Sans répit
Par Ph.D
Le Pitch
Alors qu’il fait l’objet d’une enquête pour corruption, le lieutenant de police Thomas Blin (Franck Gastambide) doit se rendre en pleine nuit aux funérailles de sa mère. En voulant éviter un chien sur le route, il percute accidentellement un homme et le tue sur le coup. Paniqué, il décide de cacher le corps. Croyant être tiré d’affaires, il se retrouve embarqué dans une spirale infernale, quand l’enquête sur l’individu disparu est confiée à un de ses collègues, et qu’un mystérieux témoin tente de le faire chanter…
Ce qu’on en pense
Premier long métrage du directeur photo Régis Blondeau, Sans répit est le remake du film coréen Hard Day de Kim Seong-hun. Un thriller semi parodique, dans lequel Franck Gastambide, plus « Vin Diesel de Melun » que jamais, joue un flic ripoux embarqué dans un engrenage infernal. Les situations tragi-comiques s’enchainent à un rythme élevé et Simon Abkarian fait une composition réjouissante dans le rôle du méchant. La photo est soignée (normal), mais la réalisation manque un peu de rythme. On s’amuse bien quand même.
Belfast
Par J.V
Le pitch
Été 1969 : Buddy (Jude Hill), 9 ans, sait parfaitement qui il est et à quel monde il appartient, celui de la classe ouvrière des quartiers nord de Belfast où il vit heureux, choyé et en sécurité. Mais, alors que le premier homme pose le pied sur la Lune et que la chaleur du mois d’août se fait encore sentir, les rêves d’enfant de Buddy virent au cauchemar. La grogne sociale latente se transforme soudain en violence dans les rues du quartier…
Ce qu’on en pense
A peine sorti de son adaptation fastueuse d’Agatha Christie (Mort sur le Nil), il faut faire le grand écart pour entrer dans le nouveau film de Kenneth Branagh qui en est presque l’exact opposé. Un petit film social intimiste en noir et blanc sur le conflit Irlandais vu par les yeux d’un enfant de 9 ans. Avec 6 nominations, Belfast n’en constitue pas moins un solide outsider pour les Oscars. La simplicité de la réalisation, la portée politique du sujet et la qualité de l’interprétation (Jude Hill, Caitrinoa Balfe, Jamie Dornan, Judi Dench, Ciaran Hinds) font de ce film inattendu une très jolie réussite.
Winter on Fire
Par Ph.D
La guerre que la Russie vient de déclencher en Ukraine redonne de l’actualité à ce documentaire Ukrainien que Netflix a mis en ligne en 2017 et qui a le mérite d’éclairer la situation actuelle. Le film retrace, en effet, les 93 jours de manifestations, entre 2013 et 2014, qui ont conduit à la démission du président pro-Russe Viktor F. Yanukovich. Alors qu’il s’était engagé à demander le rattachement de son pays à l’Europe, Yanukovitch négociait en fait avec Moscou et son gouvernement a réprimé les manifestations avec une férocité qui a fait une centaine de morts. Malgré la répression, les manifestants n’ont pas cédé et le régime est tombé, ouvrant la voie à des élections démocratiques, mais aussi à l’ouverture, téléguidée par Moscou, d’un front séparatiste dans la région du Donbass. A travers les images d’actualité et les interviews de protestants, d’activistes, de journalistes, d’infirmiers, d’artistes et de membres du clergé, Winter on Fire documente le combat des ukrainiens pour défendre l’idée d’unratachement de leur pays à l’Europe. Une idée pour laquelle un million d’habitants de Kiev sont descendus dans la rue au plus fort des manifestations…
César 2022 : Le Palmarès
Par Ph.D
La 47e cérémonie des César qui s’est tenue le 25 février à l’Olympia sous la présidence de la réalisatrice Danièle Thompson, avec Antoine de Caunes comme maître de cérémonie a renoué avec une dignité et un glamour qu’on ne lui connaissait plus depuis quelques années. La présence d’Adam Driver (nommé au César du meilleur acteur pour Annette) et de Cate Blanchett (Cesar d’honneur) a même donné un côté Hollywoodien au grand raout annuel du cinéma français qui s’est prolongé sur plus de trois heures, sans grandes surprises au palmarès (Illusions perdues l’a emporté avec 7 statuettes dont celle du meilleur film et Onoda n’a eu qu’un prix, celui du scénario), ni trop de moments génants (navrante Marie s’infiltre) et avec même quelques instants de grace (l’hommage poignant de Xavier Dolan à Gaspard Ulliel, Omar Sy faisant danser l’Olympia, le live des Sparks ). Franck Gastambide a même réussi à faire rire en reprenant à son compte le discours qu’aurait dû prononcer Carole Bouquet. C’est dire si on revenait de loin !
