Ça vient de sortir

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Bruce Springsteen : Western Stars

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Après Broadway, Hollywood ? En pleine phase de diversification (autobiographie, Seul en scène…),   Bruce Springsteen s’éloigne de son format de composition habituel avec ce nouvel album attendu (5 ans se sont écoulés depuis le précédent),   qui  va surprendre, voire déconcerter ses fans. Western Stars sonne plus comme une collection de chansons écrites pour la Bande Originale d’un film que comme un album classique du Boss. La voix est posée comme d’habitude et les thèmes springsteeniens sont là,  mais enrobés dans des nappes de cordes et de cuivres, parfois jusqu’à l’emphase. Comme si un arrangeur de musiques de films était passé derrière lui en studio pour terminer des chansons laissées inachevées (certaines sont très courtes). Le résultat est un peu déstabilisant au début,  mais c’est suffisamment beau pour qu’on s’accroche et qu’on y revienne.  A l’image du single « Hello Sunshine« ,  qu’on a fini par adorer après de premières écoutes réticentes et de la chanson-titre, « Western Stars« , qu’on a immédiatement adoptée.

Nekfeu: Etoiles+Expansion

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Annoncé par un documentaire de making of  diffusé au cinéma en séance unique, le nouvel album de Nekfeu, Les Etoiles vagabondes a été mis en ligne dans la foulée sur les plateformes de streaming. Deux semaines plus tard, le rappeur de la Trinité balançait un album complet de bonus,  le bien nommé Expansion. Au total,  32 titres solides, ouverts sur les musiques et les problèmes du monde,  mais aussi très introspectifs, voire psychanalytiques, dans lesquels le Niçois parle de son rapport conflictuel au succès, de ses supposées pannes d’inspiration ( tu parles !)  et de ses problèmes de coeur. Des thèmes omniprésents dans le documentaire, où l’on voit Nekfeu et son crew faire face à ses doutes , en partant chercher des nouvelles idées à Tokyo, Los Angeles, La Nouvelle Orléans  et, pour finir, sur l’île grecque d’où est originaire sa famille. L’occasion de ramener des sons différents (chorale gospel, orchestre à cordes japonais , rébétiko) et de faire des rencontres inspirantes (les migrants de Mytilène).  Finalisé à Bruxelles, dans le studio de Damso, ce double album thérapeutique ne marque pas de  rupture avec les deux précédents et devrait finir d’imposer Nekfeu en patron du rap français. Son duo inattendu avec Vanessa Paradis (« Dans l’Univers« ) pourrait aussi lui permettre de toucher un public encore plus  large.  On a hâte en tout cas  d’écouter les nouveaux titres en live au festival Crossover dont le rappeur de la Trinité sera l’une des têtes d’affiche au mois d’août.

Interview : Viggo Mortensen

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Dans Green Book de Peter Farelly,qui vient de sortir en dvd,   Viggo Mortensen  joue un chauffeur-garde du corps Italo New-Yorkais à la Robert de Niro, qu’on croirait droit sorti d’un film de Martin Scorsese. Un parfait rôle de composition pour cet acteur danois mince, élégant et cultivé, qui parle cinq langues couramment, dont la nôtre. C’est en français qu’il a répondu à nos questions…

Connaissiez-vous l’existence du Green Book?
Oui, j’avais un livre pour enfants, Ruth et le Greenbook, qui racontait le voyage d’une jeune noire avec ses parents dans le Sud de l’Amérique.Une humiliation quotidienne…

Voyez-vous des similitudes entre l’Amérique d’aujourd’hui et celle de 1962 que décrit le film?
Évidemment, c’est un moment parfait pour le film en raison de la situation politique aux États-Unis. Mais ça aurait été un bon moment il y a dix ans et ça le sera sans doute encore dans vingt ans. Le racisme et la discrimination sont toujours d’actualité partout, hélas. Cela fait partie de la nature humaine. C’est le travail de chaque génération de lutter contre.En soi-même et dans la société…

Avez-vous été surpris qu’on vous propose un rôle d’Italo-New Yorkais?
Un peu oui, j’avoue. Mais pas plus que quand on m’a demandé de jouer Sigmund Freud! Dans ces cas-là, je me dis toujours que le réalisateur sait ce qu’il fait.Et puis j’ai rencontré le fils du vrai Tony Lip, qui m’a beaucoup aidé à rentrer dans le rôle en m’ouvrant les albums de famille et en me faisant écouter des enregistrements de son père. Il était très présent sur le tournage et quand je le voyais avec les larmes aux yeux à la fin d’une prise, je pouvais me dire que j’avais dû être juste.

Votre transformation physique est étonnante…
Prendre du poids n’a pas été le plus difficile: tout le monde est capable de bouffer des pizzas et des hamburgers à la chaîne. Le plus dur a été de prendre l’accent, de retrouver le vocabulaire de l’époque et de comprendre le personnage de l’intérieur sans le juger.

Avez-vous pensé à votre propre père?
Il était de la même génération que Tony, il a grandi dans le même milieu social. Sa façon de penser était typique de cette génération d’hommes qui ont été presque naturellement racistes. Il était drôle et têtu comme Tony.C’était un peu sa version danoise!

