Cinéma

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Palm Springs

Cinéma|

Par Philippe DUPUY

Le pitch

L’insouciant Nyles (Andy Samberg) fait la connaissance lors d’un mariage à Palm Springs de Sarah (Cristin Milioti), soeur de la mariée et demoiselle d’honneur. Les choses se compliquent rapidement lorsque le duo se retrouve piégé dans une boucle temporelle, contraint de revivre sans cesse la même journée.. .

Ce qu’on en pense

Devenu encore plus culte avec le confinement, Un Jour sans fin d’Harold Ramis avec Bill Murray,  n’en finit plus de faire des émules. Deux films ce mois ci, The Map of Tiny Pretty Things et Palm Springs,  reprennent le fameux dispositif qui veut que le héros se réveille chaque matin dans la même journée qui se répète en boucle éternellement. Dans Palm Springs de l’inconnu Max Barbakow, Andy Samberg (Brooklyn Nine Nine), clone bronzé d’Adam Sandler, joue Nyles,  un trentenaire invité à la noce de la meilleure amie de sa copine, qui s’y retrouve irrémédiablement coincé après avoir visité une mystérieuse grotte dans le désert. Il revit depuis des lustres la même journée,  qui se termine immanquablement par le même repas de noce. Mais, au lieu de maudire son sort comme Phil Connors le héros d’Un Jour sans fin, Nyles a pris goût à son statut d’éternel noceur et jouit de cette journée de vacances ensoleillée et sans soucis…  Jusqu’au jour où Sarah, la sœur de la mariée (Cristin Milioti, vue dans Black Mirror, Fargo et Modern Love) a la mauvaise idée de le rejoindre dans la fameuse grotte et se retrouve elle aussi coincée dans la boucle temporelle. Elle a beau avoir un petit crush pour Nyles, pas question pour elle de rester bloquée là indéfiniment. Sarah va tout tenter pour les faire sortir de la boucle. Et elle ne manque pas d’idées ! Plus maline qu’il n’y parait au premier abord, cette comédie sentimentale pop aux couleurs pastels est une excellente surprise. Le couple vedette est assez irrésistible et la réflexion qu’elle propose sur la vie, l’amour et l’éternité est très pertinente. Un jour sans fin, ce n’est peut -être pas si mal après tout?  Tout dépend du jour et d’avec qui on le passe…

La Mission

Cinéma|

Par Ph.D

Le Pitch

Cinq ans après la fin de la Guerre de Sécession, le capitaine Jefferson Kyle Kidd (Tom Hanks), vétéran de trois guerres, sillonne le pays de ville en ville en lisant les nouvelles en public. Au Texas, il croise le chemin de Johanna (Helena Zengel), une enfant de 10 ans capturée 6 ans plus tôt par la tribu des Kiowa et accepte de la reconduire dans sa famille. Pendant des centaines de kilomètres, alors qu’ils traversent une nature hostile, ils vont devoir affronter les nombreux écueils, aussi bien humains que sauvages, qui jalonnent la route vers ce que chacun d’entre eux pourra enfin appeler son foyer…

Ce qu’on en pense

Paul Greengrass (Jason Bourne , Green Zone, Un 22 juillet) retrouve Tom Hanks, qu’il avait mis en scène en 2013 dans Capitaine Philips pour ce western Fordien,  qui devait sortir en salles mais qu’Universal a finalement fourgué à Netflix pendant la pandémie. Un film de facture étonnamment classique qui ravira les amateurs de westerns humanistes, quelque part entre La Prisonnière du désert et True Grit. Tom Hanks, qui n’avait encore pas posé sa marque sur le genre,  y trouve un rôle à ses mesures (celui du sauveteur au grand coeur),  mais la révélation du film est Helena Zengel, que l’on avait découvert en 2019 dans le drame allemand Benni. Dans le rôle de la jeune fille enlevée par les indiens , elle fait passer beaucoup de choses avec peu de mots et d’effets. Bien que le titre originel (News of the World) mette l’accent sur le métier du héros, qui lit les journaux en public pour gagner sa vie,  le rôle éducatif et démocratique de la presse dans la conquête de l’Ouest est à peine effleuré par la réalisation, qui met plutôt l’accents sur les rapports qui se nouent entre les deux protagonistes. Le film y gagne en émotion ce qu’il  perd un peu en profondeur, mais reste très recommandable.