Interview : Maria de Medeiros
Par Ph.D
A jamais assimilée à la douce fiancée de Bruce Willis dans Pulp Fiction, Maria de Medeiros multiplie pourtant les rôles au cinéma et au théâtre et ne craint pas de passer derrière la caméra quand un sujet lui tient à coeur. C’était le cas de Pour nos enfants, une pièce de Laura Castro, qu’elle a elle même jouée au Brésil. Le film qu’elle en a tiré raconte les retrouvailles conflictuelles d’une mère et sa fille : l’une ayant connu la dictature et la torture, l’autre essayant d’avoir un enfant avec une autre femme par procreation artificielle… Un mélo Almodovarien, dont la trame et les thématiques (rapports mère-fille, homosexualité féminine, mémoire de la dictature…) rappellent fortement celles de Madres Paralelas, dernier opus en date du maître madrilène. De passage à Nice pour l’avant première, la réalisatrice nous en a parlé…
Saviez-vous que Pedro Almodovar travaillait sur les mêmes thèmes que vous ?
Pas du tout, et heureusement ! Je n’ai pas encore vu son nouveau film mais on m’en parle beaucoup, effectivement. La pièce de Laura Castro était une comédie Almodovarienne assez solaire. Il me semble que le film est plus sombre. Pendant les 5 ans qu’a pris le processus d’écriture et de production, le Brésil a vu l’élection d’un nouveau leader populiste, Bolsanaro, dont la politique et les discours renvoient aux années noires de ce pays. J’avais encore plus à coeur de traiter la question de la dictature et des disparus…
Vous avez toujours voulu réaliser ?
C’est venu trés vite. J’ai commencé à faire l’actrice par hasard, parce qu’on m’a proposé un rôle que je ne pouvais pas refuser dans le film d’un grand réalisateur brésilien (Silvestre de Joao César Monteiro NDLR). J’avais 15 ans et je me destinais aux Beaux Arts. J’ai découvert sur le tournage les deux côtés du cinéma : le plaisir de jouer et la machinerie qu’il y a autour. Réaliser me permet de renouer avec ma vocation première pour la peinture : le cadre, le mouvement la couleur… J’ai réalisé mon premier film vers 19-20 ans et je recommence dès que l’occasion se présente. Le problème c’est qu’on me propose pas mal de rôles au théatre et au cinéma, et j’ai tendance à faire passer mes projets perso après… Mais là, je me suis remis tout de suite à l’écriture d’ un nouveau film qui aura pour cadre la révolution cubaine. En attendant qu’il soit produit, je continue à jouer au théâtre Les Parents terribles, la pièce qu’on a créée à Nice. Une magnifique aventure…
On continue à vous parler de votre rôle dans Pulp Fiction?
Oui tout le temps ! Le film a marqué les gens et je suis trés heureuse d’y avoir participé. Travailler avec Quentin Tarantino ‘a beaucoup appris et la présentation du film à Cannes est un grand souvenir.
