Ça vient de sortir

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Interview : Robert Guédiguian

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Avec La Villa, Robert Guédiguian revient à la source de son cinéma, réinstallant sa troupe (Ariane Acaride, Jean, Pierre Darroussin, Gérard Meylan, Jacques Boudet…) dans la calanque de Méjean, où il tournait en 1985 une scène de Ki Lo Sa? reprise dans le film… L’occasion de parler du temps qui passe, mais aussi du présent, avec l’irruption de réfugiés. Et peut-être d’avenir, puisque ces migrants sont des enfants. Tous sujets dont le réalisateur Marseillais de 63 ans, ragaillardi par son passage au jury de Cannes (aux côtés de Cate Blanchett, Denis Villeneuve et Andrey Zvyagintsev),  nous a entretenu avec passion autour d’un excellent déjeuner parisien…

La calanque de Mejean c’est un peu, avec l’Estaque, la matrice de votre cinéma, non?

Oui, parce qu’elle se situe du côté des quartiers populaires, à vingt minutes de l’Estaque, sur la Côte Bleue. Ce n’est pas un endroit touristique comme celles de Cassis, par exemple. J’y suis venu pour la première fois en 1968, c’était presque inaccessible et ça n’a pas changé depuis.L’hiver c’est désert. Du coup, on s’en est servi comme d’un studio.On a fermé l’accès, loué toutes les maisons, repeint les façades, viré quelques bateaux, tiré des câbles et emménagé quatre décors intérieurs où il suffisait d’allumer la lumière pour pouvoir tourner à tout moment.On a habité sur place, techniciens et acteurs réunis, pendant toute la durée du tournage. On avait une cantine, un cuistot, un bateau pour aller pêcher du poisson… Tous les poissons que vous voyez dans le film, on les a mangés. C’était génial.Alors qu’on tournait en extérieurs, on avait l’impression de faire un film en studio!

Cette calanque n’est pas qu’un décor…

Non, bien sûr.On ne peut pas faire un film aujourd’hui au bord de la Méditerranée sans parler de la question des réfugiés.Tous les jours, des gens se noient dans cette mer en venant chercher refuge chez nous.Je me moque que ce soit pour des raisons climatiques, économiques, ou à cause d’une guerre.La question centrale aujourd’hui, c’est le partage. On vit dans un seul monde.Même dans cette petite calanque perdue, en plein hiver, cela a des conséquences visibles…

Trois générations s’y retrouvent.Une renonce, l’autre retrouve une raison de vivre, la dernière tente des expériences nouvelles…

Pour les parents, c’est trop tard.Ils n’ont plus le temps de trouver une cause qui les motive à continuer.Ils préfèrent mourir deboutet disparaître avec leur monde. Angèle, Joseph et Armand, eux, peuvent encore redonner du sens à leur vie avec ces enfants qui arrivent.Quant aux plus jeunes, incarnés par Anais Demoustiers et Robinson Stevenin, ils sont l’occasion de parler d’amours transgénérationnels…

On songe évidemment à La Cerisaie de Tchekhov…

Sauf qu’à la fin, La Villa n’est pas vendue! Avec ces trois petits qui arrivent, peut-être la calanque va-t-elle revivre? Angèle, Joseph et Armand vont rester là avec ces trois enfants à élever, et ils vont essayer de faire tenir le restaurant, la colline et leurs idées du monde…

Et Joseph va raconter l’histoire puisque s’il ne le fait pas «personne ne le fera à sa place». C’est vous Joseph?

C’est ce que m’a dit Darroussin en lisant le scénario: «Donc, je te joue»Mais comme d’habitude, je suis dans tous les personnages. Armand (Gérard Meylan), c’est le pilier, celui qui continue à tenir le restaurant ouvrier de son père, à s’accrocher à l’idée de partage, de transmission… C’est aussi ce que je fais avec mes films. Raconter l’Histoire, c’est important.On vit dans le présent, l’instantanéité… Mais le passé importe aussi. Il ne faut pas l’oublier.