Malcolm & Marie

Cinéma|

Par Ph.D

Le Pitch

Après la projection en avant-première de son dernier film, un cinéaste (John David Washington) rentre chez lui avec sa petite amie (Zendaya). Alors qu’il est certain que son film rencontrera un succès critique et commercial, la soirée prend une tournure inattendue : les deux amoureux doivent affronter certaines vérités sur leur couple qui mettent à l’épreuve la force de leurs sentiments…

Ce qu’on en pense

Devenu en deux films (Another Happy Day, Assassination Nation) et une série (Euphoria) un des grands espoirs du cinéma américain, Sam Levinson a profité de l’interruption du tournage d’Euphoria à cause du Covid pour rameuter son actrice vedette (la filiforme et bombissime Zendaya) et le trés sexy John David Washington pour mettre en boite, vite fait bien fait,  ce drame conjugal en noir et blanc qu’on pourrait croire adapté d’une pièce de théâtre. Se jouant avec maestria du huis clos à deux personnages,  grâce à une mise en scène de haute volée, Levinson nous embarque dans une scène de ménage d’1h47 qui vaut son pesant de vaisselle cassée (en fait non: tout est verbal). Malcolm a oublié de remercier Marie pour sa contribution au scénario du film qu’elle a largement inspiré et qu’il vient de présenter avec succès en avant première. Grave erreur : Marie n’est pas de celle qui s’écrasent ou qu’on peut écraser de sa superbe ou de son  génie, réel ou supposé. Elle va le lui faire savoir au cours de longues joutes verbales filmées avec virtuosité,  dans une villa d’architecte entièrement vitrée et ouverte sur un jardin, ce qui permet à la caméra de glisser constamment de l’extérieur à l’intérieur. Pour l’anecdote, Sam Levinson avait fait la même erreur que son héros lors de la première d’Assassination Nation. La dispute conjugale qui s’en est suivi a inspiré le film. Merci madame Levinson ! 

The Nest

Cinéma|

Par Ph.D

Le Pitch

Dans les années 1980, Rory (Jude Law), un ancien courtier devenu un ambitieux entrepreneur, convainc Allison (Carrie Coon), son épouse américaine, et leurs deux enfants de quitter le confort d’une banlieue cossue des États-Unis pour s’installer en Angleterre, son pays de naissance. Persuadé d’y faire fortune, Rory loue un vieux manoir en pleine campagne où sa femme pourra continuer à monter à cheval. Mais l’espoir d’un lucratif nouveau départ s’évanouit rapidement et l’isolement fissure peu à peu l’équilibre familial...