BigBug
Par Philippe DUPUY
Le pitch
En 2045, l’intelligence artificielle est partout. À tel point que l’humanité compte sur elle pour assouvir ses moindres besoins et ses moindres désirs – même les plus inavouables… Dans un quartier résidentiel tranquille, quatre robots domestiques décident soudain de retenir leurs maîtres en otages dans leur propre maison. Enfermés ensemble, une famille pas tout à fait recomposée, une voisine envahissante et son robot sexuel entreprenant sont donc obligés de se supporter dans une ambiance de plus en plus hystérique ! Car, à l’extérieur, les Yonyx, dernière génération d’androïdes, tentent de prendre le pouvoir. Tandis que la menace se rapproche, les humains se trompent, se jalousent, et se déchirent sous les yeux ahuris de leurs robots d’intérieur. Et si, au fond, c’étaient les robots qui avaient une âme ?
Ce qu’on en pense
Aussi étonnant que cela puisse paraître après les succès populaires d’Amélie Poulain (2001) et d’Un long dimanche de fiançailles (2004), Jean-Pierre Jeunet, auteur culte de Delicatessen débauché par Hollywood pour réaliser un épisode de la saga Alien (La Résurrection), fait aujourd’hui partie des réalisateurs qui ont le plus grand mal à faire produire leurs films dans son propre pays. Le scénario de BigBug a ainsi été refusé par tous les producteurs de France et de Navarre avant que Netflix ne se décide enfin à le produire. Peut-être est-ce d’avoir trop attendu pour le mettre en scène (presque dix ans ont passé depuis son dernier film L’Extravagant voyage du jeune et prodigieux TS Spivet) ? Toujours est-il que BigBug manque singulièrement de tonus. Dommage, car cette satire à la Tati d’un monde dominé par les robots et l’Intelligence artificielle aurait pu avoir du mordant. Las, Jeunet n’en tire rien d’original. La mise en scène est paresseuse et les acteurs (Elsa Zylberstein, Stephane de Groodt, Isabelle Nanty, Alban Lenoir, François Levantal, André Dussolier…), mal dirigés, enchainent les scènes génantes dans un décor steampunk aux couleurs écoeurantes La farce futuriste ne prend pas. Un Big Bide qui ne va pas arranger les affaires du réalisateur.
The Lost Daughter
Par Ph.D
Le pitch
Lors de vacances en Grèce, Leda (Olivia Colman) est fascinée par une jeune mère et sa fille qu’elle observe sur la plage. Bouleversée par leur relation fusionnelle (ainsi que par leur grande famille bruyante et intimidante), Leda est submergée par la terreur, la confusion et l’intensité de ses souvenirs de maternité précoce. Un acte impulsif la replonge dans les méandres étranges et inquiétants de son esprit, l’obligeant à affronter les choix peu conventionnels qui ont été les siens en tant que jeune mère et leurs conséquences…
Ce qu’on en pense
Adapté du roman d’Elena Ferrante, Poupée Volée (2009), The Lost Daughter est la première réalisation de Maggie Gyllenhaal, soeur de Jake et fille de Stephen Gyllenhaal, dont on connaissait déjà les talents d’actrice (Donnie Darko, La secrétaire, White House Down…) mais dont on ignorait ceux pour la mise en scène. Le film impressionne. C’est un drame psychologique dans lequel l’oscarisée Olivia Colman (The Crown, La Favorite) joue une prof de lettres renfermée et limite acariâtre, dont les vacances en Grèce sont perturbées par l’arrivée d’une riche, nombreuse et bruyante famille qui lui dispute son coin de plage. Est-ce pour cela qu’elle chippe la poupée fétiche d’une petite fille que sa jeune mère (Dakota Johnson) a le plus grand mal à canaliser ? Ou bien parce que leur relation lui rappelle celle qu’elle a connue, vingt ans plus tôt, avec sa première fille ? Alors que la jeune maman se confie à elle, lui avoue ses difficultés et ses incartades (elle flirte avec le jeune plagiste pour fuir un mari violent), les souvenirs douloureux de sa propre jeunesse remontent à la surface et Leda se renferme dangereusement sur elle-même, adoptant un comportement de plus en plus erratique. La mise en scène, avec une caméra qui glisse d’un personnage à l’autre avec fluidité, captant gestes et regards dans une tension permanente, suggère un drame passé et un autre à venir. Jessie Buckley (Judy, Je veux juste en finir) , joue Leda jeune, intellectuelle brillante mais mère défaillante et épouse inconstante. L’île grecque offre un décor ensoleillé à la noirceur de son âme blessée…
The Green Knight
Par Ph.D
Le pitch
Gauvain (Dev Patel) , neveu téméraire et têtu du roi Arthur (Sean Harris), se lance dans une quête audacieuse pour affronter le chevalier vert (Ralph Ineson), un gigantesque étranger à la peau émeraude qui met à l’épreuve le courage des hommes. En chemin, il devra affronter des fantômes, des géants, des voleurs et des comploteurs qui lui permettront de prouver qu’il est digne de devenir chevalier. Et peut-être roi ?