N’aviez-vous pas peur que Peter Farelly ne soit pas le réalisateur idéal pour cette histoire?
C’est vrai que ça étonne tout le monde dans le métier de la part du réalisateur de Mary à Tout Prix. Mais j’avais lu un de ses livres, The Comedy Writer et d’autres nouvelles de lui, je savais qu’il avait un côté sérieux. Après, on ne sait jamais: même de très bons réalisateurs peuvent faire de mauvais films. En l’occurrence, je pense que Pete a fait un film digne de Franck Capra et de Preston Sturgess.

JJ Cale : Stay Around

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Disparu en 2013 aussi discrètement qu’il avait vécu,   JJ Cale laisse un héritage musical qui va bien au delà de ses propres chansons (« After Midnight », « Cocaine »,  pour ne citer que celles-là) : Eric Clapton et Mark Knopfler, entre autres, lui doivent une deuxième partie de carrière apaisée et digne. Six ans après sa mort, sort un nouvel album de chansons inédites  qui vont lui permettre de « rester dans le coin » (Stay Around) encore un peu de temps. Un disque d’une parfaite coolitude, qui ne dépare en rien son impeccable discographie et qu’on va écouter tout l’été en rêvant de siestes dans le hamac et de bière fraîche…      

Eric Clapton : Life In 12 Bars

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Premier des grands guitaristes anglais (Jeff Beck, Jimmy Page, Rory Gallagher…) à émerger du blues boom britannique du début des années 60, Eric Clapton est aussi– et de loin- le plus célèbre. Sa participation à des groupes devenus mythiques (Yardbirds, Cream, Blind Faith, Derek and the Dominoes) et ses succès commerciaux en solo (461 Ocean Boulevard, Slowhand, Unplugged…) en ont fait, à 73 ans, une des icônes les plus vénérées du rock. Un véritable Dieu de la guitare, considéré comme tel depuis qu’une main anonyme avait graphé sur les murs de Londres « Clapton is God », alors qu’il venait à peine d’intégrer les Yardbirds. Très attendu, le documentaire que lui consacre l’américaine Lili Fini Zanuck raconte évidemment la geste artistique de ce virtuose autodidacte de la six cordes, au travers de témoignages de ses proches et de ses pairs, d’images d’archives et de performances rares, remontant sa fabuleuse carrière. Mais ce sont surtout les confidences de l’artiste lui-même qui font l’intérêt du film et lui donnent son caractère poignant et autobiographique.La vie, en effet, n’a pas épargné Clapton, abandonné par sa mère lors de son plus jeune âge, soumis à diverses addictions (drogue et alcool), malheureux en amour (parce qu’éperdument amoureux de la femme de son meilleur ami, le Beatle George Harrison) et père dévasté par la mort de son jeune fils Connor, défenestré d’une chambre d’hôtel. Face caméra, l’artiste évoque ces moments douloureux avec pudeur, mais sans chercher à cacher sa part d’ombre. Celle d’un homme dont la dévotion au blues aura constitué, toute sa vie, l’unique planche de salut.

Interview: M. Night Shyamalan

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Il fallait s’appeler M. Night Shyamalan pour fourguer à la fabrique de super héros que sont devenus les studios Disney depuis le rachat de Marvel, un scénario aussi tordu et politiquement incorrect que celui de Glass, son nouveau film. On y retrouve les (super) héros d’Incassable (Samuel L. Jackson, Bruce Willis) et de Split  (James McAvoy),  enfermés dans un asile d’aliénés ! Les super héros (et partant, ceux qui se passionnent pour leurs exploits) ne seraient-ils donc que de grands malades ? On lui a posé la question à l’occasion de la sortie du film en vidéo…  

Aviez-vous l’idée d’une trilogie dès Incassable ?     
Pas vraiment,  mais  j’avais dans l’idée qu’Incassable et Split pouvaient être liés d’une certaine manière. Ce qui m’intéressait surtout c’est de pouvoir réutiliser ces personnages.  J’ai donc demandé l’autorisation à Universal pour Split  et j’ai été étonné qu’ils acceptent. J’ai quand même attendu de voir si le film aurait du succès pour commencer à écrire une suite, sinon ce n’était pas la peine. Il m’a fallu aussi obtenir l’accord de Disney pour Incassable,  car je voulais utiliser des scènes coupées. Notamment une entre un prêtre et Bruce Willis après l’accident de train, à laquelle je tenais beaucoup. Mais jai encore dû y renoncer car elle était trop dramatique et elle ralentissait l’action. Dans un thriller,  il faut avancer droit.

Justement, Glass est-il un thriller, un film fantastique ou un film de super-héros?  

J’ai essayé de faire un bon thriller qui puisse fonctionner séparément. Ce que j’aime, c’est raconter des histoires par le suspens, la tension du cadre. Je suis de l’école Hitchcock pour cela, c’est ça qui me parle dans le cinéma. Mon truc, c’est la narration à la Hitchcock. La scène de l’usine de briques , avec tous ces points de vues différents, c’est vraiment une scène de thriller. Pour moi,  Glass est un thriller.

Les super-héros sont- ils de grands malades qui s’ignorent ? 
Le film essaie de répondre à cette question. J’aime penser qu’il y a, en chacun de nous, un super-héros qui s’ignore.  Même si, au contraire des super-héros, on doit d’entraîner beaucoup pour réussir à accomplir certaines choses. C’est le cas des grands sportifs : ils font parfois des choses fantastiques,  mais c’est le résultat d’heures d’entrainement forcené.