Ce qu’on en pense

Découvert en 2012 avec le formidable  Martha Marcy May Marlene ( prix de la mise en scène à Sundance),  le Canadien Sean Durkin n’avait plus donné de nouvelles depuis. La présentation de son nouveau film en septembre  à Deauville a fait l’effet d’une bombe. The Nest  y a raflé  presque tous les prix : Prix de la critique, Grand Prix  et  prix de la révélation. Jude Law, qu’on croyait aussi perdu pour le cinéma, y fait aussi un retour fracassant, dans un rôle que Jack Nicholson aurait pu porter en son temps. Celui d’un trader qui,  sentant le vent (mal) tourner aux Etats Unis où il a pas mal réussi, embarque sa famille pour un nouveau départ dans son pays d’origine (l’Angleterre) et  l’isole dans un immense manoir décrépi en pleine campagne pendant qu’il essaie de se refaire un portefeuille en ville.  Toute ressemblance avec l’écrivain incarné par Nicholson dans  Shining n’est certainement pas fortuite, car le film flirte dés le début avec le fantastique et installe un climat d’angoisse effrayant. Sean Durkin filme la chute d’un flambeur et le délitement de son couple comme s’il était aux commandes d’un film d’horreur. La mise en scène distille une tension qui jamais ne s’apaise et la direction d’acteurs magnifie le couple formé par Jude Law et l’inconnue Carrie Coon, qui piétine sans vergogne les plate-bandes de Cate Blanchett. En d’autres circonstances, le film aurait eu sa place en compétition à Cannes. On regrette, en tout cas,  de ne pas l’avoir découvert en salles plutôt qu’à la télé.

One Night in Miami

Cinéma|

Le pitch

Miami, le 25 février 1964, le jeune Cassius Clay (Eli Goree) devient champion du monde de boxe, catégorie poids lourds. Au lieu de fêter sa victoire en ville, il rejoint  ses amis, l’activiste Malcolm X (Kingsley Ben Adir) , le chanteur Sam Cooke (Leslie Odom Jr) et la star du football Jim Brown (Aldis Hodge) dans un motel,  où ils évoquent durant toute la nuit le combat pour les droits civiques et leurs convictions religieuses..

Ce qu’on en pense

Adapté d’une pièce de théâtre, ce premier film signé Regina King en a les qualités (profondeur thématique, étude psychologique, écriture des dialogues) et les défauts (huis clos, longueurs). L’histoire se base sur le fait que Cassius Clay, futur Mohamed Ali, Malcolm X, Jim Brown et Sam Cooke ont effectivement fêté ensemble la victoire du boxeur sur Sonny Liston et imagine ce qu’ils ont pu se dire ce soir là à Miami, en plein mouvement pour les droits civiques. Suivant l’enseignement politico-religieux  de Malcolm X,  Cassius Clay s’apprête à faire son coming out religieux et à se faire appeler Mohamed Ali. Les dialogues permettent à chacun des protagoniste de mettre à l’épreuve son engagement et sa foi : Cassius tout feu tout flamme,  le basketteur Jim Brown plus attaché aux plaisirs terrestres qu’à ceux promis par le Prophète, Sam Cooke soucieux de ne pas mettre en péril sa carrière et son business et Malcolm X tentant de les gagner tous à sa cause, d’autant plus pressé de le faire qu’il sent que ses jours sont comptés. Le film déroule son programme sans surprise,  dans une reconstitution un peu clinquante des années 60,  sans convaincre vraiment.  Du théâtre téléfilmé.  

The Dig

Cinéma|

Par Ph.D

Le Pitch

A la veille de la deuxième guerre mondiale, Miss Pretty (Carey Mulligan), une riche veuve anglaise, engage un archéologue amateur, Basil Brown (Ralph Fiennes)  pour exhumer une sépulture antique dans sa propriété. Ils découvrent alors un ancien navire funéraire saxon et son trésor,  qui pourrait bouleverser les connaissances sur le peuplement de l’Angleterre. Ensemble, ils doivent se serrer les coudes face au British Museum,  qui entend s’approprier la découverte …

Ce qu’on en pense

Confiée à Simon Stone (Le Secret des Finch),  cette adaptation du roman historique de John Preston sur la découverte du site archéologique de Sutton Hoo en Angleterre, séduit par son classicisme un peu suranné autant que par le jeu des acteurs vedettes : Carey Mulligan (Drive) en riche veuve érudite et pleine d’humanité et Ralph Fiennes en archéologue amateur, peinant à s’affirmer face aux pontes du British Museum. Le scénario charge un peu la barque (le drakkar en l’occurence),  avec une romance un peu inutile entre deux seconds rôles (Lily James et Johnny Flynn),  mais le film se regarde avec plaisir et d’autant plus d’intérêt qu’il s’agit d’une histoire vraie.