Ce qu’on en pense
Honnêtement, si on n’avait pas lu le nom de David Lowery au générique, on n’aurait peut-être pas passé la première demi-heure. On aurait eu tort ! Sous ses faux airs de nanar de la Table ronde à faire passer Kaamelott pour Excalibur, The Green Knight cache, en effet, un de ces films hallucinogènes comme on n’en voit plus, hélas, au cinéma. C’est sur les plateformes de streaming que se réfugie aujourd’hui le cinéma d’auteur trop barré pour les multiplexes. Prime Video accueille donc le nouveau film du réalisateur de Dead Room, St Nick , Les Amants du Texas et du déjà très Ofniesque A Ghost Story. Un vrai-faux film de chevalerie qui prend prétexte de la quête absurde de Gauvain pour entrainer le spectateur dans un voyage lysergique plein de géants, de sorcières et de renards parlants dans une forêt enchantée digne de Brocéliande. Comme il l’avait fait avec le film de fantômes, le réalisateur joue avec les codes du film de chevalerie pour enchaîner les scènes délirantes et produire des images fabuleuses. Le rythme est lent et on ne saisit pas toute la symbolique, mais ça vaut le coup de s’accrocher car, en plus d’être déroutant et beau, le film est drôle. Dev Patel y campe un chevalier christique mais complètement paumé, jouet d’un quarteron de donzelles folles de son corps et de sa quête…
Tick, Tick… Boom !
Par Ph.D
Le pitch
New York 1990. À l’approche de ses 30 ans, Jonathan Larson (Andrew Garfield) un jeune compositeur prometteur, prépare la présentation publique de sa premièee comédie musicale et jongle entre l’amour, l’amitié et l’envie de réussir quelque chose de grandiose avant qu’il ne soit trop tard.
Ce qu’on en pense
Acteur de séries (West Wing, Hamilton, Song Exploder), Lin Manuel Miranda signe un premier long métrage remarquable (et remarqué) avec ce biopic de Jonathan Larson, auteur et compositeur de comédies musicales novatrices dans les années 90 (Suburbia, Tick Tick Boom ! Rent). Décédé à la veille de connaître le succès avec Rent (qui s’est jouée 12 ans sur Broadway) et peu connu de ce côté-ci de l’Atlantique, Larson est une légende aux Etats-Unis, où son travail a été récompensé de trois Tony Awards et d’un Prix Pulitzer à titre posthume. Le film raconte l’écriture de sa deuxième pièce (Tick Tick… Boom !), alors qu’il vivait en coloc et travaillait dans un dinner pour payer le loyer. Mélant reconstitutions d’auditions ou de représentations publiques, fausses vidéos privées, scènes oniriques et séquences de pure comédie musicale, le film est tout autant un portrait de l’auteur que celui d’une génération de jeunes artistes cherchant à percer dans le New York des années Sida. Décidément pertinent sur ses choix post Spiderman, Andrew Garfield est formidable dans un rôle à la fois parlé et chanté et mérite sa nomination à l’Oscar du meilleur acteur. Les scènes musicales et les chorégraphies sont superbement filmées et permettent de découvrir les talents d’écriture et de composition de Jonathan Larson. Elles s’intègrent parfaitement dans la trame du récit, mis en scène et monté avec une virtuosité épatante pour un premier film. Sorti en catimini sur Netflix en novembre, le film bénéficie d’une nouvelle exposition avec sa nomination aux Oscars.