 

 

 

Therapie Taxi: Hit Sale

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Depuis France Fall et ses «Sucettes à l’anis» et Lio et son «Banana Split», on n’a pas souvenir d’avoir écouté une pop française aussi sexy et délurée que celle du trio parisien Therapie Taxi. Au début, on croit le titre de l’album en anglais (qu’on traduirait par : «Succès à vendre»). Jusqu’à ce qu’on tombe sur la plage 6 («Salope») et ses paroles hyper explicites. Il s’agit donc bien de hits «sales», du contraire de «propres». Éloignez les chastes oreilles ! Therapie Taxi vient nous le rappeller: les hits pop, c’est comme l’amour: c’est sale… Surtout si c’est bien fait !

The Doors : Live at the Isle of Wight

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Août 1970: enferrés dans un procès inique après la soi disant exhibition de Jim Morrison en concert à Miami, les Doors acceptent de jouer au Festival de l’île de Wight pour fuir les États-Unis. L’ambiance n’est pas au top quand le groupe monte sur scène à 2 heures du matin. Grossi, barbu et déprimé, Morrison s’apprête à annoncer aux autres qu’il quitte le groupe pour s’exiler à Paris (et y mourir). Sur scène, il n’est déjà plus que l’ombre du Lizard King. Immobile, il se contente de chanter les yeux fermés, déjà comme ailleurs. Derrière lui, les Doors mettent la gomme pour essayer de le faire réagir mais rien n’y fait. Morrison quitte la scène comme il y est monté: sans un mot pour le public. Sur le coup, la prestation déçoit. Surtout comparée à celle des Who qui leur succèdent et mettent le feu avec l’opéra rock Tommy. Mais presqu’un demi siècle plus tard, on redécouvre le film du concert et force est de constater qu’il est excellent. Le groupe joue le feu, le son est bon, l’image est nette et Jim chante formidablement bien. Bien que mal éclairé (un spot rouge pour tout light show!), ce live à l’Île de Wight n’a qu’un défaut: il est trop court.

Jimi Hendrix : Both Sides of the Sky

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(Photo Mark Sharratt) 

Mort depuis presqu’un demi-siècle (18 septembre 1970) Jimi Hendrix continue à publier des albums. Une postérité que peuvent  lui envier Michael Jackson , Prince et David Bowie. On doute pourtant qu’aucun des trois réussisse à avoir une telle longévité posthume. C’est que le guitariste gaucher a  passé les dernières années de sa vie sur scène et en studio et a laissé des kilomètres d’enregistrements qui ont d’abord fait le bonheur des bootleggers avant de faire la fortune de sa légation. Il semble toutefois qu’on arrive au bout du bout de ce qui était publiable (moyennant moult bidouillages) avec ce « nouvel album », troisième d’une trilogie supervisée par son ingénieur du son historique, Eddie Kramer, qui a indiqué que ce serait le dernier (y a qu’à croire…).

Les titres exploités sur Both Sides of the Sky proviennent pour certains (« Mannish Boy », « Lover Man ») des répétitions du Band of Gypsies, trio éphémère formé par le guitariste, Billy Cox à la basse et Buddy Miles à la batterie, auquel on doit le live éponyme. Les autres sont issus de jams avec différents invités, comme Hendrix les affectionnait. C’est ainsi que Stephen Stills joue de l’orgue et chante sur deux titres (« $20 Fine » et « Woodstock »), Lonnie Youngblood joue du sax sur « Georgia Blues » et Johnny Winter tricote en duo avec le maître sur « The Things I Used to Do ». Cela donne un album moins homogène que ses deux prédécesseurs (Valleys of Neptune et People, Hell and Angels) mais tout de même encore diablement intéressant. Trois titres au moins méritent qu’on investisse son bon argent dans la galette : « Mannish Boy » qui fait l’ouverture de l’album,   « Hear My train a Comin » dans une version mash-up de « Voodoo Chile » et la ballade improvisée « Send My Love To Linda » qui se termine par un solo de wha-wha assez phénoménal.