Le Tigre blanc

Cinéma|

Par Ph.D

Le Pitch

Mal né,  mais rusé et ambitieux, le jeune indien Balram Halwai (Adarsh Gourav) parvient à devenir le chauffeur d’une riche famille d’exploiteurs. La société l’ayant formé à une unique fonction – celle de servir – Balram se rend vite indispensable aux yeux de ses nouveaux maîtres. Mais alors qu’il croit être tiré d’affaire, un drame vient lui rappeler qu’ils n’hésiteront pas à le sacrifier si les choses tournent mal.  Balram se rebelle alors contre un système truqué et inégalitaire pour devenir un maître d’un nouveau genre…

Ce qu’on en pense

Mix de Parasite et de Slumdog Millionaire, Le Tigre Blanc nous entraîne dans l’Inde contemporaine,  où il faut une sacré dose d’ambition et de culot, mais surtout pas trop de scrupules,  pour réussir quand on vient des castes inférieures. C’est le cas de Balram (Adarsh Gourav)  qui manifestait à l’école primaire une intelligence supérieure à la moyenne,  mais que sa famille a préféré mettre au travail à casser du charbon plutôt que de l’encourager à poursuivre des études. Sans instruction, il devra gagner chèrement sa place au soleil, en écrasant les plus faibles et en s’attirant les bonnes grâces des puissants, sans éveiller leur méfiance. Découvert à Deauville avec l’excellent 99 Homes, Ramin Bahrani adapte le roman éponyme d’Aravin Adiga et dresse un panorama de l’Inde moderne qui fait froid dans le dos. Alourdi par un récit en voix off qui colle trop classiquement au texte du bouquin, le film vaut surtout pour l’immersion qu’il propose dans les différentes couches de la société indienne, avec une galerie de personnages dignes d’une version bollywoodienne  d’Affreux, sales et méchants.

The Banker

Cinéma|

Par Ph.D

Le Pitch

Dans les années 50 aux Etats-Unis, décidé à faire fortune malgré sa couleur et son niveau social, le jeune Bernard Garrett (Anthony Mackie) s’associe à Joe Morris (Samuel L Jackson), un patron de bar aisé, pour racheter des appartements de blancs et les vendre à des noirs. Leurs affaires prospérant, ils rachètent une banque puis deux, défiant les lois raciales en vigueur, en se servant d’un prête-nom blanc Matt Steiner (Nicholas Hoult). Leurs ennuis commencent lorsqu’ils sont contraints de l’installer à la tête d’une de leurs banques…

Ce qu’on en pense

Produit par Samuel L Jackson et réalisé par George Nolfi (L’Agence, La Naissance du dragon) pour  Apple+, The Banker s’inspire de l’histoire véridique de deux entrepreneurs noirs américains qui avaient contourné les lois raciales pour faire fructifier leur business et en faire profiter la communauté noire, à laquelle il était quasiment impossible d’accéder à la propriété ou de lancer un commerce. Comme l’excellent  Green Book, qui était aussi inspiré d’une histoire vraie, le film reconstitue l’Amérique ségregationniste des années 50 sur le mode de la comédie dramatique en se servant de l’abattage des deux acteurs principaux pour enlever l’affaire. Bien écrit, bien dialogué, bien joué et bien réalisé, le film coche toutes les bonnes cases et constitue une des  pépites de la plateforme de streaming d’Apple.