Adieu Paris
Par J.V
Le Pitch
Un vieux bistro parisien au charme éternel. Huit messieurs à table, huit grandes figures. Ils étaient les « rois de Paris »… Des trésors nationaux, des chefs-d’œuvre en péril. Un rituel bien rodé… Un sens de l’humour et de l’autodérision intacts. De la tendresse et de la cruauté. Huit vieux amis qui se détestent et qui s’aiment. Et soudain un intrus…
Ce qu’on en pense
Amoureux du Verbe, de Paris, des bistros et des acteurs à forte personnalité, Edouard Baer a décidé de les réunir pour son nouveau film, entièrement tourné à La Closerie des Lilas, cantine emblématique de la Rive-Gauche, où se retrouvent artistes et intellectuels. Benoit Poelvoorde, Pierre Arditi, Gérard Depardieu, François Damiens, Jackie Berroyer, Bernard Le Coq, Bernard Murat, Daniel Prevost et le regretté Jean-François Stevenin dont ce fut l’un des derniers rôles, n’ont pas à forcer beaucoup leur talent pur jouer ces « rois de Paris« , soiffards et bambocheurs au verbe haut. La mise en scène, faussement bordélique, veille à donner à chacun le temps de jouer sa partition. Une évocation du « monde d’avant » dans lequel Paris était une fête.
Les Promesses
Par J.V
Le Pitch
Maire d’une ville du 93, Clémence ( Isabelle Huppert) livre avec Yazid (Reda Kateb), son directeur de cabinet, une bataille acharnée pour sauver le quartier des Bernardins, une cité minée par l’insalubrité et les « marchands de sommeil » Ce sera son dernier combat, avant de passer la main à la prochaine élection. Mais quand Clémence est approchée pour devenir ministre, son ambition remet en cause tous ses plans
Ce qu’on en pense
Après La Mécanique de l’ombre, Thomas Kruithof confirme son goût pour la politique et les sphères du pouvoir. Isabelle Huppert et Reda Kateb épatent dans des rôles très bien écrits (Jean Baptiste Delafon, co-créateur du Baron Noir a collaboré au scénario), crédibles et parfaitement complémentaires . Malgré un final précipité, l’intrigue tient la distance et la réflexion se révèle particulièrement pertinente en cette période pré-electorale.
The Tender Bar
Par Ph.D
Le pitch
J.R (Daniel Ranieri/Tye Sheridan), un garçon élevé par sa mère (Lily Rabe), passe des heures à écouter son père (Max Martini) à la radio et à trainer dans le bar tenu par son oncle Charlie (Ben Affleck), une personalité haute en couleurs, qui remplace son père aux abonnés absents . Alors que sa mère fait tout pour qu’il puisse accéder à des opportunités dont elle n’a jamais pu bénéficier – et ainsi quitter la maison délabrée de son grand père ( Christopher Lloyd), qui héberge toute la famille – J.R. décide de poursuivre ses rêves personnels et professionnels avec courage et maladresse, avec son oncle Charlie comme ange gardien…
Ce qu’on en pense
Adapté des mémoires éponymes du journaliste et romancier américain J.R Moehringer, The Tender Bar (jeu de mots sur bar tender -barman- et tendre bar) est le nouveau film de George Clooney qui aurait pu se caster dans le rôle du père absent, mais ne l’a pas fait, préférant sans doute se concentrer sur la réalisation de cette petite dramédie familiale, touchante et drôle à la fois. L’histoire est racontée du point de vue de l’enfant (Daniel Ranieri, formidable) puis de l’adolescent (Tye Sheridan) qui observe le monde autour de lui avec tendresse et empathie, y compris pour ceux, comme son père, qui n’en méritent pas autant. Un felgood movie sur la résilience qui donne leur chance à tous ses personnages, avec Ben Affleck dans le rôle du tonton protecteur, barman philosophe et amateur de littérature qui donnera au jeune JR le goût des belles lettres et forgera sa vocation de romancier.
