Ça vient de sortir

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Leonard Cohen : Thanks For The Dance

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Sa disparition a laissé un vide sidéral. Par chance, Leonard Cohen avait posé sa voix sur des chansons inachevées que son fils Adam a pris soin de ne pas gâcher en les laissant dans leur jus,  avec une production le plus dépouillée possible. Une guitare espagnole par ci, un chœur féminin par là, quelques notes de violon tzigane… Rien de trop appuyé. Les textes et la voix suffisent à déchirer le cœur. Ces 9 chansons sauvés du néant sont parmi les plus belles qu’ait écrites le poète canadien et le disque est magnifique. Un quasi miracle. Merci pour la danse !  Ce sera, hélas, la dernière…

 

Diego Maradona

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Le pitch

Le 5 juillet 1984, Diego Maradona débarque à Naples pour un montant qui établit un nouveau record du monde. Pendant sept ans, il enflamme les stades. Le footballeur le plus mythique de la planète a trouvé ses marques dans la ville la plus passionnée – mais aussi la plus dangereuse – d’Europe. Sur le terrain, Diego Maradona était un génie. En dehors, il était considéré comme un dieu. Cet Argentin charismatique a mené le SCC Napoli en tête du tableau pour la première fois de son histoire. Mais le prix à payer était élevé. Accointances avec la mafia, drogue, prostitution… Des heures sombres l’attendaient après ces années fastes…

Ce qu’on en pense

Réalisé à partir de plus de 500 heures d’images inédites, issues des archives personnelles du footballeur, par le documentariste anglais Asif Kapadia, auquel on doit deux très bons films sur Ayrton Senna et Amy Winehouse, Diego Maradona retrace la carrière et cerne la personnalité du pibe de oro mieux qu’aucun autre jusqu’ici (Kusturika s’y était essayé en 2008 avec son Maradona par Kusturica).Le film était en sélection officielle au dernier festival de Cannes, mais le footballeur, qui y était pourtant annoncé, a renoncé au dernier moment à assister à la projection, confirmant ainsi qu’il reste, malgré les années, les excès et les kilos en trop, le roi du contrepied.

Encyclopédie des répliques de films

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Sans les répliques de films, on n’aurait même jamais appris à sifflerVous savez siffler, Steve ? Vous rapprochez vos lèvres comme ça et vous soufflez ! » Lauren Bacall dans Le Port de l’angoisse) . Il faut donc saluer à sa juste valeur la parution en pack des deux tomes de l’indispensable encyclopédie des répliques de films de Philippe Durant. 8 000 répliques pour ne jamais rester bouchée bée, briller en société et… sauver sa peau ! Grace, par exemple, à celle-ci sur le maniement de la nitroglycérine : « Tu ne bouges pas un sourcil, tranquille. Tu ne respires pas, tu ne fais rien. Ou peut-être une petite prière » (Atlantide l’Empire perdu)…

Last Train : The Big Picture

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Rock à guitare pas mort. Last Train le prouve avec un second album magnifique qu’on écoute en boucle depuis sa sortie. Le quartet alsacien, dont le premier album était déjà prometteur, a semble-t-il  retenu la leçon de Nirvana et du grunge,  avec des titres bien lourds, qui alternent passages lents, montées en puissance démoniaques et accélérations fulgurantes, n’hésitant pas à s’étirer sur près de dix minutes (« The Big Picture » et son clip génial à voir ci-dessous). Le chanteur a les cordes vocales les plus déchirées depuis Kurt Cobain et les pistes de guitare sont à tomber. De loin le meilleur disque de rock français (chanté en anglais) de 2019.

Alex Beaupain: Pas plus…

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(Photo Vincent Desailly)

Secret le mieux gardé de la chanson française, Alex Beaupain ne semble être connu que par les fans des films de Christophe Honoré, dont il signe régulièrement les B.O et par ceux de Julien Clerc, pour lequel il a écrit plusieurs succès. C’est bien dommage, car ses propres albums sont excellents et on les aime beaucoup. Celui-ci est son sixième et il est encore meilleur que le précédent. Plus sombre aussi, avec des textes poignants chantés de la voix la plus douce qui soit. Écoutez « Les Sirènes », « Orlando » ou « Tout le contraire de toi », qui ouvre l’album, et vous comprendrez le sens de l’expression « long comme un jour sans Beaupain».