MK2 : ciné gratuit

Cinéma|

Par Phil Inout

Pendant la durée du confinement, le distributeur MK2 propose cinq films par semaine en accès gratuit sur sa plateforme vidéo MK2 Curiosity. Courts métrages, longs métrages, documentaires, films pour enfants, de réalisateur connus ou plus confidentiels, grand public ou cinéphiles, ces films sont disponibles gratuitement pendant 7 jours, du mercredi au mercredi, avec un accompagnement éditorial complet sous la forme d’une pastille vidéo d’introduction aux œuvres de la semaine par la comédienne et réalisatrice  Lubna Playoust, mais aussi des articles, d’analyses et d’entretiens. Une excellente manière de combler, sans bourse délier, son appétit de cinéma en attendant la réouverture des salles.  

 

Pieces of a Woman

Cinéma|

Par Philippe DUPUY

Le Pitch

A Boston, Martha (Vanessa Kirby) et Sean Carson (Shia LaBeouf) s’apprêtent à devenir parents. Mais la vie du couple est bouleversée lorsque la jeune femme accouche chez elle et perd son bébé, malgré l’assistance d’une sage-femme (Moly Parker),  bientôt poursuivie pour acte de négligence. Martha doit alors apprendre à faire son deuil, tout en subissant une mère intrusive (Ellen Burstyn) et un mari de plus en plus irritable. Mais il lui faut aussi assister au procès de la sage-femme, dont la réputation est désormais détruite.

Ce qu’on en pense

Comme on finit l’année, on la commence: avec un grand film Netflix. Après David Fincher et Mank (Numéro 1 de notre top films 2020), la plateforme enfonce le clou avec Pieces of a Woman du Hongrois préféré de Cannes, Kornel Mundruczo. Découvert en 2014 avec White Dog, Mundruczo avait divisé la critique en 2017 avec La Lune de Jupiter, polar mystique et fantastique qui faisait d’un jeune migrant un super héros christique. Il devrait à nouveau faire l’unanimité avec Pieces of a Woman, superbe portrait de femme en forme de mélodrame qui suit la reconstruction d’une jeune mère après la perte de son premier enfant à l’accouchement. Réalisation virtuose (le plan séquence d’accouchement  restera dans les annales) et intimiste à la fois, direction d’acteur au top, casting parfait  (Vanessa Kirby découverte en sœur de la reine dans The Crown a reçu le prix d’interprétation à Venise pour son rôle de mère éplorée, Shia LaBeouf est trés bien aussi dans celui du mari), scénario impeccable le film coche toutes les bonnes cases. Pour sa première réalisation hors de son pays, Kornel Mundruczo signe une oeuvre bouleversante, dont l’atmosphère enneigée et la localisation dans le Massachussets pourront rappeler à ceux qui l’ont vu le très beau Manchester By the Sea de Kenneth Lonergan, autre grand film sur le travail de deuil…

Meurtrie

Cinéma|

Par Ph.D

Le pitch

Jackie Justice (Halle Berry), une ex-championne déchue de MMA saisit sa dernière chance de se racheter au combat et dans la vie quand le jeune fils qu’elle a laissé son ancien compagnon élever revient vivre avec elle.

Ce qu’on en pense

Pour sa première réalisation, Halle Berry (X-Men, Cat Woman, Cloud Atlas...) nous entraine dans les  coulisses du MMA, sport de combat ultra violent,  dont les championnats féminins sont aussi spectaculaires que ceux des hommes. Elle se met en scène dans le rôle d’une championne déchue qui va retrouver l’envie de combattre et de vivre grâce au retour à la maison de son jeune fils,  qu’elle avait laissé son père élever seul pour se consacrer à son art. Un bon petit film de boxe , mélant rédemption et rapports filiaux,  mis en scène dans une veine sociale indé,  avec des séquences de combat spectaculaires (la dernière en particulier) et des scènes d’émotion réussies. Aussi crédible comme actrice que comme réalisatrice, Halle Berry réussit son passage derrière la caméra. Seuls les abonnés Netflix pourront , hélas, s’en rendre compte.