Spencer
Par Ph.D
Le pitch
Le fabuleux mariage de la princesse Diana et du prince Charles n’est plus qu’un lointain souvenir. Bien que les rumeurs de liaisons et de divorce abondent, la paix est ordonnée pour les festivités de Noël au domaine de la reine à Sandringham. Il y a à manger et à boire, à tirer et à chasser. Diana (Kristen Stewart) connaît le jeu. Mais cette année, les choses seront bien différentes…
Ce qu’on en pense
Spécialiste des biopics haut de gamme (Jackie, Neruda), le chilien Pablo Larrain s’attaque à la figure de la princesse Diana avec ce film produit par la plateforme d’Amazon, Prime Video. Boudé à Venise, Spencer est pourtant excellent. Kristen Stewart y fait une composition éblouissante dans le rôle de Lady Di, que l’on retrouve au bord de la crise de nerfs, à la veille des fêtes de Noël en famille (royale) à Sandringham. Pourtant originaire de la région, où sa famille possédait une propriété quasiment contigüe à celle de la Reine, Diana se perd en route avec son boxter Porsche, fait sensation dans le bar où elle s’arrête pour demander son chemin et arrive après tout le monde au château, où il est de coutume de se peser avant et après les festivités et de prendre quelques kilos pour prouver combien on s’est amusé. Une coutume à laquelle la princesse ne se prête que de trés mauvais grace, avant de rejoindre ses appartements et de s’y enfermer, sans avoir croisé aucun membre de la famille. Le ton est donné. Le film se concentre sur la détresse psychologique de Lady Di durant son court séjour (trois jours à tenir) et montre combien elle était seule et se sentait en permanence humiliée. Son mari, le Prince Charles lui offre pour Noël le même collier de perles qu’à sa maitresse, la Reine ne lui adresse quasiment jamais la parole, les serviteurs l’espionnent en permanence… Ne pas s’attendre à un spin off de The Crown : Pablo Larrain est un grand cinéaste et il use de tout son art pour installer un climat plutôt que raconter la triste histoire de Lady Di. On pourra trouver qu’il prend trop de distance et de liberté avec son sujet, mais c’est justement ce qui fait l’intérêt de Spencer. Un film magnifique, que l’on aurait aimé découvrir au cinéma plutôt que sur une plateforme de streaming.
The Chef
Par Ph.D
Le Pitch
« Magic Friday » : le vendredi avant Noël, la soirée la plus fréquentée de l’année. Dans un restaurant gastronomique de Londres, côté cuisine, à quelques minutes du coup de feu, tout le personnel est en ébullition. Mais les problèmes s’accumulent autour du chef étoilé Andy Jones (Stephen Graham) et de sa brigade. S’ajoute à cela la pression constante d’une clientèle toujours plus exigeante qui menace de mener le restaurant à sa perte…
Ce qu’on en pense
Il ne faudrait pas le réduire à cela, mais le premier long métrage de Philip Barantini, que l’on a découvert acteur dans la série Band of Brothers, est d’abord un tour de force. Le film est, en effet, constitué d’un seul et unique plan séquence d’un peu plus d’une heure trente. Dans ce laps de temps, le réalisateur a reconstitué un service dans un grand restaurant londonien, la caméra faisant des allers retours incessants entre les cuisines et la salle, au milieu du personnel et des clients, sans jamais couper. Le film débute avec l’arrivée du chef (Stephen Graham), qui traverse la salle encore vide pour se rendre en cuisine et se termine à la fin du service. Entre temps, le cuisinier vedette du restaurant aura eu maille à partir avec ses associés, sa femme, une critique gastronomique, des clients allergiques et différents membres de sa brigade, courant sans cesse de la cuisine aux réserves, au bar (il est alcoolo) et à la salle. On ne se rend pas compte immédiatement du procédé (qui a nécessité une demi douzaine de prises et autant de nuits de répétitions dans un vrai restaurant), mais il provoque une sensation d’immersion totale. Servi par une brochette d’excellents acteurs, le film se regarde comme un thriller indé, avec des personnages bien caractérisés et une tension permanente. Ce Chef mérite quatre étoiles !