The Who : Who

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On n’attendait plus grand-chose des Who, réduits au duo Townshend/Daltrey et désormais septuagénaires. Et bim ! Voila qu’ils produisent leur meilleur album depuis Who Are You (1978 !). Onze nouvelles chansons  impeccables qui sonnent parfaitement  Who  (d’où le titre),  avec riffs de guitares rageurs,  boucles de synthé à la « Baba O Riley » et textes concernés. Et la voix de Roger Daltrey, inoxydable. Rien qui risque de casser l’internet, ni de faire un hit sur les radios FM, mais des compos solides, bien produites, que les vieux fans auront plaisir à découvrir et qui leur donneront envie de réécouter Who’s NextQuadrophenia et même Who Are You tant qu’on y est. Le tout sous une pochette superbe qui  incite à acheter le vinyle plutôt que le CD. C’est Noël !

 

NoJazz : Beautiful Life

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Avec ce 7 ème opus, le groupe niçois  Nojazz poursuit l’exploration de l’électro jazz world, véritable marque de fabrique du groupe, tout en maintenant son cap soulful. Leur nouvelle voix hautement funky, apparue dans l’album précédent (Soul Stimulation),  surfe sur des rythmiques percutantes, parfois même déroutantes, se glisse avec aisance entre les riffs de cuivre toujours si puissants et trouve parfaitement sa place au milieu d’arrangements débridés. Les NoJazz déploient ici plus que jamais leurs talents d’écoute et d’improvisation. Ils aiment surprendre autant qu’ils aiment être surpris.  Chaque nouveau titre est pour eux l’occasion d’une plongée vers l’inconnu initiant sans peine de nouvelles collaborations à travers la planète. Le son très abouti et actuel de « Beautiful Life » en est une belle illustration.

Renaud : Les Mômes…

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Depuis qu’il est repassé à l’eau, Renaud a retrouvé son mojo. Cet album « pour enfants », le prouve mieux encore que le précédent, qui était celui de sa résurrection et en portait encore les stigmates. Cette fois,  Musiques et textes sont du niveau des meilleures années. Il n’y a que la voix qui n’est pas revenue, hélas,  mais après quelques écoutes on n’y fait plus attention, tellement les chansons sont bonnes. Renaud y évoque  l’enfance (l’école, la récré, les copains, les grandes espérances, les petites peurs, les sorties au parc…)  avec la gouaille et l’humour de Titeuf… La nostalgie en plus. « Les Animals« , en single, donnent le ton, avec un texte malin et un refrain particulièrement entraînant. Le reste est du même tonneau : du grand Renaud.

Coldplay: Everyday Life

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A la première écoute, on se demande ce qu’on est en train d’écouter : un disque de démos world ? Un Christmas Album apocryphe ? La BO d’un film imaginaire ? Le Mystère des voix bulgares ? Mais non, c’est  bien le nouveau Coldplay. Un album beaucoup plus aventureux que ses prédécesseurs, qui rompt avec les racines pop du groupe et l’envoie voyager aux lisières de la world music et  du jazz oriental. PAS DE PANIQUE ! Le talent mélodique de Chris Martin est toujours là et il y a de très belles chansons  (« Daddy », « Arabesque »…). C’est un disque grave, profond et beau, ouvert sur le monde mais à écouter chez soi, pas dans les stades avec un bracelet fluo, des ballons  et des confettis.  Un disque pour « la vie de tous les jours », comme le suggère son titre.

Interview : Lofofora

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Après une «parenthèse acoustique» qui aura tout de même duré deux ans, Lofofora a rebranché les guitares pour Vanités, dixième album d’un groupe qui fête cette année ses 30 ans d’existence. Reuno, le charismatique chanteur des Lofo,  qui a vécu à Cannes une partie de son adolescence, nous a raconté l’enregistrement… 

Le nouvel album sonne plus électrique que jamais.Ça vous avait manqué ?

Deux ans à jouer acoustique pour des clowns électriques comme nous, c’était effectivement un peu long. On était heureux de retrouver la fée électricité et on a remis les watts !

Cette parenthèse acoustique a-t-elle apporté quelque chose au son du groupe ?

Le fait d’avoir été dépouillé des artifices de la distorsion nous a sans doute conduits à des compos plus aérées… Toutes proportions gardées, car ça reste du rock lourd.Disons qu’on a travaillé avec les amplis à 9 plutôt qu’à 11 (rires). Côté chant,  j’ai aussi moins de complexes : je sais que je peux me permettre plus de choses sans que les fans du groupe se barrent en courant.

La longévité du groupe devrait vous rassurer : 30 ans d’existence pour un groupe de metal, c’est rare.Vous allez les fêter ?