Eddy de Pretto : Cure

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Incarnation de la nouvelle chanson française qui carbure au hip hop, Eddy de Pretto a mis tout le monde à genou avec son premier EP (Kid) et ses deux titres phares, « Kid » et « Fête de trop« . Deux hits puissants et convulsifs,  portés par des textes violemment introspectifs,  des beats techno et un flow rap. Le premier album de ce gamin de Créteil à l’homosexualité affichée,  déjà auréolé d’une Victoire de la musique (découverte scène), était le plus attendu de ce début d’année. Il est sorti le 3 mars et la première impression est mitigée.  Il y a de bonnes chansons  ( « Rue de Moscou », « Normal » , « Jimmy », « Genre »… ), mais rien d’aussi fort que  les 4 titres de Kid,  que l’on retrouve d’ailleurs in extenso sur le disque.  A la première écoute,  tout sonne un peu pareil (du Nougaro 3.0 ?). Seule « Mamère » accroche immédiatement l’oreille,  comme un pendant féminin du « Papaouté » de Stromae. Difficile de dire si on fait juste la fine bouche,  ou si on va se lasser très vite des chansons du gars Eddy. Les concerts d’été seront décisifs: il sera au Mas des Escaravatiers le 19 juillet et  à Nice le 23 août pour le festival Crossover.

Tim Dup : Mélancolie heureuse

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Depuis Raphaël, aucun jeune auteur-compositeur interprète n’avait fait aussi forte impression que Tim Dup avec son premier album, Mélancolie Heureuse. Un titre qui définit assez bien l’atmosphère de ses chansons, dont les textes empreints de mélancolie, voire d’une certaine noirceur, sont éclairés par des instrumentaux piano-electro plutôt enlevés. Au-delà de la musique, bien dans l’air du temps, la qualité des textes et de l’interprétation impressionne pour un si jeune artiste (il vient d’avoir 21 ans), tout juste débutant et déjà en pleine possession de son talent. Plus que prometteur, l’album s’écoute en entier, sans le moindre déchet, et impose d’emblée Timothée comme un artiste à suivre. On l’a appelé pour faire connaissance…

La première chose qu’on a envie de vous demander après avoir écouté votre disque, c’est si ça va?
Oui, très bien, merci! (rires).J’ai l’habitude.Mes copains me le demandaient déjà quand je leur faisais écouter mes chansons. Il fallait que je leur explique la différence entre la mélancolie et la tristesse. Je peux effectivement être mélancolique, mais je ne suis pas triste.Dans la vie, je peux même être assez enjoué.L’oxymore et la dualité sont très présents dans mes chansons.Obscurité et lumière y cohabitent, j’espère harmonieusement. D’où le titre du disque: Mélancolie heureuse…

De quel milieu venez-vous?
J’ai grandi en région parisienne avec une mère institutrice et un père pharmacien passionné de musique.Il y avait toujours de la musique chez moi, de la pop anglo-saxonne comme de la chanson française.Mes parents m’ont emmené voir mon premier concert à 7-8 ans: c’était Thomas Fersen.J’ai commencé le piano à peu près à cette époque-là et j’ai joué dans plusieurs groupes au collège et au lycée. J’ai commencé à écrire des chansons et à les chanter dans les bars à Paris, après le bac.C’est là qu’on m’a découvert, aux Trois Baudets, où je passais. Après, c’est allé très vite.J’ai dû abandonner mes études au Celsa (une école d’attachés de presse N.D.L.R.) pour me consacrer à l’écriture et à l’enregistrement du disque.