La fin ouverte de Glass annonce-t-elle une suite ?
J’aime les films incomplets,  qui laissent le public remplir les trous de la narration quand il sort de la salle. Beaucoup de films que j’aime dans l’histoire du cinéma fonctionnent comme cela. C’était déjà le cas d’ Incassable et de  Split. Mais je pense que j’en ai fini avec ces personnages, cette fois. Il est temps que je passe à autre chose.

Vous arrive-t-il de connaître l’angoisse de la page blanche? 
Oui et ça me stimule énormément. Ma solution pour lutter contre le syndrome de la page blanche, c’est de jeter des idées sur le papier, quelles qu’elles soient, sans souci d’histoire. Hier, par exemple, j’ai noté que j’aimerais tourner un film avec des mouvements de caméras extrêmement précis comme dans Rachômon de Kurosawa. En rentrant chez moi après la sortie de Glass, je vais me mettre au travail pour réunir tous les éléments épars que j’ai consignés. J’ai plusieurs idées de scénarios. Mais les idées de films c’est comme les femmes : on est plus attiré par celles qui vous résistent. Une idée qui fonctionne toute seule m’intéresse moins qu’une à laquelle il faut que je m’attelle pour lui donner forme. J’ai deux idées de films: une presque aboutie et l’autre pas du tout. Mais je me sens plus attiré naturellement vers celle qui est la plus incertaine…

Vos apparitions dans vos films, c’est en hommage à Hitchcock ? 
J’adore faire ça,  mais je ne veux pas que ça gène la narration, qu’on dise : « Tiens voila le petit indien bouclé ! ». La scène du mec dans la boutique qui reconnaît David (Bruce Willis) parce qu’il allait au stade quand l’autre était encore surveillant, ça fonctionnait bien,  alors je l’ai gardée.

 

Subutex : Duris dit tout

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S’il n’était pas mort à la fin du Péril Jeune, Tomasi aurait très bien pu devenir Vernon Subutex, le héros déchu de Virginie Despentes dont Canal + vient d’adapter les (mes) aventures en série. Même tignasse, même sourire carnassier, même charisme, même silhouette de danseur, même visage : celui de Romain Duris, qui renoue au passage avec un genre de personnage, plutôt rock’n’roll, qu’il n’avait plus tellement incarné, depuis. A l’occasion de la sortie de la série en dvd, Duris balance tout… 

Ça vous a frappé, vous aussi, la ressemblance entre Tomasi et Subutex ?

Pas à la lecture du scénario, en tout cas. Ce n’est qu’en voyant le premier épisode que j’y ai pensé. Effectivement, il y a quelque chose, mais je ne saurai pas trop dire quoi, exactement. Ce qui est drôle, c’est que le Péril Jeune, à la base, c’était aussi pour la télé.

Vous n’avez pas hésité à vous engager pour une série ?

Si, bien sûr. Mais pas parce que c’était pour la télévision. Je ne fais pas mes choix en fonction du support : je lis des scénarios avec des histoires, des personnages, un metteur en scène… Que ce soit un film, de cinéma, un téléfilm ou une série, finalement, je n’y accorde pas tellement d’importance. Ce qui me tracassait plus, c’était de savoir si on arriverait à être proche de l’authenticité du roman de Virginie Despentes et de son écriture très radicale, extrême et intègre. Les discussions que j’ai eues avec la réalisatrice m’ont rassuré.Le casting et la musique aussi. Il y avait une vraie envie d’être à la hauteur du bouquin.Même si, au bout du compte on en a fait autre chose…

Vous aviez lu le roman ?

Non. Ma sœur me l’avait pourtant donné en me disant que ça ferait un bon personnage pour moi. Mais je ne l’ai lu qu’après avoir reçu le scénario. Je me suis fait embarquer tout de suite. C’est effectivement très cinématographique…

Pourquoi une série plutôt qu’un film ?

L’avantage, c’est la durée. La saison entière dure 4 h 30. Il y a plein de moments qu’on aurait dû couper dans un film et qu’on a pu laisser ou même rajouter dans la série. Je ne me rendais pas compte à quel point c’est précieux pour le personnage. Ça permet de filmer de vrais moments de vie. Du coup, j’ai insisté pour qu’on rajoute des scènes d’errance qui font qu’on se rapproche de l’écriture du roman.

L’intrigue condense celle des deux premiers tomes.Y aura-t-il une deuxième saison ?

Pour l’instant, ce n’est pas prévu. Le 3e tome du roman est plus compliqué à mettre en images. Il faudrait vraiment trouver d’autres ressorts. Ce n’est pas l’envie qui manque, je le ferais volontiers. Mais il faudrait qu’il y ait quelque chose d’évident dans le scénario. Pas que ce soit juste pour faire une suite.

La chute du personnage est vertigineuse. Il devient SDF. Ça a été difficile à tourner ?

Non,  pas tant que ça. J’ai du pas mal maigrir,  mais ça n’a pas été très difficile.J’aurais plus de mal à beaucoup grossir,  je pense. En tout cas, j’hésiterai plus à le faire. Là, je me sentais plutôt bien dans la peau du personnage,  avec les cheveux longs et le même pull crasseux tous les jours (rires). En fait, j’ai même insisté pour qu’on fasse durer son chemin de croix. C’est là qu’on retrouve le plus l’esprit du bouquin, je pense.

Le tournage a été long ?