On n’est pas trop pour les commémorations et les médailles.C’est un peu antinomique avec l’idée qu’on se fait du rock. On ne fête pas l’anniversaire du groupe, mais on célèbre la vie sur scène tous les soirs et le plaisir de jouer encore ensemble après tout ce temps.

Votre bio Wikipédia indique que vous vous êtes rencontrés à un concert d’Iggy Pop à Antibes, c’est vrai ?

Pas tout à fait.Phil Curty, notre bassiste, est originaire de Nice et moi j’ai vécu à Cannes de 16 à 23 ans. On s’est rencontrés au Fort Carré d’Antibes et on a commencé à se voir régulièrement.Lui jouait déjà dans un groupe punk. C’est après un concert d’Iggy au théâtre de verdure de Nice qu’on a effectivement décidé de faire de la musique ensemble.Il faut croire qu’il a été particulièrement convaincant ce soir-là (rires)

Quelle est la recette pour durer en tant que groupe de Metal ?

S’entourer des bonnes personnes et être sincère. Tant qu’on a toujours plus envie de tailler la route pour jouer ensemble que de partir en vacances et qu’on reste connecté au monde, on trouve toujours des raisons de s’énerver et d’écrire de bonnes chansons rock.

COD : Modern Warfare

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Par Cédric Coppola

Fidèle au rendez-vous annuel, le nouveau Call of Duty  est désormais disponible. Il bat une énième fois des records puisque ce nouvel opus a engendré près de 600 millions de dollars lors des trois premiers jours de lancement ! Un chiffre hallucinant, signe que l’engouement pour le blockbuster d’Activision ne faiblit pas. Développée par Infinity Ward , la série des «Modern Warfare » a pour objectif de se focaliser sur des conflits contemporains avec comme point central la lutte anti-terroriste. Ce cru 2019 qui fait également office de reboot s’inscrit dans cette lignée et propose une campagne de premier ordre qui bien que courte, nous envoie aux quatre coins du globe au cours de missions intenses. Une envie de réel… mais aussi de créer une pure fiction. Ainsi la Syrie et Al-Qaïda apparaissent sous des noms d’emprunts. Certaines libertés ont aussi été prises avec les agissements de l’armée russe. Un point faisant même l’objet d’une polémique, notamment en raison d’une séquence où l’on dirige une enfant qui voit son père abattu sous ses yeux par un soldat soviétique… A jouer en connaissance de cause, avec un certain recul, donc. Entre phases d’infiltrations, utilisation de drones, passages où il faut user du fusil de sniper, défense d’une ambassade, attentat à Piccadilly… les situations rencontrées sont variées.

Le côté scripté, scénarisé, fait toujours son petit effet et l’ensemble est diablement spectaculaire. Comme de coutume, plusieurs niveaux de difficultés sont disponibles. Une fois cette campagne achevée, direction le multi. Petite surprise, le mode zombie n’est pas au rendez-vous. Il est remplacé par des opérations spéciales haletantes à mener en coop. Attaque ou défense d’objectifs sont les maîtres mots de ces défis réellement funs, surtout en compagnie d’amis. Fer de lance de la galette, dont l’installation avoisine les 120 go sur PS4 Pro, l’aspect compétitif est une nouvelle fois des plus complets. On note des cartes où il faut jouer dans l’obscurité, des conflits à grande échelle avec des véhicules blindés, du match en équipe ou chacun pour soi…. Le tout en comité plus ou moins réduit. Autre gros plus : le Crossplay. Désormais il est possible de se fritter simultanément que l’on soit sur PS4, X-One ou PC ! D’un point de vue technique, « Modern Warfare » est une vraie réussite. Les graphismes se situent un cran au-dessus des précédentes productions et le travail sonore est remarquable. Avec un bon équipement, l’immersion est totale et pourra même perturber les plus sensibles ! Autre atout de cet opus 2019, l’absence de lootboxes ! Désormais, il s’agit de remplir des défis (abattre tant d’ennemis avec une arme particulière, terminer un certain nombre de parties…) pour accumuler des points d’expérience et débloquer du nouvel équipement. Une idée qui porte ses fruits, au point de rendre le jeu encore plus chronophage ! (Testé sur PS4 Pro)