Interview : Claude Lelouch
L’Amour c’est mieux que la vie est le 50e film de Claude Lelouch. Venu le présenter à Nice, le cinéaste nous a parlé du tournage avec sa passion habituelle…
Auriez-vous imaginé pouvoir réaliser 50 films ?
Jamais de la vie ! Cinquante, c’est énorme. Je ne sais toujours pas comment j’ai réussi à en faire autant. Si on me donnait à lire le scénario de ma vie, je n’y croirais pas. Un film c’est toujours un miracle, alors cinquante…
Quelles étaient vos intentions pour celui-là ?
L’idée était de faire une trilogie. A mon âge (84 ans NDLR) j’ai envie de mettre au propre ma vie de cinéaste et d’homme. J’ai fait ce film pour mes enfants et petites enfants, pour leur dire deux trois choses dont je suis à peu prés convaincu sur l’amour , l’amitié et l’argent. A travers une histoire simple, parce que les choses compliquées doivent être énoncées simplement. Je suis parti d’histoires vraies. La plupart de celles qui sont racontées dans le film sont arrivées.
Quel a été le point de départ ?
Une rencontre avec Jacques Brel quelques temps avant sa mort. On buvait une bière et il semblait l’apprécier au-delà de toute attente. Je lui en ai fais la remarque et il m’a dit : « Je déguste cette bière car c’est peut-être la dernière que je je bois. Depuis que je fais les choses pour la dernière fois, enfin j’apprécie la vie. Il a fallu qu’on me donne une date de fin pour cela »…. Le personnage que joue Gérard Darmon ressemble un peu à Jacques Brel. Avec les deux autres, ce sont un peu Les Trois mousquetaires d’aujourd’hui. C’est le roman qui m’a le plus passionné quand j’étais petit. J’y reviens toujours…
Pourquoi ce titre ?
J’ai toujours pensé que l’amour c’est mieux que la vie. C’est la plus belle invention de la vie, dangereuse, risquée, fragile, mais si belle…
Comment vous est venue cette belle idée de faire de Lino Ventura le père de Sandrine Bonnaire ?
Mes films font partie de la mémoire collective maintenant. C’est comme s’ils n’en formaient qu’un seul. En un sens, Darmon et Bonnaire sont un peu les enfants de mes plus anciens films. Pour montrer d’où vient le personnage de Sandrine Bonnaire, il aurait fallu que je filme plusieurs scènes alors que là, avec quelques images de l’Aventure c’est l’aventure ou de La Bonne année, ça suffit. C’est évident que son père a dû faire les 400 coups et même peut-être un casse à Cannes, et que sa mère défendait les prostituées…
Le covid semble s’être invité dans le film. Soudain, les acteurs portent des masques…
Mais la vie s’invite dans tous mes films ! J’adore ça. Je travaille avec le plus grand des scénaristes qui s’appelle la vie. En l’occurrence, ça m’a permis de de filmer encore mieux les yeux, de me rapprocher encore plus des acteurs et de faire de plus longues sequences. Tous mes films sont témoins de leur temps. Je prends un grand plaisir à m’adapter à l’actualité.
Vous avez participé à un hommage à Robert Hossein à la Cinémathèque de Nice. Comment était-il sur le tournage ?
C’est une chance incroyable de lui avoir fait faire son dernier film. Il a tourné quelques jours avant de mourir. Personne ne s’y attendait, il semblait en bonne forme et il était fou de joie de tourner. Il m’a appelé le lendemain pour me dire que je lui avais offert un beau moment de cinéma. C’était un grand acteur metteur en scène et homme de théâtre. Il a fait de grands spectacles pour le grand public. Je trouve qu’il est parti sur une trés jolie note.
Toujours un pincement au coeur en revenant à Nice ?
Oui, toujours. J’avais 5-6 ans ans la première fois que j’y suis venu. Ma mère avait pris l’habitude de me cacher dans les cinémas permanents, pour échapper aux rafles. Il y en avait un sur la Prom, où j’ai passé des après midi entières. J’étais un enfant assez turbulent et c’était le seul endroit où je me tenais tranquille. Le cinéma m’a sans doute sauvé la vie et je vis avec lui une grande histoire d’amour depuis tout ce temps.