Quatre mois en tout.Trois en ce qui me concerne. Le temps d’un gros film confortable. Sauf que là le rythme était plus soutenu. Mais ça ne me dérange pas, au contraire. J’adore quand c’est speed. Quand le rythme est tenu, il faut faire des choix, prendre des risques. On ne s’endort pas. Finalement, le temps c’est une plaie au cinéma, notamment dans les films d’époque avec des décors des costumes, du maquillage… Il y a beaucoup de temps morts, c’est compliqué pour le jeu. Quand c’est plus speed, je préfère.

La B.O est très rock, vous y avez participé ?

Non,  mais c’était une de mes questions par rapport à l’adaptation : est-ce qu’on aurait les droits de toutes ces chansons ? C’était important parce que le personnage est disquaire et disc-jockey.La musique c’est toute sa vie.

Et pour vous ?

J’en écoute tout le temps, mais je suis beaucoup moins branché rock que lui.Plus jeune, j’étais batteur mais on faisait surtout du funk, c’est plus ma musique. Aujourd’hui, je suis abonné à une plateforme de streaming et j’écoute tout ce qui sort.

Le roman joue beaucoup sur la peur du déclassement. C’est quelque chose qui a pu vous tracasser à un moment ?

Je ne ramène pas tout à ma petite personne, mais effectivement l’exclusion, la précarité, ça fait peur, pour soi-même ou pour ses enfants. Vernon Subutex raconte une chute, mais avec une forme d’espoir au bout. Vernon ne se résigne pas à l’individualisme et à la perte de la solidarité.

Avez-vous pensé à ce que vous auriez fait si ça n’avait pas marché pour vous dans le cinéma ?

Je suis arrivé au cinéma par hasard. J’en ai d’ailleurs toujours gardé un sentiment d’imposture. Depuis le début, je me dis que ça peut s’arrêter demain. Je vis toujours avec cette notion-là. Avant de faire du cinéma,  je me préparais à faire carrière dans le dessin. J’ai toujours gardé le dessin comme plan B, en me disant que si demain ça ne marchait plus pour moi au cinéma, je ne serai pas sans rien faire. Aujourd’hui, c’est presque devenu un plan A puisque j’ai publié un bouquin et que j’en prépare un autre. J’aimerais bien faire une BD, mais c’est beaucoup de boulot.

 

 

Interview : Claire Denis

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 Claire Denis est venue présenter à Nice son nouveau long métrage High Life .Un film de SF envoûtant et déroutant, avec Robert Pattinson et Juliette Binoche,  qui sort enfin en DVD. La cinéaste, qui présidait le jury de la cinéfondation et des courts métrages  cette année  à Cannes,  nous en a raconté les coulisses…  

Comment se fait-il que le film ait été présenté à Toronto plutôt qu’à Cannes?
On n’avait pas fini le montage et les effets spéciaux n’étaient pas prêts. On a loupé Venise aussi à cause de ça. Du coup, c’est à Toronto qu’a eu lieu la première.
Le public a été choqué paraît-il?
La première de gala a été étrange.Certains ont semble-t-il été choqués par la scène de la sex-box et plus encore par celle où Juliette Binoche recueille la «sainte semence» de Pattinson. Ça m’a surprise. Je ne pensais pas qu’une chose aussi enfantine et ironique puisse être prise au premier degré…
On ne vous attendait pas dans la Science-fiction: qu’elle a été l’origine du projet?
Un producteur est venu me proposer de faire un film en anglais.J’ai dit oui, à condition que ça se justifie d’une manière ou d’une autre.L’anglais, c’est la langue de l’espace en quelque sorte et j’ai toujours aimé la SF. J’avais cette première image en tête d’une serre de plantations dans un vaisseau spatial. Je suis partie de là.
Comment Robert Pattinson a-t-il atterri chez Claire Denis?
Il est venu me voir, il y a cinq ans pour me proposer de travailler avec moi. Ça a totalement changé la perspective du film car j’avais imaginé un homme plus âgé pour le rôle principal. Au début, je le trouvais un peu trop iconique. J’avais aimé son travail dans Twilight et les films de Cronenberg, mais je n’aurais jamais pensé spontanément faire appel à lui pour un de mes films. On s’est vu assez souvent et un lien d’amitié s’est créé entre nous, Ça a évacué le problème. Avoir quelqu’un comme lui, tellement impliqué et désireux de faire le film, ça m’a donné beaucoup de force.