Cigarettes After Sex : Cry

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Non contents d’avoir le plus beau nom de groupe du monde, les Cigarettes After Sex produisent la plus belle musique qui soit. On craignait qu’ils ne puissent jamais surpasser la perfection ouatée de leur premier album,  paru il y a deux ans,  et qu’on écoute encore en boucle chaque fois qu’une soirée s’éternise. Leur second est encore meilleur,  avec des chansons qu’on croirait remixées du Velvet 3 par Roger Waters pour un film de David Lynch : crépusculaires et sensuelles, portées par la voix androgyne de Greg Gonzalez et des arrangements minimalistes de musique de chambre. Etonnant pour un groupe originaire d’El Paso (USA). Beau à pleurer, Cry est  l’album de l’hiver… Et de tous les suivants. A écouter en boucle sous la couette avant, pendant et après l’amour…

The Cure: 40 Live

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Sans qu’on s’en rende bien compte, The Cure est devenu cette chose énorme qui peut se permettre de réapparaître tous les cinq ans, de remplir les stades sans la moindre publicité , d’y donner des concerts phénoménaux de près de trois heures en alignant tube sur tube et de disparaître à nouveau sans laisser d’adresse jusqu’à l’annonce de la prochaine tournée. Seuls une poignée de groupes au monde peuvent se permettre ce genre de choses. Des dinosaures pour la plupart. En 2018, le groupe de Robert Smith fêtait son 40e anniversaire avec deux concerts historiques à Londres: le premier en juin au Royal Festival Hall, avec une étonnante setlist  reprenant un titre de chacun de ses 13 albums studio dans l’ordre chronologique puis rétrochronologique.  Le second s’est tenu au mois de juillet à Hyde Park,  avec un programme plus classique d’une trentaine de chansons balayant toute sa carrière. Les deux shows, aujourd’hui disponibles en CD , DVD et BR, sont monstrueux. On s’attendait à plus kiffer le premier, donné en format club dans lequel on n’a plus vu le groupe depuis des lustres. Il est trés bon,  mais c’est celui de Hyde Park qui nous a fait grimper au rideau. Le groupe formé du vétéran Simon Gallup à la basse (since 1979 !),   Jason Cooper à la batterie,  Roger O’Donnell aux claviers et de l’ancien sideman de David Bowie, Reeves Gabrels aux guitares,  est un véritable rouleau compresseur. Et la setlist est imparable : 29 titres 29 tubes immortels. Le son est énorme et la captation vidéo parfaite. Merci Tim Pope ! Au micro et à la guitare Robert Smith est impérial : le temps ne semble pas avoir de prise sur lui. Comme une bonne nouvelle n’arrive jamais seule, Smith a annoncé que Cure allait sortir l’an prochain non pas un,  mais trois nouveaux albums. Avec près de 9 heures de musique cumulées sur les 4CD et 2DVD du coffret, on a largement de quoi patienter jusque-là.

 

Interview : Vincent Delerm

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Une « vie Varda ».Comme celle qu’il chante dans son nouvel album : oublier le succès, « simplement dire ce qui nous touche », « regarder ailleurs », « quelquefois chercher l’élégance » et « parfois trouver la beauté » Depuis qu’il est apparu, à l’aube des années 2000 dans le paysage de la chanson française, Vincent Delerm s’est appliqué à garder la légèreté du trait qui, mine de rien, dessine une carrière presque déjà vingtenaire. La parution de son septième album (Panorama) et du film qui l’accompagne (Je ne sais pas si c’est tout le monde) fournit l’occasion de faire un point sur le parcours atypique du chanteur « hors compétition »

Sortir un film et un disque en même temps, c’est une double pression ?

Au bout de vingt ans, c’est un luxe inouï de pouvoir continuer à exister comme artiste et de faire ce que j’ai envie de faire. Je n’ai jamais trop transformé ça en pression négative. Je me dis qu’il y a un noyau dur de gens qui me suivent et s’intéressent à mon travail et qui auront envie de voir où j’en suis. La pression, c’est plutôt au moment de l’écriture des chansons : on a envie qu’elles soient bien et que les gens ne soient pas trop déçus.Mais avoir la possibilité de faire ce qu’on a envie de faire, s’inscrire dans la durée en tant que chanteur, tout en pouvant faire un pas de côté de temps en temps, comme avec ce film, c’est juste du bonheur.

Les deux projets étaient imbriqués dès le départ ?