En l’écoutant, la première fois, on s’est demandé si ce n’était pas un projet solo du chanteur de Fauve…
C’est drôle, parce qu’on est copains avec Quentin.On a les mêmes références: celles d’une génération qui a grandi avec la culture hip-hop. L’urgence, les textes fleuves, ça vient sans doute de là.Généralement, on me rapproche plutôt de Raphaël, qu’on écoutait beaucoup chez moi.Je comprends moins quand on me parle de Vianney.Musicalement, on est très différents…

Vous avez écrit deux chansons pour l’album de Louane
Oui, sa prestation aux Victoires de la Musique m’avait touché.C’est une grande interprète et sa sincérité m’inspire…

Vous auriez pu passer par un télé-crochet vous aussi?
Je me suis présenté au précasting de la Nouvelle Star.Ils avaient bien aimé «Les Ourses polaires» et je devais chanter devant le jury, mais je suis parti faire mon Erasmus en Angleterre. Je ne suis pas certain que j’aurais continué de toute manière…

Votre dernier single s’intitule «Une envie méchante». De quoi avez-vous le plus envie aujourd’hui?
De jouer mes chansons en live.J’espère venir dans le Sud. J’ai une tante qui habite Nice et de la famille en Corse, à Bonifacio. Ce serait l’occasion de les voir

Liminanas: Shadow People

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Deuxième album des Liminanas pour le label Because Shadow People renoue avec la veine Velveto-gainsbourienne du  duo perpignanais. Marie et Lionel Liminana ont profité de leur notoriété internationale pour enrôler Anton Newcombe (de Brian Jonestown Massacre) et Peter Hook  (de Joy Division) sur deux titres. Mais aussi Bertrand Belin et Emmanuelle Seigner,  qui fait des infidélités à Ultra Orange pour venir chanter avec eux sur la chanson titre. Plus varié et pop que ces prédécesseurs,  Shadow People (les gens de l’ombre)  pourrait, ironiquement,  permettre aux Liminanas d’en sortir (de l’ombre) et  faire enfin connaître dans son pays d’origine ce groupe que le monde nous envie.  On avait rencontré Marie et Lionel Liminanas  en 2016 au Festival de Cannes,  où ils étaient venus faire un set nocturne à la Villa Schweppes et ils nous avaient raconté la genèse du groupe.  En 2009, Lionel, disquaire le jour et guitariste la nuit dans divers groupes locaux, enregistre seul, dans sa cave « Avec un Mac, une carte son à 200 euros»,  les deux premiers titres de ce qui allait devenir les Liminanas. Postées sur MySpace, les deux chansons attirent l’oreille de deux labels de Chicago, spécialisés dans le rock garage, Hozac et Trouble In Mind, qui en demandent d’autres pour presser un EP. Panique à bord : Marie, ex-organisatrice de concerts, rangée des décibels, est sommée de passer à la batterie, façon Meg White ou Moe Tucker, le temps de mettre en boite quelques chansons aux titres rigolos (« Je ne suis pas très drogue », « Votre côté yé-yé m’emmerde », « My Black Sabbath », « Mobylette »). S’en suivent huit ( 8 !)  galettes américaines, des tas de concerts, mais toujours pas de maison de disques en France. Il a fallu l’entregent de l’ami et voisin catalan Pascal Comelade, avec lequel ils enregistrent un disque de guitare assez barré (Traité de guitarres triolectiques à l’usage des portugaises ensablées), pour que les Liminanas soient enfin signés chez Because. Pour fêter ça, le label presse en 2015 une anthologie qui regroupe tous les enregistrements «américains». En attendant les nouvelles chansons,  qui ne tardent pas à arriver et font l’objet du premier vrai album des Liminanas : Malamore, paru  en avril 2016Un mélange réjouissant de rock sixties, de yé-yé, de Gainsbourg vintage, de garage et de punk, avec des clins d’œil à Ennio Morricone et aux musiques de films italiens. Un album que les Liminanas ont joué sur scène l’an dernier au Grimaldi Forum de Monaco,  lors d’une mémorable Thursday Live Session. Ils se produisaient alors à six, avec un chanteur ou une chanteuse puisqu’aucun des deux fondateurs ne ressent le besoin d’occuper le devant de la scène.