A Ghost Story

Cinéma|

Par Philippe DUPUY

Le Pitch

Apparaissant sous un drap blanc, le fantôme d’un homme (Casey Affleck) rend visite à sa femme (Rooney Mara) en deuil dans la maison de banlieue qu’ils partageaient encore récemment.Dans ce nouvel état spectral, le temps n’a plus d’emprise sur lui. Condamné à ne plus être que simple spectateur de la vie qui fut la sienne, le fantôme se laisse entraîner dans un voyage à travers le temps et la mémoire. En proie aux ineffables questionnements de l’existence et à son incommensurabilité…

Ce qu’on en pense

Les blockbusters et les disputes conjugales ont parfois du bon. La preuve avec A Ghost Story, que David Lowery raconte avoir tourné pour prouver à son épouse – qui lui reprochait d’avoir vendu son âme à Hollywood avec Peter et Elliott le dragon-, qu’il était encore capable de réaliser un film indépendant comme Les Amants du Texas. Il a donc rappelé Casey Affleck et Rooney Mara et les a enfermés dans une maison abandonnée de la banlieue d’Irving au Texas, où il a grandi, pour y tourner, avec des moyens réduits et dans un format 4/3, ce film de fantômes à l’ancienne, avec drap blanc troué et sans effets spéciaux. Résultat: un petit chef d’œuvre poétique, qui a raflé trois prix (Prix du jury ex æquo, prix de la révélation, prix de la critique) à Deauville. Entamé comme un nouveau Paranormal Activity, avec longs plans fixes et musique angoissante (signée Daniel Hart), A Ghost Story glisse insensiblement vers le surréalisme et, après un plan fixe (déjà culte) de 4 minutes sur Rooney Mara en train de manger une tarte pour tromper son chagrin, finit par former une vaste fresque temporelle qui va de l’Amérique des pionniers à nos jour. Le tout en 1h30 chrono et sans quitter la maison abandonnée, où le fantôme de Casey Affleck semble condamné à errer pour l’Éternité ! Une épopée intimiste et claustrophobique à (re)voir absolument sur Netflix. 

Mank

Cinéma|

Par Philippe DUPUY

Le pitch
Hollywood, 1940 :  victime d’ un accident de voiture qui le cloue au lit pour plusieurs mois, le scénariste Herman J. Mankiewicz (Gary Oldman), alcoolique invétéré au regard acerbe, est envoyé par Orson Welles (Tom Burke) dans une villégiature isolée du désert de Mojave, avec 60 jours pour lui écrire un scénario : ce sera Citizen Kane… 

Ce qu’on en pense

Le plus grand film de l’année 2020 sort…  sur Netflix.  Et le Covid n’y est pour rien, cette fois !  David Fincher,  qui n’a plus tourné pour le cinéma depuis Gone Girl (2014),  a délibérément choisi la plateforme de streaming pour diffuser son film, qui est – ce n’est pas le moindre paradoxe- un formidable hommage au cinéma. Après Roma d’Alfonso Cuaron et The Irishman de Martin Scorsese,   Netflix s’impose comme le dernier refuge du grand cinéma d’auteurs et fera sans doute la course des Oscars en tête avec Mank, biopic du scénariste de Citizen Kane, Herman J Mankiewicz , auquel Gary Oldman prête son talent transformiste. Un film fleuve de 2h12 sur les coulisses de l’âge d’or d’Hollywood,  qui est aussi une ode à la liberté de création. Dans un sublime noir et blanc,  qui rappelle évidemment le chef d’oeuvre d’Orson Welles,  David Fincher (Fight Club, Zodiac, The Social Network), adaptant un scénario écrit par son père il y a vingt ans,  fait une démonstration de mise en scène époustouflante. En d’autres temps, ce film aurait enflammé la Croisette et décroché une Palme d’or. Il se contentera de quelques millions de vues sur Netflix et d’une ou deux statuettes. Ainsi va (ou ne va plus ?) le cinéma…  