L’esthétique du film est radicalement différente de tous les films «spatiaux» récents. Avec qui avez-vous travaillé pour le design ?
Juste mon équipe habituelle.J’aurais voulu impliquer plus le plasticien danois Olafur Eliasson, dont une des œuvres a inspiré l’image finale.Mais je me suis rendue compte qu’il n’y a rien de mieux que les gens de cinéma pour faire du cinéma.Pour le vaisseau, on a imaginé une sorte de prison spatiale. Et pour les costumes, on s’est largement inspiré des combinaisons des astronautes Russes. J’en avais marre du blanc qui est la couleur obligatoire depuis Star Wars…
Quelles étaient vos références?
Avec Solaris (Tarkovski) et 2001(L’Odyssée de l’espace de Stanley Kubrick N.D.L.R), on peut déjà voyager assez loin. J’ai vu tous les Alien aussi.Mais je me suis interdit de revoir aucun film avant le tournage car je voulais rester avec mes images et mes couleurs.M’en tenir à la modestie de mon histoire. Je n’avais ni les moyens ni l’envie de faire autre chose de toute façon.Et surtout pas d’imposer à mes acteurs de jouer devant un fond vert en permanence…
C’est la première fois que vous utilisez des effets spéciaux. C’était un souci?
Non. Il y en a très peu de toute façon et comme ils tardaient à arriver, j’en ai enlevé.La scène des corps qui flottent dans l’espace, par exemple, on l’a faite au ban de montage.
Le travail sur le son est très réussi. Comment avez-vous fait?
C’était compliqué parce qu’on avait un décor qui craquouillait de partout.L’ingénieur du son allemand était très malheureux.Mais on s’est débrouillés. C’est Stuart Staples des Tindersticks qui a fait tout le sound design du film…
La chanson du générique, «Willow», que chante Robert Pattinson est magnifique. Les Tindersticks et vous, c’est une vieille histoire…
Oui, c’est notre huitième film ensemble. J’étais allé les voir au Bataclan à l’époque de leur second album pour leur demander les droits de «My Sister» que je voulais pour Nenette et Boni.Ils m’ont dit qu’ils préféreraient faire toute la BO… Avec Stuart, qui est du Nord de l’Angleterre, on a du mal à communiquer en anglais.Mais on n’a pas besoin des mots pour se comprendre.
Comment doit-on comprendre le titre?
Il y a «high» pour l’espace là-haut et «life» pour la vie qu’on cherche à reproduire. Mais c’est surtout un mot qui renvoie à mon enfance en Afrique.«High Life», c’est comme ça que les Africains qualifiaient la vie des blancs..
Y-a-t-il d’autres genres que vous aimeriez aborder, après la SF?
Je ne me pose pas la question en ces termes.L’histoire passe avant le genre. Ce qui compte c’est ce qu’on veut raconter.La forme vient après. Comme je ne ressens pas le besoin de répondre à une demande et que je fais des films qui ne coûtent pas très cher, je me sens absolument libre d’aller où j’ai envie d’aller.

Nirvana : Live at the Paramount

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En octobre 1991, alors que l’album Nevermind vient de sortir et que MTV matraque « Smells Like Teen Spirit » environ mille fois par jour, Nirvana, encore en trio,  attaque la triomphale tournée qui conduira le groupe à la reconnaissance mondiale (et Kurt Cobain à s’enfoncer le nez dans la poudre). Mais pour l’heure, Nirvana est porté par la Grâce et livre à domicile (Seattle) une prestation phénoménale. Les titres sont tout neufs, aucune usure ne se fait sentir,  même sur « Teen Spirit » que Cobain finira par détester mais qu’il joue ici comme si sa vie en dépendait. Le concert, que l’on peut aujourd’hui regarder en version superbement  restaurée sur Youtube,  n’était sorti, à l’époque, qu’en vidéo. Universal a eu la bonne idée de l’éditer en double vinyle pour le Disquaire Day, avec un son nickel, un poster (pas terrible),  une reproduction du pass VIP du concert (sympa) et un code de téléchargement. Et pour ne rien gâter la pochette est superbe. Si vous n’achetez qu’un vinyle cette année…

Robin Trower : Coming Closer To The Day

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Avec une régularité de métronome, Robin Trower tombe un album tous les deux ans , ce qui amène le compteur à 23 depuis le début de sa carrière solo. Les dernières productions de l’ex-guitariste de Procol Harum, qui vient de fêter ses 74 ans,  sont toutes d’excellente qualité: on ne sait donc pas pourquoi, au juste,  ce nouvel opus nous fait autant d’effet. Comme à son habitude, Robin l’a enregistré tout seul dans son home studio, jouant de tous les instruments et assurant le chant. La veine est purement blues et le son toujours aussi Hendrixien. Les 12 chansons sont excellentes, impossible d’en extraire une plutôt qu’une autre:  le disque s’écoute d’une traite. Difficile évidemment de ne pas penser, au détour d’une intro , d’un riff  ou d’un solo, à « Crosstown Traffic« ,  « Red House » ou quelqu’ autre classique de Jimi Hendrix,  mais  Trower n’est jamais dans la copie servile,  ni dans la démonstration de virtuosité. Il perpétue simplement le son d’Hendrix,  avec ses propres chansons, un toucher magique et un très gros feeling. Espérons que la tournée qu’il vient d’entamer aux Etats-Unis pour défendre l’album le mènera jusqu’à nous, un de ces jours comme semble le promettre le titre (interprétation optimiste).   On garde un souvenir ému de son concert à Monaco,  au bon temps du Moods,  où on avait eu l’insigne honneur de pouvoir l’interviewer.

Interview : Rami Malek

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Révélé par la série Mr Robot, Rami Malek incarne un Freddie Mercury plus vrai que nature dans Bohemian Rhapsody, le  biopic de Queen qui vient de sortir en dvd. Ils nous a expliqué comment on se glisse dans la peau d’une rock star…

Quelle a été votre première réaction lorsqu’on vous a proposé de jouer Queen?
Vous ne pouvez imaginer à quel point c’était monumental pour moi de penser que j’allais incarner Freddie Mercury. Il n’y en a qu’un, il est unique, avec ce côté provocateur énorme…