The Who: Maximum As & Bs

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Contrairement à la plupart de leurs collègues anglais des sixties, les Who étaient plus un groupe à albums qu’à singles. A part «I Can’t Explain» et «My Generation», leurs plus grands succès sont des extraits de Tommy , Quadrophenia ou Who’s Next. En trichant un peu, Polydor a quand même trouvé dans leur catalogue de quoi compiler 5 CDs de chansons, sorties ou non en 45 tours, les deux derniers étant des live et des extraits de BO de films. Cela fait quand même un coffret très sympa avec de jolis mini pochettes cartonnées à s’offrir pour Noël.

U2 : Songs of Experience

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Difficile de demander à un groupe qui existe depuis 1976 et est passé par tous les stades de la célébrité, de dispenser encore les mêmes émotions  qu’à ses débuts. Qu’attendre alors d’un nouveau U2 en 2017, sinon une voix et un son familiers, quelques bonnes chansons à écouter en allant bosser, une présence rassurante quand tellement de choses disparaissent ?  C’est exactement ce que délivrent ces bien nommées « Chansons de l’expérience ». Plutôt meilleur que son prédécesseur, Songs of Expérience s’écoute avec plaisir. La dernière tournée, loin du gigantisme des précédentes, a, semble-t-il,  redonné  aux musiciens le goût de jouer simplement ensemble. Certaines chansons ont une fraîcheur qu’on n’avait plus entendue chez U2 depuis longtemps. Pas de tube, pas de révolution sonore (malgré un feat anecdotique de Kendrick Lamar sur « Get Out Your Own Way »), rien de crucial,  rien d’urgent. Juste de  bonnes chansons,  bien construites, bien écrites, bien chantées et bien jouées. Un disque de U2 presque humble. Tout arrive.

Bertrand Cantat: Amor Fati

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L’avantage du streaming sur abonnement,  c’est qu’on n’a pas à se demander si c’est bien ou pas d’acheter le disque d’un gars qui a massacré sa nana à coups de poings. On peut juste l’écouter et se faire une idée sans avoir l’impression de le sponsoriser. On a trop aimé Noir Désir pour faire une croix définitive sur Bertrand Cantat, même si on préférerait, en ce qui nous concerne, qu’il continue à produire sous un nom de groupe plutôt que sous le sien. Question de décence et de respect pour ceux que la mort de Marie Trintignant a plongé dans l’affliction. Ok, et à part ça il est comment ce disque ? Meilleur que celui de Détroit, qui ne faisait que reprendre l’histoire au Noir Désir de  Des Visages, des figures,  en moins crucial. Les deux premiers titres « Ami Nuit » et « Amor Fati » ouvrent de nouvelles voies musicales,  quelque part entre Ferré, Orelsan et Erik Truffaz (dont la trompette déchire le titre d’ouverture). Après ces deux titres géniaux (on pèse ses mots), le reste de l’album paraît évidemment plus faible, avec même des facilités un peu indignes côté textes (« Silicon Valley », « Les Pluies diluviennes »). Le premier single  (« L’Angleterre ») n’est pas mauvais en soi, mais il sonne différent du reste du disque et contribue à le rendre bancal. Même s’il ressemble à un mix  acoustique de « L’Homme pressé » et d’ « Un jour en France » (666.667 Club) , « Aujourd’hui » aurait fait un bien meilleur single.  Et  il reste encore assez de très bonnes chansons (« Excuse My French », « J’attendrai », « Anthracitéor » , « Aujourd’hui » , « Chuis con », « Maybe I ») pour situer l’album très au dessus de la moyenne de la production francophone du moment.

Etienne Daho : Blitz

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Encore sous le charme des Chansons de l’innocence retrouvée, il nous a fallu un bout de temps pour apprécier à sa juste valeur Blitz, le nouvel album d’Etienne Daho. Une pochette un peu trop queer, pas de tube évident, pas de mélodies accrocheuses, une voix noyée dans le mix, des guitares dissonantes, des textes abscons, des envolées orientalistes…  Ces 12  chansons ne se laissent pas facilement apprivoiser. Mais, au fil des écoutes, le charme finit par opèrer. Comme si le voile qui les recouvrait, glissait au fur et à mesure pour révéler leur splendeur. Au bout du compte, peut-être  même qu’on l’écoutera plus longtemps que les autres ce disque aventureux, placé sous le double signe de Syd Barrett, le fondateur barré des Pink Floyd, et du Gainsbourg de Melody Nelson. Vous avez dit « psykadélique » ?

