créés, en deux albums, une base de fans passionnés qui voient en eux le parfait croisement de The National et de Neil Young. Leur folk hantée et orchestrale trouve son plus bel exutoire dans ce troisième album aux compositions plus carrées, qui devrait leur permettre d’étendre leur audience au-delà du premier cercle de fans. Les chansons de Jesse Tabish sont magnifiées par des arrangements mirifiques qui mèlent guitares piano, cordes et choeurs célestes pour toucher au sublime. For Their Love est un de ces albums dont on sait d’emblée qu’on mettra des années pour en faire le tour, sans jamais en épuiser les charmes. Si vous ne nous croyez pas, écoutez seulement « Lost Day » : vous n’aurez pas perdu votre journée.