Comment se prépare-t-on à jouer un tel personnage?
Je tournais Mr Robot quand on m’a annoncé la nouvelle.Je suis allé à L. A rencontrer les producteurs qui m’ont parlé du rôle pendant 6 heures, alors qu’ils n’avaient même pas encore le budget.Je suis reparti en me disant que ça ne se ferait probablement jamais, mais que si ça se faisait il fallait que je sois prêt. Alors je suis allé m’installer à Londres où j’ai pris à mes frais des cours de chant, de piano, de prononciation, de chorégraphie. Ce qui rendait Freddie Mercury si spécial, c’est qu’on savait jamais ce qu’il allait faire! Il y avait le Freddie intime et l’audacieux performer. On ne pouvait pas se contenter de l’imiter, sinon on risquait la caricature. Il fallait saisir l’essence de sa personnalité. Les essayages de costumes et les heures passées au maquillage m’ont aidé à rentrer dans la peau du personnage. J’avais l’impression d’être le vrai Freddie quand il se préparait pour monter sur scène…

Brian May et Roger Taylor coproduisent le film. Ils étaient très présents sur le tournage?
Oui et heureusement ! Je n’aurais pas pu faire le film s’ils n’avaient pas été là. Brian m’a beaucoup aidé en me permettant de l’appeler à tout moment. À tel point d’ailleurs qu’il est devenu une sorte de mentor pour moi, même en dehors du film. Lorsqu’ils ont vu le film terminé, ce qu’ils m’ont dit a été la plus grande récompense que je puisse avoir.

La reconstitution du concert de Live Aid est incroyable. Comment l’avez-vous tournée ?
RM: On voulait que ce soit absolument fidèle aux images de l’époque. On a beaucoup répété et c’est la première scène qu’on a tournée.On a filmé tout le show sans interruption car on avait besoin de l’adrénaline du plan séquence pour retrouver celle du concert. À la fin de la prise, on s’est regardés et on s’est dit que c’était gagné.Après ça, le reste serait facile…

Au final que retenez-vous de cette expérience?
Ce rôle a changé ma vie. Comment pourrait-il en être autrement?C’était un incroyable défi que j’ai adoré relever. Petit à petit, je suis tombé amoureux du personnage. Il envoie un message puissant sur l’intégrité artistique, sur la fidélité à soi-même. Ca m’a apporté beaucoup de l’incarner.

 

Bohemian Rhapsody

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Le pitch

A Londres, au début des années 60, le jeune Farrokh Bulsara (Rami Malek) rencontre Brian May (Gwilym Lee) et Roger Taylor (Ben Hardy), respectivement guitariste et batteur du groupe Smile. Ensemble, ils forment le groupe Queen. Pour le meilleur et pour le pire, Farrokh devient Freddie Mercury…

Ce qu’on en pense

On pouvait légitimement craindre le pire de ce biopic de Freddie Mercury, devenu celui de Queen après que les membres survivants du groupe aient pris le pouvoir sur la production et que le réalisateur Bryan Singer (Usual Suspects , X-Men) ait abandonné le tournage en cours. Groupe iconique des années 80 (pas une très bonne décennie pour le rock), Queen n’a pas une histoire très différente, ni plus édifiante que celle d’autres formations vedettes de l’époque.C’est celle d’un groupe formé autour de deux personnalités opposées mais complémentaires (le chanteur Freddie Mercury, icone gay en devenir et le guitariste Brian May, doué mais trop sage pour devenir une vraie rock star), qui a connu un succès planétaire dans une époque particulièrement faste pour le business de la musique (émergence des radios FM , lancement du CD audio, méga concerts en stades). Ascension contrariée (Queen avait des prétentions artistiques peu en phase avec les visées commerciales de sa maison de disques), succès surprise (avec le titre opératique «Bohemian Rhapsody»), frasques de diva du chanteur, jalousies, séparation, reformation et triomphe scénique (au concert Live Aid dont le groupe semble avoir assuré le succès à lui tout seul…), avant la mort annoncée de Freddie Mercury (diagnostiqué malade du Sida) et sa quasi déification posthume… Telle est, retracée par le film, la trajectoire du groupe. L’argent, les dissensions internes, les jalousies, la drogue et les frasques sexuelles du chanteur sont tout juste évoqués. Il s’agit bien d’un «biopic autorisé», comme il y a des «biographies autorisées».Pourtant, on avoue avoir pris un plaisir coupable à cette évocation, trés lisse et commerciale, de la saga de Queen. Le performance de Rami Malek (découvert dans la série Mr Robot), en Freddie Mercury tout en moustache et mâchoire prognathe, n’y est pas pour rien. Mais Gwylim Lee est tout aussi ressemblant et crédible en Brian May. La reconstitution du concert de Live Aid est assez incroyable. Et la B.O est forcément formidable, puisque c’est du Queen. Dans le genre, le film est une telle réussite qu’il ouvre grand la voie à d’autres biopics de groupes, autorisés ou non : Les Beatles et Elton John sont déjà en boite . Pour les autres  (Led Zeppelin, les Kinks, les Who, les Stones…),  il ne reste plus qu’à trouver les sosies.