Gimme Danger

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Le pitch

Apparu pour la première fois à Ann Arbor (Michigan) en pleine révolution contre-culturelle, le style de rock’n’roll puissant et agressif des Stooges a fait l’effet d’une bombe dans le paysage musical de la fin des années 60. Soufflant le public avec un mélange de rock, de blues, de R&B et de free jazz, le groupe – au sein duquel débute Iggy Pop – posa les fondations de ce que l’on appellera plus tard le punk et le rock alternatif. GIMME DANGER retrace l’épopée des Stooges et présente le contexte dans lequel l’un des plus grands groupes de rock de tous les temps a émergé musicalement, culturellement, politiquement et historiquement. Jim Jarmusch retrace leurs aventures et leurs mésaventures en montrant leurs inspirations et les motivations de leurs premiers défis commerciaux, jusqu’à leur arrivée au Panthéon du rock.

Ce qu’on en pense
Alors qu’il présentait Paterson en compétition pour la Palme d’or, Jim Jarmusch est venu à Cannes 2017,  accompagné d’Iggy Pop, montrer son documentaire sur les Stooges en séance de minuit. Grand moment  ! «Gimme Danger est davantage un essai qu’un documentaire. C’est notre lettre d’amour adressée au groupe qui restera sans doute l’un des plus importants de l’histoire du rock» , explique le réalisateur.  Le film s’adresse en priorité aux fans d’Iggy, mais tous les amateurs de rock et de cinéma pourront apprécier la démarche, la mise en scène toujours inventive et le ton volontiers humoristique avec lequel Jarmusch raconte l’épopée des Stooges, très loin des bêtes hagiographies habituelles.

 

Orelsan : La fête est finie

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On l’a tellement attendu (presque 6 ans en fait) le nouvel album d’Orelsan,  qu’on pouvait légitimement craindre d’être déçu.  Saurait-il se renouveler? Avait-il encore quelque chose à  dire? Avait -il encore seulement ENVIE,  alors que la télé et le cinéma lui réussissent aussi bien ? Des craintes que balaient d’emblée ce nouvel album au titre évocateur : La fête est finie. Le Bataclan et tellement de choses se sont passées depuis Le chant des sirènes… Orel n’en dit que quelques mots  (« Y a rien à faire pour se préparer au pire« ),  mais l’ambiance générale de l’album reflète la nouvelle donne. Jusqu’à l’ironique « Tout va bien » dans lequel le narrateur embellit la réalité pour son jeune fils, façon « La vie est belle« . « Quand est-ce que ça s’arrête? »  se demande-t-il dans un autre titre.  Dans les autres morceaux,  Orelsan décline ses thèmes favoris (le succès, la famille, la société, les meufs, grandir, les racines…),  avec ce sens de la rime qui fait qu’il reste le roi de la punchline. Entre deux titres plus légers, « San » , « Basique » et surtout  « Défaite de famille », exercice de démolition féroce à la Festen,  retrouvent la veine rageuse de « Suicide Social » et prouvent que le  succès médiatique n’a pas ramolli le rappeur de CaenMusicalement, on note une ouverture à de nouvelles sonorités  avec de jolis feats de Stromae (« La pluie ») et Ibeyi (« Notes pour trop tard »). Mais c’est celui avec Nekfeu (et Dizzee Rascal) qui retient l’attention, tant ces deux-là dominent le rap game français: « Zone » est un des sommets de l’album qui , à peine sorti, est déjà numéro un.