Depuis quelques années, j’aime bien travailler sur la chanson et faire autre chose en parallèle : des photos, du théâtre, un film cette fois. L’idée du film remonte à plusieurs années déjà et elle a beaucoup évolué au fil du temps.L’écriture de l’album est venue après.Il y a des passerelles entre les deux : la chanson « Panorama », qui donne son titre à l’album, reprend des extraits d’interviews du film. Et « Je ne sais pas si c’est tout le monde » reprend le titre du film, mais elle n’est pas dedans. D’ailleurs, la BOdu film sortira séparément.Le film et l’album sont comme deux chemins parallèles…

Pourquoi les sortir ensemble ?

Je ne voulais pas qu’un des deux objets soit à la ramasse de l’autre. Ça m’est arrivé plusieurs fois de sortir des choses en même temps, parce que ça appartenait à une même époque de création.Il y a aussi l’idée de ne pas sortir le disque et revenir six mois après pour dire « Ah, au fait, j’ai oublié de vous dire : j’ai aussi fait un film » (rires). J’aime bien rester assez discret donc, tant qu’à faire de la promo, autant la faire pour les deux en même temps.

Les thématiques abordées sont assez proches…

Il y a forcément un cousinage.Le film et l’album fonctionnent sur un même ressort, qui est de se demander quelles sont les choses présentes qui comptent pour nous et si elles comptent aussi pour les autres.Ça impliquait l’intervention de gens extérieurs. Sur l’album, j’ai demandé à une dizaine d’artistes différents de réaliser chacun une chanson et sur le film j’ai interviewé des gens très différents aussi les uns des autres.On passe par toute une galerie de personnages qui disent quelque chose d’eux et de leur manière de ressentir la vie et les choses. Le fil conducteur c’est de partir d’une impression personnelle, de se dire : « Oui je ressens ça, mais je ne sais pas si c’est tout le monde » et de télescoper ça chez les autres. C’est ce qu’on essaie toujours de faire quand on écrit des chansons : on parle de choses très intimes et personnelles, en espérant qu’elles trouvent un écho fort chez ceux qui les écoutent.

En quoi le fait de faire intervenir des gens différents sur chaque chanson modifie-t-il le résultat final ?

Ça change forcément. En ne travaillant qu’avec un seul réalisateur pour tout l’album, on obtient une unité de couleurs et de sons.C’est ce qu’on recherche d’habitude.Là, au contraire j’avais envie que des gens que j’admire s’emparent de mes mélodies pour en faire un truc à leur sauce. Même dans l’écriture, ça a orienté les choses : j’ai essayé d’écrire en fonction des gens auxquels j’allais confier la chanson.

Comment avez-vous choisi vos collaborateurs ?

L’idée était de me faire plaisir en contactant des gens que j’admirais de loin depuis longtemps et avec lesquels je me disais que je pourrai travailler. Voyou ou Girls in Hawaï ont un son très différent du mien, mais je pressentais que ça pouvait fonctionner.Idem pour Rufus Wainwright avec lequel j’ai même pu faire un duo. Avec Peter Von Poël, Yael Naïm ou Keren Ann on était déjà en terrain connu…

Pourquoi ce titre, Panorama ?

Panorama, ça renvoie à la fois au panel de gens présents sur l’album et aussi au fait qu’avec le temps j’ai tendance à observer les choses de plus loin, avec plus de recul. Cela fait aussi une passerelle avec le film : il y a quelque chose de visuel, comme un paysage…

Quelque chose aussi de l’ordre du bilan de vie ?

Sans doute.Qu’est-ce qu’on en a fait ? A quoi ça a servi ?Comme chanteur, je voulais m’inscrire dans la durée, faire carrière, si on peut dire. Mais ça obéit à des choses qui vous échappent. Difficile de savoir à l’avance qui restera et qui sera vite oublié… C’est plus une question de tempérament que de talent à mon avis. Pour durer, il faut accepter qu’il y ait des moments de creux, des accidents de parcours…

Comment allez vous porter cet album sur scène ?

Je vais le jouer seul sur scène au piano, avec un grand écran derrière moi.Il y aura des projections de musiciens qui m’accompagneront sur certains titres, pour casser un peu le côté solo.Et puis des choses plus poétiques ou cinématographiques…J’espère venir chanter à Nice et à Toulon, où j’ai d’excellents souvenirs des tournées précédentes.

Vous accompagnerez aussi la sortie du film dans les salles ?

Autant que possible, oui.L’idéal serait de pouvoir le programmer la veille ou le jour du concert et d’être présent à la projection pour en parler avec les gens.Ce n’est pas un objet de cinéma conventionnel.Ça n’aurait pas eu de sens de chercher à en faire un produit commercial et de le sortir dans un tas de salles en même temps.Je suis content que ça puisse se faire un peu à ma façon, et d’une manière qui ressemble à ce que défendent l’album et le film : cette idée de « hors compétition », comme dans la chanson sur Varda.

