Par Jacques Gantié
Comment dit-on, en portugais, convivialité, terroir, cuisine de famille ? On trouve les mots, bien sûr, ils ont le même sens que chez nous, mais on les prononce peut-être avec plus de cœur. Le pays a la côte et sa capitale, qui déborde de vitalité et de tables nouvelles, sert d’antidote à notre blues chronique. Dites « Lisbonne, Porto, Coimbra… » et les visages s’éclairent. En attendant l’embarquement, allons à Beausoleil, ce bairro alto de Monaco où une colonie chaleureuse se retrouve dans quelques restaurants. Entre culture populaire, identité et gastronomie, voici le meilleur. Ouvert il y a trois ans, La Véranda de Filipe Fernandes, également propriétaire de O Lusitano, se veut chic mais sans ostentation : salle blanche et claire, quelques toiles d’artiste aux murs, terrasse accrochée à une rue aussi escarpée que la colline de l’Alfama, sans son tramway cahotant. J’y ai entrevu et aimé l’indéfinissable saudade, nostalgie strictement portugaise, et goûté des plats valeureux, fidèles à leurs régions d’origine. Coiffé d’un bandana de corsaire, tout à sa cuisine dont il sort rarement, Jorge Morais, natif de Guimaraes, au nord de Porto, est aussi discret que certains de ses clients sont expansifs, mais ses recettes parlent pour lui. Délicieuse morue en croûte de pain et julienne de poivrons braisés à la mode de Braga (le nord, encore), cataplana aux fruits de mer, récipient et plat typique de l’Algarve, poulpe grillé et pommes de terre – un régal – et puis le cochon de lait rôti « à Bairrada », croustillant et doré, emblématique de cette région du centre aux rouges puissants. Quant au gâteau aux œufs d’Ovar et glace au citron ou au pieux pudding Abade de Priscos avec lard de porc, doigt de porto, zeste de citron et cannelle, ils vous feront oublier les fameux pasteis de nata, ces petits flans de Belem ou des pastelarias du centre de Lisbonne. Enfin, la carte des vins est à la hauteur de cette cuisine d’identité : vinho verde (la cuvée Secreto de la Quinta do Regueiro, maison Alvarinho), crus du Douro (blanc Quinta do Carmo, rouge « Duas Quintas » de Ramos Pinto) ou encore les cuvées d’Esporao, fameuse maison de l’Alentejo. Accueil sans fioritures, service sympa de Sergio, assiette généreuse, épatants prix de midi, carte qui sait se renouveler… La Véranda est bien le meilleur portugais de la Côte. Alors, « tudo bem e bom apetite ! ».
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