Interview : Ben Mazué

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(Photo Martin Lagardère)

Lentement mais sûrement, Ben Mazué s’impose comme l’une des valeurs sûres de la nouvelle scène française. Prix Sacem des découvertes avec son premier album en 2006, le Niçois a beaucoup tourné, écrit pour Axelle Red, Patricia Kaas, les Frero Delavega et Grand Corps Malade, sorti un deuxième disque en forme de bilan (33), retourné encore. Il vient de publier l’un des meilleurs albums francophones de l’année (La Femme idéale chez Sony/Columbia). Il devrait lui permettre de toucher le grand public qui ne le connaît pas encore, avec des chansons douces mais accrocheuses,  sur lesquelles Ben pose sa voix douce et sucrée, gorgée du soleil du sud où il a grandi. Nous l’avons rencontré,  à l’occasion de son concert au Mas des Escaravatiers où il avait invité Gand Corps Malade…

Un disque tous les trois ans, c’est ton rythme?
On dirait bien oui. Sauf que là j’ai un peu traîné.Il a fallu retarder la sortie et j’ai commencé à jouer les nouvelles chansons en concert avant de les enregistrer.

Qu’est ce qui t’a retardé?
Rien de particulier, c’est juste que je suis toujours un peu lent. Les concerts m’ont beaucoup accaparé, la tournée a duré plus longtemps que prévu.C’était génial parce que c’est monté progressivement: on a commencé dans des petites salles et on a fini aux Francofolies et au Printemps de Bourges…

On t’a même vu au festival d’Avignon…
Oui, la formule du spectacle s’y prêtait.Ca ressemble plus à un seul en scène qu’à un concert classique.Je communique beaucoup avec le public.Du coup, ça permet de ne pas jouer que les chansons qu’il attend.

Tu vas continuer sur ce format, même si le nouveau disque cartonne?
Oui, pour le moment on ne change rien.Je me sens vraiment bien avec cette formule et le public a l’air d’aimer ça aussi. On n’est que deux en scène avec le pianiste, mais ça ne fait pas cheap.Il se passe plein de choses…

Les arrangements des nouvelles chansons s’y prêtent. C’est assez dépouillé, ça va à l’essentiel…
Oui, je trouve aussi. Le fait d’avoir rodé les titres sur scène avant de les enregistrer a sans doute joué. On a fait le disque à trois, avec Guillaume Poncelet qui est un pianiste, un trompettiste et un arrangeur génial et Marlon qui a posé le cadre avec ses machines.Notre trio a bien fonctionné.Je suis très fier du résultat et très impatient de le présenter au public.

La thématique féminine  du disque est venue comment?
Par hasard. J’aime bien les portraits et là je me suis retrouvé avec pas mal de portraits de femmes… Du coup, c’est devenu le concept! (rires)

 

IAM: Rêvolution

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Pour son retour annoncé,  après 4 ans d’absence , IAM aurait pu se contenter de célébrer , comme c’était prévu, les 20 ans de son opus majeur,  L’Ecole Du Micro d’Argent, avec un concert parisien et une tournée française. Mais contrairement à d’autres (suivez notre regard),  les Marseillais ont encore des choses à dire et pas seulement en live. Ils le prouvent avec les 19 titres de Rêvolution (avec accent circonflexe indiquant la contraction entre  rêve et révolution), leur huitième album. Bien que d’une totale orthodoxie musicale (le quintet reste fidèle au son East Coast qui a fait son succès) , Rêvolution est aussi d’une grande modernité, avec des instrus abrasifs dignes des meilleures productions US et des textes branchés sur l’actu, qui parlent à tous, jeunes et moins jeunes.  Si l’on peut parler de maturité en rap, ce disque en est l’exemple. Il prouve que, comme le rock, le rap a réussi son passage  à l’âge adulte. Et qu’il vieillit bien ! Rêvolution est sans doute le meilleur album d’IAM depuis L’Ecole du Micro d’Argent. On a hâte d’écouter les meilleurs titres  ( « Monnaie de singe » , « Bad Karma », « Grands rêves grandes boites », « Depuis Longtemps », « Ils ne savent pas »… liste provisoire et non exhaustive) avec ceux de L’Ecole, en live  le 14 novembre à Nikaia Nice.