Interview : Jacques Audiard

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C’est devenu une sorte de blague dans le métier. Lorsqu’on demande à un(e) acteur/trice étranger(e) avec quel réalisateur français il/elle aimerait tourner, la réponse est généralement: «À part Jacques Audiard?». C’est dire le prestige dont jouit, urbi et orbi, le plus «titré» de nos cinéastes, titulaire, à 66 ans, de neuf César et d’une Palme d’or. Est-ce parce qu’il ne lui restait plus rien à gagner en France qu’il a réalisé son premier film «américain»? Le réalisateur d’Un Prophète et de De Rouille et d’os s’en défendait à Deauville , où il a reçu le Prix du 42e anniversaire avant de se voir attribuer  le Lion d’Argent de la Mise en scène à Venise pour  Les Frères Sister. Faute de nomination aux Oscars, Jacques Audiard sera l’un des favoris des César… 

Est-ce un désir d’Amérique qui vous a poussé à réaliser un western, ou une envie de western qui vous a fait réaliser un film américain?
Vous auriez aussi pu entrer mon amour des chevaux dans les paramètres! (rires). Mais non: je n’avais envie ni de western, ni de faire un film aux États-Unis. Seulement de tourner avec des acteurs américains.

Et pourquoi cela?
Ils ont une culture du jeu au cinéma qui est différente de la nôtre. Acteur de cinéma, c’est quelque chose de spécial.Je pense qu’ils ont constitué un savoir particulier du jeu cinématographique, de ce que c’est de jouer devant une caméra.Ils ont une conscience plus aiguë d’eux-mêmes et des distances, qui fait que quand ils rentrent dans le cadre, il se passe quelque chose de différent.Ils offrent une sorte d’incarnation immédiate. On ne se pose pas de question, ils se dressent physiquement et occupent l’espace d’une façon différente.Les visages n’apparaissent pas de la même façon, les corps n’ont pas la même taille, les voix la même profondeur…Nous avons des voix de tête et une langue peu accentuée.La leur est plus rythmée, plus musicale… Ensuite, bien sûr, il y a le travail.Ils ne s’arrêtent jamais. Jake Gyllenhaal, par exemple, est allé, sans que je le lui demande, travailler avec un linguiste pour acquérir l’accent d’un jeune diplômé de la côte est des États-Unis au XIXe siècle. Il est revenu avec le script en phonétique pour ne pas faire de faute d’accent. Il ne lui manquait que le costume!

Et les deux autres?
John CReilly est venu me proposer le film avec l’idée de jouer Eli, l’un des frères Sister, ce qui me convenait parfaitement.Le nom de Joaquin Phœnix est arrivé très vite.Je ne sais plus qui, de lui ou de moi, l’a proposé en premier, mais il n’y a pas eu de discussion.

Est-ce réellement pour préserver ses chances aux Oscars que le film n’a pas été présenté à Cannes?
C’est vrai que c’est une décision de la société de production, Anapurna, qui est américaine.Mais je pense plutôt que cela tenait à la date choisie pour la sortie du film.Venise, Deauville et Toronto sont mieux placés dans le calendrier pour coller à une sortie à l’automne.

N’avez-vous pas, malgré tout, des envies de conquête de l’ouest?
Non, je vous l’ai dit: je n’ai pas de rêve américain.Je n’y pense pas, en fait.Si j’avais lu le livre sans que John me propose de l’adapter, je n’y aurai certainement jamais pensé.J’ai une culture du western très lacunaire. Dramatiquement, le western est très linéaire, sans suspense, épique. Dans mon travail, je pense avoir été attiré jusqu’à maintenant par des histoires plus tendues, des scénarios plus «efficaces».

Et surtout plus urbains!
Oui, mais là justement j’avais envie de campagne et de grand air, pour changer un peu! (rires)

Pourquoi ne pas être allé tourner aux États-Unis, dans ce cas?
J’y suis allé en repérage, mais partout où j’allais j’avais l’impression que c’était trop facile, trop évident. Pour Un Prophète j’avais eu la même impression dans les prisons que je visitais. Le réel ne m’aide pas à voir le cinéma.Il m’a semblé qu’il fallait être plus créatif.C’est pour cela que j’ai préféré tourner en Espagne et en Roumanie.

Vous avez gardé le «final cut»?
Je ne comprends même pas qu’on se pose la question!

Vous avez fait le buzz en dénonçant le machisme des festivals. Pourtant vos films sont très virils…
Il y a un malentendu autour de ça. C’est vrai que quand j’arrive dans un festival et que je vois que les dirigeants, les sélectionneurs et les sélectionnés sont tous des hommes, j’ai l’impression d’être encore dans l’ancien monde. Sur mes plateaux, il y a presque plus de femmes que d’hommes.On dit tout le temps que je fais un cinéma viril. Mais Sur mes lèvres ou De Rouille et d’os étaient des histoires de femmes et de femmes fortes. Je trouve que dans mes films les hommes sont plutôt… En dégoulinade! (rires)

 

Interview : Romain Duris

ça vient de sortir|

Dans Nos Batailles son cinquantième film (déjà !), Romain Duris rompt avec l’image de séducteur « adulescent » qui  a fait son succès depuis L’Auberge Espagnole. Il y incarne un chef d’équipe et délégué syndical qui a sacrifié sa vie de famille à son travail et se prend la réalité en pleine face lorsque sa femme disparaît sans prévenir,  le laissant se débrouiller avec deux enfants en bas âge. Un rôle mature sur fond social qui lui vaut une nouvelle nomination pour le César du meilleur acteur.  En attendant de le découvrir en janvier en Vernon Subutex, dans la série de Canal +  adaptée des romans de Virginie Despentes, il nous parle de son travail, avec ce mélange de naturel et de réserve qui le fait se refermer dès qu’on tente une question trop personnelle…