The King of Staten Island

Cinéma|

Par Philippe DUPUY

Le pitch

Il semblerait que le développement de Scott (Pete Davidson) ait largement été freiné depuis le décès de son père pompier, quand il avait 7 ans. Il en a aujourd’hui 24 et entretient le doux rêve d’ouvrir un restaurant/salon de tatouage. Alors que sa jeune soeur Claire (Maude Apatow) , sociable et bonne élève, part étudier à l’université, Scott vit toujours au crochet de sa mère infirmière, Margie (Marisa Tomei), et passe le plus clair de son temps à fumer de l’herbe, à traîner avec ses potes Oscar, Igor et Richie et à coucher en cachette avec son amie d’enfance Kelsey (Bel Powley). Mais quand, après 17 ans de veuvage, sa mère commence à fréquenter Ray (Bill Burr), lui aussi pompier, Scott va voir sa vie chamboulée et ses angoisses exacerbées. L’adolescent attardé qu’il est resté va enfin devoir faire face à ses responsabilités et au deuil de son père…

Ce qu’on en pense

Surtout connu pour ses comédies régressives (40 ans toujours puceau, En cloque mode d’emploi…), Judd Apatow réussit aussi trés bien les dramédies, comme il l’a déjà prouvé avec Funny People. Il est aussi connu pour révéler de  nouveaux talents (Seth Rogen, James Franco, Paul Rudd, Jonah Hill…). Aperçu dans Crazy Amy, Pete Davidson explose ici dans un premier rôle très autobiographique. Ayant perdu son père pompier dans les attentats du World Trade Center, Davidson, grand échalas dégingandé aux yeux globuleux et à la lippe Jaggerienne,  s’est signalé par des shows de stand-up particulièrement féroces. Il a participé aux dialogues et au scénario du film,  qui dresse le portrait d’un jeune garçon perturbé mais intelligent qui, à 25 ans passés, va enfin trouver le chemin pour passer à l’âge adulte grâce aux efforts conjugués de sa mère (Marisa Tomei, toujours parfaite) , de sa soeur (Maude Apatow) , de son peut-être futur beau père (Bill Burr à moustache) et de sa copine d’enfance (Bel Powley, excellente). Mash-up improbable de Clerks et de Mommy, The King of Staten Island  est une belle réussite.

 

 

Thee Wreckers Tetralogy

Cinéma|

Le pitch
Thee Wreckers Tetralogy s’attache aux déambulations d’un groupe de rock virtuel, où la musique redonne vie aux fantômes et ravive les souvenirs, les illusions, les sacrifices. Un trip musical résolument Rock, convoquant l’esprit des artistes, à la fois jeunes, vieux, morts et éternels…

Ce qu’on en pense

Décédé en mars 2019 à l’âge de 50 ans, l’artiste néerlandais Rosto a laissé une oeuvre musicale et filmée qui baigne dans des atmosphères à la Residents/NIN/David Bowie (En retour, ce dernier s’est semble-t-il pas mal inspiré de l’univers visuel de Rosto pour ses derniers clips). Thee Wreckers Tetralogy est le montage de quatre courts métrages sous forme de cadavre exquis (la fin de l’un est le début de l’autre) qui racontent à leur manière l’épopée d’un groupe de rock (The Wreckers), plus ou moins inspiré de celui qu’avait formé Rosto dans sa jeunesse. Les chansons de la  B.O,  que Rosto a écrites dans une veine très Bowie dernière période, racontent l’histoire et sont annoncées par des citations de John Lennon ou Kurt Cobain, d’où il ressort que la réalité pourrait être « un rêve que l’on fait ensemble »…  Les effets visuels et les personnages résultent du mélange d’images réelles et d’images de synthèse insérés dans des décors numériques. Le résultat, bien que très clippesque,  est parfaitement original et légèrement perturbant. Un cauchemar de Tim Burton sous drogues psychédéliques.  Pour amateurs de rock industriel et de cinéma de l’étrange.