Comment a-t-il été conçu ?

J’ai fait comme si on me disait : tu as une heure d’écran, tu mets ce que tu veux dedans. Ça a donné quelque chose d’hybride, mi-documentaire, mi-fiction. J’étais parti sur quelque chose de plus écrit, mais en avançant je me suis rendu compte que par rapport à ce que je voulais développer – un rapport à une certaine intimité-, il fallait que j’obtienne des gens qu’on voit dans le film la même chose qui se passe quand on discute pendant longtemps dans une soirée, que le bar est en train de fermer et qu’on dit des choses qui ne sont pas forcément des révélations incroyables, ni qui vont créer un scoop de fou, mais juste très personnelles, très enfouies, à propos desquelles on a tendance à se dire : moi je ressens les choses comme ça, mais je crois que je suis un peu le seul… Et évidemment on se rend compte que c’est là qu’ on trouve le plus grand écho chez les autres.

Qu’ont en commun Alain Souchon, Vincent Dedienne, Jean Rochefort et les inconnus que vous faites parler ?

Ce sont tous des gens que je côtoie, Je n’ai pas cherché à interviewer des gens loin de mon cercle : il y en a déjà plein que j’aurais voulu mettre dans le film et qui n’y sont pas.

C’est le dernier film qu’a tourné Jean Rochefort et les images sont très émouvantes…

C’est lui qui m’a poussé à réaliser en me disant : si tu fais un film je tournerai dedans.Il disait sans doute ça à beaucoup de gens, mais moi je l’ai pris au mot.Il a été merveilleux. Si le film existe, c’est grâce à lui.Et aussi un peu pour lui.

Rocketman

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Par Philippe DUPUY

Le pitch

Star adulée du rock, Elton John (Taron Egerton) débarque en costume de scène à une réunion des Alcooliques Anonymes et raconte comment il est devenu alcoolique et accro à tout ce qui existe comme drogues…

Ce qu’on en pense

Quelques mois après le phénoménal succès de Bohemian Rhapsody,  consacré au groupe Queen et à son chanteur Freddie Mercury , débarquait sur les écrans un nouveau biopic rock : celui d’Elton John. Anobli par la Reine, le pianiste et chanteur anglais a vendu plus de disques que Queen. Le film, réalisé par Dexter Fletcher,  qui avait repris en cours la réalisation de Bohemian Rhapsody (et sauvé le projet), n’a pourtant pas connu le même succès faramineux, malgré son lancement en fanfare au Festival de Cannes.   Cela s’explique, sans doute, par le fait que, contrairement à Freddie Mercury, Elton n’est pas mort jeune et en pleine gloire. C’est aujourd’hui un papa gâteau de 72 ans, au physique de banquier et sa personnalité fascine moins que celle de Mercury. Le film le cantonne un peu trop, aussi, dans les clichés du gamin mal-aimé par sa mère et son père qui devient,  par la grâce d’un talent de musicien hors norme, une méga star planétaire, s’autodétruit dans les excès et se fait exploiter par un manager sans scrupules dont il a eu le tort de tomber amoureux… La prestation de Taron Egerton est, par contre,  épatante. Il  incarne la rockstar à la perfection et chante même à sa place (ce qui n’était pas le cas de Rami Maleck pour Freddie Mercury). Les scènes musicales sont encore meilleures que celles de Bohemian Rhapsody. On regrette même que Dexter Fletcher n’ait pas osé en faire une vraie comédie musicale,  car les plus réussies sont celles qui participent directement à la narration. Comme celle de «Saturday Night’s Alright» en ouverture chorégraphiée. Ou celle de «Crocodile Rock», au cours de laquelle la star et le public s’envolent littéralement. Rocketman rend également justice à Bernie Taupin, parolier des plus grandes chansons d’Elton, resté dans son ombre et avec lequel il collabore pourtant toujours, 50 ans après leur première rencontre. Il met aussi en lumière le rôle décisif de son premier manager, producteur de la vieille école, qui l’a incité à aller sans attendre conquérir les States , en lui donnant ce conseil avisé : «Mets leur en plein la vue et ne te tue pas avec les drogues !». L’excellente édition vidéo du film devrait faire regretter à ceux qui ont fait la fine bouche à sa sortie en salles de ne pas être allé le voir sur grand écran en son Dolby Stéréo.