Comment choisissez-vous vos rôles ?
A l’instinct  !  J’analyse après.  Quel genre de film c’est, qui le réalise… La première réaction est souvent la bonne, mais parfois je m’emballe. Il m’arrive de revoir mon enthousiasme sérieusement à la baisse à la deuxième lecture !  (rires). C’est pour ça que je prends toujours un temps de réflexion avant de signer…

Qu’est-ce qui vous a poussé à accepter ce rôle-là  ?
J’avais vu  Keeper, le premier film de Guillaume Senez et je l’avais beaucoup aimé. Le scénario m’a fait un peu penser à  Kramer contre Kramer qui est un de mes films préférés. Et puis il y avait  l’aspect social, le travail en usine, la boulot syndical. Toutes choses que je n’ai jamais connu puisque j’ai eu la chance de pouvoir faire ce métier très jeune… On a tourné dans une vraie usine. Les rapports sociaux y sont très différents de ceux qu’on montre dans le film mais j’ai trouvé ça passionnant. C’est une des raisons pour lesquelles j’adore ce métier: pouvoir découvrir des univers très éloignés du sien…

Le fait de tourner sans dialogues ne vous faisait pas peur ?

Au contraire ! Ça m’excitait beaucoup, je n’avais encore jamais fait ça. Guillaume a une méthode de tournage très particulière :  il fournit un scénario d’une trentaine de pages, sans dialogues, juste avec les situations. Et puis sur le tournage, il nous mène doucement vers où il veut aller. Ce n’est pas tout à fait de l’improvisation, puisque tous les dialogues sont écrits et qu’on est dirigés. Ce ne sont pas des répétitions non plus puisqu’il filme tout et peut  retenir la première prise comme la dernière. C’est juste une manière de vous faire jouer la scène avec vos propres mots pour que ça sonne plus juste. Ça vous oblige à vous concentrer encore plus sur le personnage, la scène et les émotions qui s’en dégagent. J’ai adoré ça ! Les autres aussi , je crois…

Le film risque de marquer un tournant dans votre carrière. Le passage à des rôles plus matures…

On a toujours l’impression d’avoir 20 ans, mais le temps passe. Professionnellement parlant, ça ne me dérange pas, au contraire.   L’âge ajoute du vécu, de l’épaisseur chez un acteur.  J’ai toujours aimé les personnages de la cinquantaine, avec le costume mais toujours la même folie intérieure. Les hommes politiques sont les champions pour cela. J’ai confiance en l’avenir parce qu’à mon âge le répertoire s’élargit, on peut jouer plus de choses. Après, est-ce que les bons rôles continueront d’arriver jusqu’à moi ? Je ne sais pas. Mais ils existent en tout cas…

Il faut dire que jusqu’ici vous avez été plutôt gâté…

Oui, c’est sûr. J’ai la chance d’avoir du travail, de faire deux trois films par an, alors que beaucoup de mes amis rament. Mais on fait un métier très instable. Depuis le début, je me dis toujours que ça peut s’arrêter demain. Je vis toujours avec cette notion-là.

Qu’auriez-vous fait si cela n’avait pas marché pour vous ? 

Probablement de la BD ou des illustrations de livres pour enfants. C’est ce à quoi je me préparais en tout cas. Je trouvais que c’était un domaine où on pouvait garder sa liberté. Je suis arrivé au cinéma un peu par hasard. J’en ai d’ailleurs toujours  un sentiment d’imposture. Alors , je garde le  dessin en plan B. Si demain ça ne marche plus pour moi au cinéma, je ne serai pas sans rien faire. Même si c’est compliqué de gagner sa vie avec le dessin…

Vous dessinez tous les jours ? 

Pratiquement oui. J’aimerais bien faire une bande dessinée, mais c’est beaucoup de boulot.

Que faites vous d’autre de votre temps libre ? 

Je vais au cinéma ! Quand je suis immergé dans un tournage, je n’arrive pas à voir d’autres films. Mais dès que j’ai fini, je rattrape… Souvent avec du retard. Je viens juste de voir  Three Billboards et Moi, Tonya,  que j’ai beaucoup aimés. Mais  j’évite les festivals et les autres raouts  du métier parce que ça peut vite me saouler. Quand je ne tourne pas,  j’ai besoin de revenir à la vie concrète.

Votre célébrité ne vous en empêche pas? 
Non, je n’ai pas de problème avec ça. C’est une question d’attitude: si vous sortez avec l’air important en toisant les autres vous avez toutes les chances qu’on vous arrête pour vous demander un autographe ou un selfie. Je les fais volontiers quand on me le demande, mais si je peux éviter en dehors des obligations promotionnelles, c’est aussi bien. Pour ça,  il suffit généralement de mettre un jean , un blouson et une casquette et de tracer droit devant. C’est rare qu’on fasse attention à vous, si vous ne le recherchez pas.

 

 

Joe Jackson : Fool

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Alors qu’on se préparait à fêter le 40e anniversaire de la sortie de son premier album  Look Sharp !  – ce qui ne nous rajeunit, certes pas- le bon Joe Jackson livre un 20e opus studio du meilleur cru. Huit titres envoyés sans barguigner, qui font justement le lien entre son premier manifeste pub rock et la veine post jazz de son chef d’oeuvre 80’s,  Night and Day . Huit très bonnes chansons pour bien commencer l’année,  en espérant que cette double actualité nous donne l’occasion de revoir Joe en live sur nos rivages. La dernière fois c’était à l’Opéra de Monte Carlo et ceux qui y étaient en gardent un souvenir ému.